(Une réglementation très lacunaire des déchets médicaux conduisant à leur mauvaise gestion) Selon les dictionnaires Larousse et Robert ...
(Une réglementation très lacunaire des déchets médicaux conduisant à leur mauvaise gestion)
Selon les dictionnaires Larousse et Robert 1, les déchets sont « des débris, restes sans valeur de quelque chose » ou, « la perte, la diminution qu’une chose subit dans l’emploi qui en est fait ».
Le Code de la santé comorien reprenant dans une certaine mesure la Convention de Bâle prévoit en son article 74 qu’ « Aux termes du présent code, les déchets sont des produits solides, liquides ou gazeux résultant de la consommation des ménages ou de processus de fabrication, jugés sans valeur ou inutilisables et abandonnés ou destinés à l’abandon. ».
Les types de « déchet » dont nous soulevons ici sont ceux « produits par les centres hospitaliers, ou les dispensaires, Centrale d’achat des médicaments de l’Union des Comores (Camuc) ….etc. ». Les déchets médicaux sont des produits dérivés des soins médicaux.
DES MONTAGNES DES DÉCHETS VUE D’OEIL AU CHN-ELMAAROUF |
Il faut, avant d’aller plus loin, signaler que les déchets médicaux sont des éléments dont la substance est très infectieuse et dont les modes d’éliminations sont capables d’affecter la santé humaine et son environnement. Selon la classification de l'ONU les déchets médicaux sont considérés comme les déchets les plus dangereux après les déchets radioactifs. Même si la plupart de ces déchets sont aussi inoffensifs que des déchets domestiques certains types de déchets médicaux représentent un gros risque en matière de santé.
Les pays développés ont de leur côté pris leurs précautions. Nous pouvons citer l’exemple de la France qui, à travers des textes ponctuels, repris dans le Code de la santé publique, a très bien cerné cette problématique d’un point de vue juridique. Par contre, dans les pays du sud, nous voyons presque partout un vide réglementaire. Les Comores ont certes édicté quelques textes, mais qui ont une portée trop générale ; aussi sont-ils peu adaptés, avec à l’arrivée des manquements considérables. Parfois même, ils sont inapplicables faute de publication ou en l’absence de décret d’application (article 79 CDS). Face à ces vides juridiques notoires, nous ne pouvons pas manquer de poser un certain nombre de questions. En l’absence d’un cadre juridique adéquat la gestion des déchets médicaux ne risque pas d’être laxiste ? Que faut-il proposer comme alternatives ?
Cette problématique comporte des enjeux de taille. Les pouvoirs publics sont débiteurs du droit des citoyens « à la santé et à un environnement sain » ; à ce titre, ils n’ont pas le droit de se décharger sur les producteurs de déchets, comme semble être le cas. Ils ont plutôt l’obligation de mettre sur pied un cadre juridique adapté, mais aussi de fournir des moyens financiers, logistiques et matériels suffisants en vue d’une bonne gestion des déchets médicaux.
Quant aux acteurs intervenant dans le secteur de la santé, ils doivent respecter des normes pour éviter aux populations tout risque de quelque nature que ce soit, dû à une non-observation des principes éthiques et déontologiques. Ils sont liés par le serment d’Hippocrate qui leur demande de « ne point nuire », de « supprimer tout effet nocif » ou de le prévenir.
Une mauvaise gestion des déchets médicaux ne serait-elle pas ainsi en porte-à-faux avec ce serment alors que les populations sont exposées en permanence aux pollutions, nuisances et risques sanitaires de grande envergure.
En effet, nous assistons en pratique à des méthodes de gestion irresponsables. La plupart des centres hospitaliers ignorent les étapes les plus élémentaires de la gestion, que ce soit dans les phases de pré-collecte, de collecte, de tri, de stockage ou de destruction. Ainsi, les déchets médicaux de toutes sortes sont mélangés et éliminés dangereusement, soit par leur dépôt dans les décharges, soit par leur enfouissement, ou encore par des systèmes de brûlage. On sait que toutes ces pratiques ont des conséquences graves sur l’environnement et la santé de l’homme, avec la menace de maladies comme les hépatites, le cancer, mais également les pollutions de l’air, du sol, de l’eau et les nuisances.
