Discours du président Azali à Saint-Pétersbourg. Je suis très honoré de porter, aujourd'hui, la voix de l'Union Africaine, à ce Deuxième Sommet Russie
Discours d'ouverture de S.E.M AZALI Assoumani, Président de l’Union des Comores, Président en exercice de l’Union Africaine, A l’occasion du Deuxième Sommet Russie-Afrique
- Excellence, Monsieur Vladimir Poutine, Président de la Fédération de Russie,
- Excellences, Messieurs les Chefs d'État et de Gouvernement des États membres de l'Union Africaine,
- Excellence Monsieur Moussa Faki, Président de la Commission de l'Union Africaine,
- Excellences, Mesdames et Messieurs les Représentants des Autorités de la Fédération de Russie et de la ville de Saint-Pétersbourg,
- Distingués Invités,
Je suis très honoré de porter, aujourd'hui, la voix de l'Union Africaine, à ce Deuxième Sommet Russie-Afrique, de Saint-Pétersbourg.
Je suis très heureux également d'apporter l'éclairage de notre organisation sur un certain nombre de questions majeures pour l'Afrique, mais aussi sur la promotion de notre partenariat avec la Russie, une puissance mondiale, active dans notre région.
Mais, permettez-moi, tout d'abord, d'adresser mes remerciements les plus chaleureux, au nom de l'Union Africaine et en mon nom personnel, aux autorités russes pour la qualité de l'organisation de ce Sommet, et pour l'accueil exceptionnel qui nous est réservé, dans cette merveilleuse ville de Saint- Pétersbourg.
Cette mégapole, qui est la « Venise du Nord », est l'expression parfaite de la rencontre du génie russe et de la volonté politique de Pierre Le Grand. Aussi, choisir Saint-Pétersbourg pour tenir ce second Sommet Russie- Afrique, c'est aussi rendre hommage à une histoire commune, entre l'Afrique et la Russie, dont les liens ne sont plus à démontrer.
Excellences,
Mesdames et Messieurs,
Le monde multipolaire du 21ème siècle ne peut se renfermer sur soi, raison pour laquelle l'Afrique veut établir des partenariats toujours plus équilibrés et sincères, entre notre Continent et le reste du monde.
Ainsi, sur le plan économique, l'Afrique où vivront 3,8 milliards d'habitants à la fin de ce siècle, souhaite des partenariats mutuellement bénéfiques, avec des pays, mais aussi avec les grands bailleurs bi et multilatéraux.
Notre continent a les moyens de le faire, compte tenu de l'abondance et de la diversité de ses ressources humaines et naturelles incontestables, et du dynamisme de sa main d'œuvre qui est à la fois qualifiée et compétente et moins compétitive.
Dans ce schéma, il est évident à nos yeux, que la Russie a toute sa place, pour se poser en tant que partenaire majeur, et nous sommes prêts à aborder avec elle toutes les grandes questions de coopération.
J'estime alors que la présente édition du Sommet Russie-Afrique, se tient à un moment charnière pour l'Afrique. Comme vous le savez, dans le but d'accélérer l'intégration économique du continent, les Etats membres ont officiellement lancé, au cours du Sommet de Niamey du 7 juillet 2018, la Zone de Libre-échange Continentale Africaine (ZLECAF).
La création de cet espace économique et commercial unifié, contribuera sans doute, à la mise en application de la vision et des aspirations de l'Agenda 2063. La ZLECAF, ce vaste marché continental en devenir, offrira, en effet, de réels débouchés et des opportunités de croissance, aux entreprises locales et étrangères, investissant en Afrique.
Mais pour qu'elle puisse atteindre pleinement ses objectifs, nos partenariats doivent aussi s'adapter résolument aux priorités du continent, déclinées en des projets phares, contenus dans l'Agenda 2063, de l'Union Africaine.
La problématique des infrastructures, de l'interconnexion et de l'industrialisation, ainsi que la question des énergies, constituent des domaines essentiels sur lesquels nous et la Russie, devrions axer nos actions.
