Des armes chimiques sur les migrants! C'est en France
Un rapport accablant d'Human Rights Watch publié mercredi met en cause les pratiques des forces de l'ordre à l'encontre des migrants à Calais.
Un migrant au sol face à des policiers le 1er juin 2017 à Calais. Photo PHILIPPE HUGUEN. AFP |
Human Rights Watch (HRW) dénonce dans un rapport publié mercredi l'usage "routinier" du gaz poivre par la police contre les migrants à Calais, y compris pendant leur sommeil, des accusations formellement démenties par les autorités.
"L’usage de sprays au gaz poivre par la police à Calais est tellement répandu que beaucoup de demandeurs d’asile et de migrants avaient du mal à se rappeler précisément combien de fois ils en avaient été victimes", souligne ce rapport intitulé "C'est comme vivre en enfer".
Cécité temporaire et difficultés respiratoires
Sur 61 migrants interrogés par l'organisation entre fin juin et début juillet, 55 avaient été aspergés au cours des deux semaines précédant l'entretien, et certains assuraient l'avoir été tous les jours, affirme son auteur, Michael Garcia Bochenek, interrogé par l'AFP.
"Les 55 avaient été aspergés dans leur sommeil", poursuit-il, indiquant avoir parlé à des groupes de "différentes nationalités" rencontrés dans "des lieux différents", mais dont la concordance des témoignages "montre qu'il y a un sérieux problème".
Le gaz poivre cause "une cécité temporaire, de fortes douleurs oculaires et des difficultés respiratoires, qui durent en général de 30 à 40 minutes", souligne le rapport.
Ce rapport fait écho aux inquiétudes d'associations liées au durcissement des forces de l'ordre à l'égard des migrants revenus à Calais après le démantèlement de la "Jungle" en octobre.
Interrogé par l'AFP, le préfet du Pas-de-Calais Fabien Sudry a "réfuté catégoriquement les allégations mensongères et calomnieuses" contenues dans le rapport de HRW, qui "ne reposent sur aucun fondement vérifié".
"Dossier à charge"
"C’est un dossier à charge", a pour sa part réagi David Michaux, secrétaire national du syndicat UNSA Police chargé des CRS, pour qui "les CRS n’ont plus de contacts avec les migrants".
"On les repousse de temps en temps lors des tentatives d’intrusion à l’aide de gaz lacrymo mais c’est de plus en plus rare", a-t-il affirmé à l'AFP.
"Chaque jour, la police nous poursuit. Ils utilisent leurs sprays. Ils nous donnent des coups de pied. C’est ça notre vie, tous les jours", raconte Waysira, un adolescent oromo, une ethnie éthiopienne, cité dans le rapport.
Le rapport, qui pointe également l'usage de gaz poivre contre des humanitaires, dénonce un harcèlement de ces derniers via des contrôles d'identités répétitifs.
"Des policiers confisquent ou détruisent la nourriture, l’eau et les couvertures, mais ils empêchent aussi régulièrement la délivrance d’une assistance humanitaire, et ce apparemment sans aucun motif légal", regrette HRW.
Le Défenseur des droits Jacques Toubon s'était inquiété mi-juin d'atteintes aux droits "d'une exceptionnelle et inédite gravité" à Calais, mentionnant une "traque" des migrants et exhortant les pouvoirs publics à "ne pas s'obstiner dans ce qui s'apparente à un déni d'existence des exilés".
C.Br. avec AFP