Avril 2013 : j’ai pris deux billets aller-retour Paris-Moroni pour moi et ma fille avec la compagnie du Qatar. Au retour, j’ai été invité,...
Avril 2013 : j’ai pris deux billets aller-retour Paris-Moroni pour moi et ma fille avec la compagnie du Qatar. Au retour, j’ai été invité, avec plusieurs autres personnes, à passer la nuit dans un hôtel quatre étoiles à Dar Es-Salaam par la compagnie – au lieu de la passer dans l’avion qui devait, en principe, me transporter à Doha puis à Paris. Le lendemain, j’ai rencontré des compatriotes dans le même aéroport qui m’ont affirmé être en attente dans la capitale tanzanienne depuis une semaine ! Eux aussi se rendaient à Paris.
Les expatriés comoriens, hormis ceux qui prennent Air Austral (dont les tarifs sont relativement élevés mais qui offre un excellent service !) souffrent quasi-systématiquement le martyre à chaque fois qu’ils viennent voir leurs familles aux Comores.
Et pourtant ce sont des Comoriens qui travaillent dur pour se payer des courts moments de repos au pays, qui construisent des maisons aux Comores et financent des mariages somptueux Ngazidja. Ces expatriés comoriens constituent, en un mot comme en mille, une très grande force économique du pays : ils transfèrent plusieurs milliards chaque année aux Comores.
Certains politiques comoriens semblent avoir compris ces enjeux. Houmed Msaidié par exemple, tout à son honneur, avait fait de la diaspora l’une de ses priorités. Une conviction ou une posture ? Les deux en même temps comme toujours chez les politiques. Ikililou Dhoinine a envoyé à la diaspora des signaux très forts en 2013 en nommant au Mirex et au commissariat chargé de la diaspora des personnes issues des Comoriens expatriés.
Trois avancées feraient que la diaspora comorienne commencerait à croire en l’Etat comorien : l’obtention du droit de vote, de représentants à l’assemblée nationale, et l’ouverture de consulats dans les grandes villes françaises où vit la plupart des Comoriens (Marseille et Lyon par exemple).
Le plus facile à mettre en place serait peut-être le droit de vote. Car depuis quelques années, les Comoriens titulaires de la nationalité française sont également (obligatoirement ?) titulaires de la carte d’identité comorienne. Mais une telle mesure exigerait une longue réflexion préalable et un long travail de recensement. L’urgence serait de mettre en place un grand consulat général à Marseille d’abord et à Lyon ensuite. Ainsi la France métropolitaine serait bien quadrillée : l’ambassade comorienne à Paris gérerait tout le nord de la France, le consulat de Lyon le Centre et Marseille le Sud.
Le plus difficile serait par contre la mise en place des consulats qui eux demanderaient d’importants moyens financiers. Pourquoi, par exemple, avant d’avoir de vrais consulats, ne pas nommer des consuls honoraires comoriens représentant l’Etat comorien dans ces villes françaises ? Ils auraient pour mission d’écouter leurs expatriés, d’enregistrer leurs doléances, de leur expliquer l’action gouvernementale et de recevoir les politiques comoriens qui viendraient dans ces villes. Ces consuls honoraires pourraient également servir d’agents économiques de l’Etat comorien qui pourraient coordonner les investissements des Comoriens aux Comores.
Une diaspora impliquée dans les affaires de l’Etat (et pas seulement considérée comme une vache à lait !) serait une diaspora qui rapporterait beaucoup plus d’argent aux finances de l’Etat comorien et donc au bien-être de tous. Je suis convaincu qu’elle saurait gré, pour l’éternité, à celle ou celui qui l’impliquerait de cette façon dans la vie politique nationale, car en réalité, elle ne voit le plus souvent, les hommes politiques en France qu’à la veille des élections.
Soyons justes et audacieux : reconnaissons donc les nôtres, qui nous aiment, qui nous aident, qui pensent toujours à nous, mais qui souffrent n’étant pas reconnus à leur juste valeur. Organisons la diaspora et reconnaissons-la : c’est une impérieuse nécessité politique et économique.
Nassurdine Ali Mhoumadi, docteur ès Lettres