Il est donc plus qu'urgent de réorienter notre approche, pour construire un partenariat stratégique, à même d'accélérer la diversification de nos économies, ce d'autant plus qu'elles se caractérisent par une prédominance à l'exportation des matières premières, à transformer, afin de favoriser la création d'emplois durables, au bénéfice de nos populations, particulièrement de notre jeunesse.
A cet égard, il est important de renforcer le partenariat public-privé entre l'Afrique et la Russie, pour débloquer le potentiel du secteur privé, en tant qu'acteur clé du développement.
Certes le secteur privé africain demeure un levier essentiel pour accélérer la diversification économique grâce à l'innovation dans des domaines à forts potentiels, tels que l'agriculture, l'agro-industrie, la santé, l'éducation, les infrastructures, l'énergie, et j'en passe.
Cependant, les entreprises africaines ont besoin de nouvelles politiques de soutien, pour renforcer leur productivité et exploiter les débouchés commerciaux existants. Le secteur privé africain qui représente 80 % de la production totale du continent, deux tiers des investissements, trois quarts du crédit et emploie 90 % de la population en âge de travailler, est un maillon essentiel de notre Continent, et un allié important, pour les pays partenaires.
Nous comptons alors sur la Russie, aussi bien sur son secteur privé que sur son secteur public, pour apporter cette contribution à l'industrialisation et au renforcement du secteur privé africain, dans un partenariat gagnant-gagnant.
Excellence,
Mesdames et Messieurs,
Un autre domaine et non des moindres, à savoir l'investissement dans le numérique, revêt un caractère tout aussi prometteur, dans le cadre de notre partenariat. En effet, la [next] révolution numérique offre une excellente perspective au continent, pour accélérer sa participation dans la quatrième révolution industrielle, et tirer le meilleur parti des opportunités économiques et sociales qui en découlent.
L'avènement rapide de cette nouvelle révolution nous incline alors, à consacrer davantage d'efforts, pour la formulation de programmes d'éducation et de formation, axés sur le renforcement de l'employabilité des jeunes Africains, et une collaboration efficace, entre le secteur public, le secteur privé et les institutions financières.
Excellences,
Mesdames et Messieurs,
Notre ambition commune est d'identifier les voies et moyens de rehausser notre partenariat, au bénéfice de nos peuples.
Permettez-moi, dans ce contexte, de m'attarder sur une question d'actualité, l'approvisionnement en céréales, qui est essentiel pour ne pas dire vitale à l'Afrique, mais dont la suspension risque aujourd'hui, d'affecter notre partenariat.
La Russie est un partenaire stratégique pour l'Afrique avec une contribution significative dans la réduction de l'insécurité alimentaire.
Elle apporte à notre continent, 30% de ses approvisionnements en céréales et la quasi-totalité de ces importations, 95%, est constituée de 11,9 millions de tonnes de blé, pour une valeur de 3,3 milliards de dollars.
Notre action a toujours été d'aller dans le sens du renforcement de ce partenariat, pour que tous les pays africains puissent en bénéficier, c'est d'ailleurs l'une des recommandations du dernier sommet Russie-Afrique qui a eu lieu à Sotchi, en 2019.
Mais force est de constater, aujourd'hui avec la crise russo-ukrainienne, que l'avenir de ce partenariat se trouvera menacé, si la crise persiste ou bien si un accord durable n'est pas possible entre la Russie et l'Ukraine.
La sécurité alimentaire et économique de l'Afrique sera surtout menacée, d'autant plus que le Continent est, d'ores et déjà, durement affecté par le choc des prix des denrées alimentaires, provoqué par l'interruption de leur approvisionnement.
