Monsieur Azali, Dans quelques jours je vais devoir vous appeler Monsieur le président, une marque de respect pour vous, pour la foncti...
Monsieur Azali,
Dans quelques jours je vais devoir vous appeler Monsieur le président, une marque de respect pour vous, pour la fonction et pour le peuple comorien qui vous a élu.
Monsieur Azali, il est des personnes qui entrent dans l’histoire à l’aube de leur vie, il est d’autres qui y entrent au zénith de leur vie et il est d’autres qui n’y entrent jamais -même au crépuscule de leur vie; et ce même si l’histoire leur a donné de nombreuses occasions d’y entrer. Monsieur Azali, l’histoire vous a donné et vous donne encore l’occasion de marquer l’histoire de votre pays. Aux premières occasions, vous n’avez pas été à la hauteur et il semble que le destin vous bénit en vous donnant une nouvelle occasion pour vous rattraper. Ma culture musulmane me recommande de croire en vous et ma culture nord-américaine me conseille d’avancer (move forward) et de ne pas m’attarder sur votre passé. Je suis conscient que je suis très dur avec vous mais ce texte est un passage obligé pour moi -et pour bien d’autres compatriotes- avant de devoir vous appeler Monsieur le président.
Monsieur Azali, je ne suis pas fan de vous (rassurez-vous je ne suis pas fan de votre adversaire) mais j’aime suffisamment notre pays pour espérer que vous saisirez la nième chance que le destin vous offre pour marquer l’histoire et améliorer significativement la vie des comoriens. Pour marquer l’histoire, vous allez devoir unir votre peuple comme l’ont fait tous ceux qui ont marqué l’histoire de leurs pays. Ce faisant, vous allez pouvoir canaliser toutes les énergies pour réduire les souffrances et la pauvreté dans lesquelles vivent les comoriens. Pour y arriver, je vous conseille de suivre la première recommandation donnée à Mahomet : pas de précipitation; inscrivez votre action dans le temps et dans le symbolique.
Monsieur Azali, au lieu de succomber à cette tentation de démolir la fonction publique comorienne, vous feriez mieux de solliciter sa collaboration car vous ne construirez pas les Comores sans ces hommes et femmes qui sont au service de l’État. En contrepartie vous exigerez de cette fonction publique discipline de travail, obligation de résultats et respect de la population comorienne.
Monsieur Azali, vous ne construirez pas les Comores en ne valorisant pas la moitié de la population comorienne, les femmes. Nos sœurs et mères méritent d’être traitées dignement, de jouir d’une liberté totale et d’une indépendance économique et par-dessus tout, de participer pleinement à la gouvernance de notre pays. Monsieur Azali, je vous conseille vivement de composer un gouvernement paritaire. Vous gagnerez à choisir parmi la diaspora comorienne de France deux femmes pour les ministères de la justice et de la santé.
Monsieur Azali, la diaspora comorienne est une richesse à mobiliser. Cette diaspora vous a soutenu et vous gagnerez à les impliquer dans le développement de notre pays. De grâce, faites appel à ces talents sans les opposer aux talents qui sont déjà installés aux pays. Une bonne partie de cette diaspora est autonome financièrement et ne sollicite pas de postes mais simplement la possibilité de servir leurs pays.
Monsieur Azali, faites entrer au gouvernement les minorités comoriennes qui font la richesse de notre pays comme les minorités indienne et malgache.
Monsieur Azali, votre principal défi sera de mobiliser toutes les ressources économiques, humaines, diplomatiques et militaires pour améliorer la santé des comoriens, réduire significativement la pauvreté et apporter de la dignité à ces hommes et femmes.
De grâce, mobilisez notre diplomatie au service essentiellement du développement économique de notre pays. Monsieur Azali, prévoyez une visite symbolique de la Tanzanie dans les 24 heures suivant votre investiture. Ce pays ami est un allié incontournable pour le développement de notre pays. Pour ce qui est de la question de Mayotte, je vous invite à garder en tête que la culture, l’économie et le sports circulent plus vite que la politique.
J’espère que vous nommerez un ministre qui maitrise parfaitement l’arabe et l’anglais. Un ministre qui saura convaincre nos partenaires arabes et la communauté des affaires de venir investir dans notre pays.
Pour attirer des investisseurs sérieux, vous aurez besoin d’une justice fonctionnelle, légitime, crédible, disciplinée et équipée. Encore une fois, faites appel à une femme de la diaspora comorienne pour conduire cette justice.
Monsieur Azali, la capacité des comoriens à se faire soigner fait pitié. Et pourtant un centre hospitalier de référence équipé d’un centre de diagnostic permettrait de soigner une très grande partie des patients et limiter la sortie de capitaux causée par les comoriens qui vont se soigner à l’extérieur. Cet argent resterait aux Comores au service du développement et de la création d’une richesse créatrice d’emploi pour les jeunes diplômés de notre pays.
Monsieur Azali, vous aurez besoin de courage et d’audace pour arriver à réduire significativement la souffrance et la pauvreté des comoriens. Pour y arriver, vous aller devoir rapidement clarifier vos priorités. Naturellement, certaines priorités comme la suffisance alimentaire, l’accès à un système de santé, et la protection de la vie, de la dignité et des bien des comoriens demeurent incontournables. De grâce et parlant de dignité, je vous invite à libérer sous conditions les prisonniers coupables de crimes non violents qui saturent les prisons comoriens en attentant (je l'espère) la construction rapide d'un centre fédéral de détention. Pour les crimes violents, je vous invite à les transférer dans des conditions dignes comme dans une base militaire. Dans le même ordre, soyez courageux et supprimer définitivement la peine de mort du code pénale comorien.
Encore une fois, Monsieur Azali vous faites partie des rares personnes à qui l'histoire donne une nième chance pour laisser un héritage " legacy" et j'espère que vous y arriverez pour le bien de notre pays. Certes, votre passé n'est pas une garantie mais j’ose espérer que vous avez changé. Le choix de votre équipe, paritaire et diversifiée, donnera une indication de l’homme que vous êtes.
Monsieur Azali, je ne crois pas que vous avez changé mais l’histoire vous donne cinq années pour me montrer que j’ai tort. Pour le bien de notre pays, je vous lance le défi de me contredire.
Après avoir dit ce que je pense, je vais pouvoir vous dire ceci : félicitation Monsieur le président.
Madi Aboubacar, MSc, MBA
Titulaire d’un Master européen en sciences et d’une maîtrise nord-américaine en administration des affaires, Madi Aboubacar, MSc, MBA, est un ancien organisateur en chef au sein du Parti Libéral du Canada. Il est spécialiste en management et en santé et sécurité. Il est marié et père de deux filles A&A. twitter.com/madi269
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