Jeviens - Jereste, Même Galère ! Apprenons à Unir nos Forces. Un billet d'humeur et surtout d'analyse des situations, des ...
Jeviens - Jereste, Même Galère ! Apprenons à Unir nos Forces.
Un billet d'humeur et surtout d'analyse des situations, des combats de la diaspora et de l'intérieur. Colère difficilement contenue de celui qui subit l'injustice et l'oppression au quotidien, sans se rallier pourtant au régime, et qui comme beaucoup, souffre d'être accusé de passivité et de défaitisme par certains au sein de la diaspora. Il appelle au vrai dialogue et à l'unification des combats.
Après réception de l'article, HaYba s'est assuré de son identité.
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"Venir quelques semaines au pays et prétendre saisir les tenants et aboutissants de la dictature est aussi ridicule qu'essayer de comprendre le mouvement des gilets jaunes en période de coupe du monde où la France gagne tous ses matchs! Ainsi certains je-viens sont venus voir la dictature comme d'autres sont venus voir l'émergence. Et qu'ont ils vu ? Essentiellement des actes de communion nationale autour du maele (auxquels ils ont allègrement pris part soit dit en passant).
Mais les prisonniers politiques? La crise post-électorale? Les morts tant inutiles qu'inexpliqués? Entre 2 madjliss on t'expliquera, vite fait, parce qu'on ne sait pas qui nous écoute. Oui la situation est sous contrôle. Sous contrôle de qui? On t'expliquera qu'on ne sait plus à qui faire confiance.
Alors comment mobiliser plus de trois personnes pour aller revendiquer quoi que ce soit? Oui mais en Algérie, au Soudan? Ok mais après combien d'années de soumission, de résignation, de résilience? Voici le maître-mot: résilience! La capacité à supporter les chocs selon nos brillants intellectuels. Disons plutôt la capacité à préférer la merde à l'incertitude!
Parce que la merde on y est habitué, depuis longtemps et contrairement aux algériens et aux soudanais on a connu sur les 30 dernières années six alternances, toutes aussi décevantes les unes que les autres. Chaque alternance est venue avec ses espoirs et promesses de changement. Résultat des courses, le comorien moyen voit sa situation empirer à chaque régime. Toute la classe politique lui a menti... à l'unanimité ! Descendre dans la rue pour revendiquer?
Revendiquer quoi? Auprès de qui? Parce que l'acte de revendiquer n'a de sens que lorsqu'on a des interlocuteurs qui écoutent le bruit de la rue. L'acte de revendiquer peut aussi avoir du sens s'il est soutenu par des leaders porteurs d'un nouveau souffle. Circulez, il n'y a rien à voir. Le 1er acte au lendemain de la mascarade électorale a été d'interdire tout rassemblement. Les femmes qui ont passé outre se sont retrouvées au poste de police, certaines en résidence surveillée ou sous contrôle judiciaire encore 7 mois après. Six "alternances" ont suffi pour tuer l'espoir.
En attendant le leader-prodige qui en ce moment doit etre à la maternité d'El Maarouf pour paraphraser Agwa -cet homme (ou femme) neuf qui n'aurait eu aucune collusion avec les politicards qui sont au devant de la scène depuis 30 ans- on résiste à notre manière, en mariant nos enfants, frères, sœurs et parents. On se vautre dans les enchères de cadeaux, de bijoux, de banquets et autres futilités matrimoniales .... pourvu que ça brille!
Rassurez vous, le Comorien n'est pas un être à part. Comme tout être humain dans la souffrance et le désespoir, il maximise l'intensité de ce qui le rend heureux même pour un court laps de temps, le temps d'oublier ce qu'il ne peut pas changer. On se rappellera que les plus belles musiques (le blues , la rumba) ont été créées par des populations en souffrance.
Aussi ces manifestations de joie auxquelles vous avez assisté cet été ne reflètent pas du tout un bonheur ou une nonchalance retrouvés mais plutôt un moment d'amnésie volontaire pour oublier le temps d'un toirab ou d'un ukumbi la désolation ambiante. Combien d'entre vous avez fustigé l'immobilisme des Comoriens de l'intérieur, alors qu'une fois sur place vous avez rejoint le chœur des silencieux?
Et une fois passée la frontière, vous vous souvenez d'un coup que vous venez de visiter une dictature. Au fait avez vous rendu visite aux parents ou aux veuves des assassinés ? Avez vous tenté d'obtenir une visite aupres d'un prisonnier? Avez vous tenté de vous faire délivrer une autorisation à manifester? Avez vous expliqué à vos proches la manière de revendiquer le rétablissement d'un état de droit ? Non vous avez mangé le maele comme tout le monde!
Si vous voulez vraiment aider, essayez de comprendre au lieu de juger avec le prisme de l'occidental que vous n'êtes pas. Ce confort dont vous jouissez est le fruit de luttes menées par d'autres avant vous. C'est parce que ce confort est aujourd'hui mis à mal que des gilets jaunes se sont mobilisés fortement pour défendre leurs acquis. Au lieu de nous renvoyer à la figure votre condescendance, venez nous montrer ce que vous avez appris de vos experiences d'ailleurs.
C'est pour ça que vous avez été envoyés là bas, pour apprendre, pour venir construire et non introduire votre carte vitale ou carte bleue pour obtenir un service. On vous aime beaucoup, mais sachez que vous êtes parfois exaspérants à nous rappeler constamment les sacrifices que vous faites, pour nous envoyer vos western union. Quels sacrifices n'avons nous donc pas fait, allant jusqu'à brader notre patrimoine pour vous permettre de partir?
Six mois que vous battez le pavé sans résultat? Faites un bilan, analysez, posez vous les bonnes questions au lieu d'acculer ceux de l'intérieur, revoyez vos copies, jaugez vos forces... bref réfléchissez, réfléchissons car il s'agit d'un seul combat. Nous sommes ensemble dans cette galère, chacun se battant avec les moyens qui lui sont donnés.
Apprenons à combiner nos forces et nos faiblesses pour enfin construire une société où chacun y trouve sa place et son compte. Ce combat n'est pas une faveur que vous faites à ceux de l'intérieur. Que vous ayez l'intention de rentrer ou pas, ce pays restera le vôtre, le nôtre et nous avons tous besoin d'en être fier! Bon voyage, vous avez mangé le retour !"
©Hayba fm - titre et photo ©La rédaction
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