Tout ce qui concerne les Comores concerne au plus haut point la France en raison de Mayotte. Or depuis la semaine dernière, des manife...
Or depuis la semaine dernière, des manifestations s’y déroulent avec une répression musclée de la gendarmerie. Les Comores débutent leurs premières Assises nationales. Dans cette perspective, l’opposition a voulu tenir un meeting dans une salle de la capitale afin d’attirer l’attention sur l’instrumentalisation de ces Assises par le régime en place lorsque des gendarmes ont empêché le déroulement de la réunion de l’alliance de l’opposition et ont escorté ses représentants, agressant violemment l’un des leaders qui n’est autre que le député Mohamed M’Saïdié. Réélu en mai 2016 à la Présidence de l’Union des Comores, après avoir effectué un premier mandat de 2002 à 2006, Azali Assoumani, 59 ans, serait effectivement en train de tourner à son seul profit les Assises nationales convoquées sans aucun respect du protocole démocratique.
Le gouvernorat de l’île d’Anjouan a réitéré par un communiqué son refus de participer aux Assises Nationales et Anjouan a même annoncé par avance qu’elle ne reconnaîtra aucune légitimité aux conclusions qui en seront issues. Même chose du côté de l’île sœur Moheli, où l’exécutif dénonce les dysfonctionnements graves de ces assises nationales soutenues par l’Ambassade de France, la présidence de l’Union des Comores, affichant le soutien de toute la communauté internationale pour ces Assises. Les Nations Unies, la Ligue Arabe, l’Union Africaine soutiennent ce « moment historique » et ont envoyé des représentants pour y assister.
Lors de l’examen de la convention d’entraide judiciaire entre les Comores et la France par la commission des affaires étrangères du Palais Bourbon, les députés français se sont livrés à de très vifs échanges sur la situation sociale et économique de Mayotte. Marine le Pen, la présidente du Front National (FN) a attaqué le gouvernement comorien qu’elle considère comme l’un des responsables des difficultés de Mayotte : « On multiplie les ronds de jambe à l’égard des Comores alors qu’ils remettent en cause l’intégrité du territoire français ! ».
En cause, la fin des visas Balladur et le projet en cours d’une libre circulation totale entre les deux territoires, rejetée par la population mahoraise qui considère la feuille de route franco-comorienne en discussion comme une trahison du gouvernement français alors qu’elle est défendue au nom du dialogue multiculturel par la France Insoumise de Jean-Luc Mélenchon. Invité à s’exprimer sur le sujet, le député mahorais Mansour Kamardine a profité des débats pour alerter les membres de la commission au-delà de leurs divergences partisanes : « Ce n’est qu’au contact de la réalité que vous appréhenderez ce que nous vivons. Mais ce que nous vivons là, personne dans cette salle ne l’accepterait dans sa circonscription », lança-t-il. Forte de cette intervention remarquée, la présidente de la Commission des affaires étrangères Marielle de Sarnez a fait une proposition immédiatement applaudie : le lancement d’une mission parlementaire en direction de l'Union des Comores « qui inclura un passage par Mayotte ».
De fait, toute la semaine dernière, les établissement scolaires de l’île de Mayotte ont tous été perturbés par le droit de retrait des chauffeurs de bus suite à des caillassages réguliers de leurs véhicules . Le lycée de Kahani a subi une agression par des bandes d’une rare violence à l’intérieur même de l’établissement. Le préfet multiplie les déclarations de renforcement des forces de l’ordre mais en prenant soin surtout de les décharger sur la police municipale ou par l’intermédiaire de médiateurs sécurité des mairies. Le département est en déshérence. Même la distribution de l’eau, alors qu’il pleut tous les jours, n’est pas assurée suite à des ruptures régulières de canalisations réparées au compte-goutte ce qui oblige une fois de plus à fermer les établissements scolaires (cas du lycée de Chirongui).
Et pourtant, suite aux nouveaux chiffres du recensement de Mayotte, les dotations globales de fonctionnement 2018 accordées aux communes de Mayotte augmenteront de 14,72 % par rapport à 2018. L’enveloppe consacrée devrait ainsi atteindre les 38,1 millions d’euros tandis que d’autres dotations seront aussi en hausse. Il y a donc de quoi faire mais faute de monter des projets, faute de sécurité, d’attractivité financière, d’infrastructures conséquentes (aucun projet routier de désengorgement de Mamoudzou n’est programmé ) les métropolitains quittent l’île.
Lors de la dernière commission mixte franco-comorienne qui s’était tenue le 8 et 9 décembre 2017 et pour la première fois en présence d’élus mahorais, l’Union des Comores a réclamé à l’AFD (l’Agence française de développement) plus de 750 millions d’euros sur 5 ans ! Rappelons à ce sujet qu’en 2005, une conférence de bailleurs de fonds avait eu lieu à l’île Maurice, un an avant la fin du premier mandat Azali et que ce dernier s’était alors vanté d’avoir récolté 300 millions de dollars qui devaient être utilisés par son successeur, le président Sambi. Or ces millions ont quasiment disparu.
Ce serait donc à la France de payer ! Rappelons à ce sujet que 300 000 Comoriens vivent en France, en particulier à Marseille. 300 000 Comoriens cela représente près de la moitié de la population des Comores, un état connu pour avoir eu deux présidents assassinés, un président déporté, et même, il y a deux ans, un chef d’état-major abattu. Michel Lhomme ♦ Philosophe, politologue. ©metamag.fr