Pour renverser cette tendance il existe une alternative unique : combler les vides juridiques par une réglementation plus spécifique et mieux adaptée. Les défaillances notables dans la législation se répercutent sur la gestion des déchets biomédicaux.
Aux Comores, il n’y a pas un « vide juridique total » en matière de gestion des déchets médicaux, mais plutôt, des « vides juridiques ». Les autorités du pays ont manifesté très tôt une certaine volonté de lutter contre ce fléau en s’engageant à travers l’ancienne Constitution, à « assurer à tout citoyen un droit à la santé et à un environnement sain ». Cette préoccupation s’est traduite par la participation à l’élaboration d’un Code de la santé publique et de l’action sociale pour le bien être de la population (Loi N° 95- 013 du 24 juin 1995).
En examinant cette législation on se rend facilement compte de ses insuffisances et manques :
Dans un premier temps, aucune des dispositions mentionnées n’a donné de définition des déchets médicaux. L’article 74 du Code de la santé publique fait vaguement allusion aux « déchets ménagers» ou « contagieux » et aux « déchets toxiques ». Cette absence de définition est une source potentielle de dérapage, car elle ne permet pas de tracer les contours de cette notion et d’identifier de façon exhaustive les différentes structures de production.
Dans un second temps, on remarque que la réglementation a omis une phase fondamentale qui se trouve être la précision des étapes et des méthodes de gestion des déchets médicaux (article 75 CDS):
- Comment doit s’effectuer le tri ?
- Quels matériaux doit-on utiliser ?
- Par quels moyens peuvent se faire la collecte, le conditionnement, le transport et l’élimination des déchets ?
- Quelle est la durée nécessaire pour chaque étape de ce processus ?
À toutes ces interrogations, le législateur comorien n’a pas encore apporté de réponses.
Enfin, on constate une quasi-inexistence de mesures d’indemnisations des dommages et violations des règles de gestion. En plus des vides juridiques, existent d’autres lacunes
d’ordre réglementaire. La législation en ce domaine est disparate, les textes sont dispersés et sans aucune articulation entre eux. Il s’ajoute aussi une ineffectivité de la réglementation dans la mesure où les textes disponibles sont méconnus et inappliqués, soit par défaut de publication ou de décret d’application (article 79 CDS).
Cette réglementation très lacunaire des déchets médicaux a entraîné une gestion insatisfaisante des déchets biomédicaux.
La mauvaise gestion des déchets médicaux
La gestion des déchets médicaux est désespérante, chaotique, représentant un danger permanent pour l’homme et son environnement.
Il y a véritablement des difficultés dans la gestion des déchets médicaux. Pour la pré-collecte et la collecte, « la plupart des structures sanitaires utilisent des poubelles en plastique, souvent sans couverture ou encore des seaux. Ces supports ont tendance à recevoir sans distinction toutes sortes de déchets à l’exception des lames, et autres matériaux piquants et tranchants ». Cependant, il arrive que ces déchets piquants ou tranchants se retrouvent dans les bacs à ordure qui doivent être recueillis par les camions et déversés à la décharge publique de Moroni.
Le tri se confond très souvent avec le conditionnement et le stockage. Pratiquement seules les seringues aiguilles et autres objets piquants subissent un traitement particulier. Pour les aiguilles, elles sont conditionnées pour la plupart dans des bouteilles en plastique remplies. Toutefois, certains centres hospitaliers commencent à utiliser des boites de sécurité. De même, certains dispensaires ont tendance à acquérir des sachets en plastiques et des poubelles avec des couvercles de couleurs différentes. Mais, ce matériel n’empêche pas la mauvaise gestion du fait du non-respect des consignes.