C'est ainsi que je voudrais, au nom de l'Afrique, faire part ici, de façon solennelle, de notre profonde préoccupation, par rapport aux récentes évolutions, concernant l'annonce de la sortie de la Russie, de l'Accord céréalier, qui autorisait les exportations de céréales ukrainiennes. Nous exhortons alors les parties prenantes, à trouver un terrain d'entente, pour permettre la reprise d'un fret sécurisé des céréales et engrais, d'Ukraine et de Russie, vers notre Continent.
Excellences,
Mesdames et Messieurs,
L'Afrique est disposée à raffermir sa coopération avec la Russie dans tous les secteurs, et plus particulièrement pour contribuer à assurer la paix et la stabilité.
L'Union Africaine, comme vous le savez, a pour mission principale, depuis sa création, de promouvoir la paix et la sécurité sur le Continent.
Vous êtes au courant de ce qui s'est passé, nous condamnons fermement les évènements au Niger, et exigeons la libération immédiate du Président de la République du Niger et de sa famille.
En tout état de cause, l'appui russe à la cause de la stabilité africaine passe aussi, à nos yeux, par la nécessaire conclusion d'une paix effective entre la Russie et l'Ukraine. C'est d'ailleurs, le message que l'Union Africaine a voulu transmettre, il y a un mois, lorsque certains de mes Collègues et moi-même, sommes allés rencontrer le Président Volodymyr Zelensky à Kiev et le Président Vladimir Poutine ici-même à Saint-Pétersbourg, dans le cadre de la Mission de Paix de l'Union Africaine.
Nous restons confiants que notre appel à la paix sera entendu, car le monde en a besoin. Aussi, au nom de l'Union Africaine, j'appelle à nouveau, de tous mes vœux, à une nouvelle coexistence pacifique entre la Russie et l'Ukraine ; les peuples d'Afrique en seront profondément reconnaissants.
Mesdames et Messieurs, Honorable assistance,
Dans le monde globalisé dans lequel nous vivons, nous devons nous engager ensemble pour un multilatéralisme plus inclusif et plus effectif.
Nous pensons collectivement, nous les Africains, que le monde d'aujourd'hui ne peut se passer d'une réforme en profondeur du système international et concrètement de l'Organisation des Nations-Unies.
L'Afrique d'aujourd'hui et de demain, a le droit d'obtenir sa participation au système de décisions collectif du monde, et d'accéder au Conseil de Sécurité, en tant que membre permanent.
Ce fut le combat de mes prédécesseurs, c'est aujourd'hui le mien et ce sera, soyez-en sûr, celui de mon successeur, le jour venu. Je me réjouis qu'il y ait sur ce sujet un point de vue commun, entre notre continent et la Fédération de Russie, et j'exprime le vœu que les autorités russes, continueront de se faire l'avocat, de cette juste cause, dans les enceintes internationales.
L'Afrique mène aussi le même plaidoyer s'agissant de son adhésion, comme membre à part entière, au sein du G20, car pour plus d'équité et de justice, elle ne peut pas être écartée, des instances décisionnelles mondiales. Nous remercions, dans ce contexte, les pays membres du G20 qui ont bien voulu donner leur accord à cette adhésion.
Excellences,
Mesdames et Messieurs,
Ce Deuxième Sommet Russie-Afrique, nous offre une réelle opportunité de développer une meilleure compréhension de ce que nous devons faire ensemble, pour favoriser l'investissement, afin d'exploiter au mieux le potentiel énorme dont regorge l'Afrique, avec tout l'appui que la Russie peut nous apporter.
Je souhaite alors que les présentes assises permettent de formuler des recommandations opérationnelles pratiques, pour renforcer le partenariat public- privé. Il m'aurait fallu disposer encore de plusieurs heures pour vous dire combien notre Continent croit à la vertu de la coopération russo-africaine, dans la dignité et le partenariat mutuel.
Je souhaite donc du fond du cœur, que ce Deuxième Sommet Russie- Afrique, soit l'occasion d'approfondir le contenu de cette grande idée, pour la paix, le progrès et la prospérité, de la Russie et du Continent africain, dans l'intérêt de leurs peuples.
Je vous remercie.
Beit-salam
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