Pour ce qui est de l’élimination, bon nombre de cabinet médical contractent directement avec des particuliers. Ce personnel, non averti, est pourtant chargé d’acheminer les déchets médicaux des points de collectes aux différentes zones de destination.
D’autres services sanitaires favorisent le système du brûlage à l’air libre, soit dans l’enceinte dudit service ou en dehors, après un long séjour sur la voie publique du dit service. Il y a aussi ceux qui s’adonnent à l’enfouissement.
Enfin, on pratique l’incinération avec des incinérateurs de divers acabits, notamment, ceux qui sont vieux et défectueux, laissant échapper gaz et fumée nocifs pour l’homme et l’environnement.
• la définition des déchets médicaux, à l’image de « la loi française du 15 juillet 1975 portant définition des déchets médicaux »
• la réglementation harmonisée des techniques de gestion allant de la collecte à l’élimination.
Les textes doivent exiger que le tri soit uniquement de la compétence du personnel soignant du fait de sa connaissance du malade qu’il a soigné. Et pour cette phase capitale de la gestion, les déchets seront séparés en quatre catégories et collectés dans autant de récipients en jouant sur la couleur.
Nous proposons par exemple qu’il ait des poubelles de couleur verte pour les déchets assimilés aux simples ordures ménagères, des récipients de couleur bleue pour les déchets alimentaires. En ce qui est des objets tranchants et coupants, nous encourageons le système des boîtes de sécurité. Les autres déchets infectieux après emballage dans des sacs à plastique
seront conservés dans des conteneurs rouges. Enfin les déchets liquides devront, après prétraitement, être déversés dans des fosses étanches construites selon des normes bien définies.
Si cette réglementation était appliquée, ce serait d’un intérêt capital, car toute personne (professionnel de la santé, visiteur, accompagnant, malade) qui quitterait l’hôpital pour se rendre dans un dispensaire, ou dans le secteur privé du milieu médical, retrouverait les mêmes couleurs, donc les mêmes habitudes. Le stockage serait plus commode s’il est effectué dans un local muni d’un dispositif rendant impossible la pénétration des animaux.
Pour la collecte, des camions spécialisées servant uniquement à cela, achemineront les résidus de préférence la nuit, à des heures tardives, afin d’éviter toute collision fatale dans la circulation.
En ce qui concerne les moyens de destruction, toute réglementation doit interdire formellement la mise en décharge, le brûlage, le déversement et l’enfouissement non réglementaires, et opter plutôt pour l’enfouissement réglementaire et l’incinération, avec bien évidemment des incinérateurs de qualité. Il serait même louable d’envisager des pôles d’incinérateurs, ce qui amènerait à doter chaque centre de santé de référence d’un incinérateur de grande capacité, placé dans un endroit hors de portée de nuire et qui recevrait ceux de tous les services le composant. Et cela est également possible pour les hôpitaux villageois.
Dans un souci d’effectivité, le législateur édictera des mesures de sanction civiles et pénales, à côté de celles d’ordre moral, éthique et déontologique. Toutefois, des cas d’indemnisation par la solidarité nationale seraient les bienvenus. En effet, il arrive des situations exceptionnelles qui ne permettent pas d’identifier le ou les responsables parce qu’il y a absence de faute, présence de cause étrangère ou d’autres facteurs. Prenons l’hypothèse ou un récupérateur ou un enfant se fait piquer par des aiguilles de seringues dans une décharge publique comme celle de l’ancien aéroport de Moroni, et contracte le sida ou une hépatite ; il sera dans l’impossibilité de savoir d’où proviennent ces déchets. Doit-il donc s’en prendre seulement à lui-même ?
Dans un souci d’équité, il est temps de créer un mécanisme d’indemnisation à travers une « caisse de sécurité et de garantie », à l’image de la loi française du 4 mars 2002 instituant « l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales ».
Enfin, il serait salutaire que toutes ces règles soient renforcées et intégrées dans le Code de la santé publique.
ALI DJAMBAE NASSER ©habarizacomores.com
La nécessité de combler les vides juridiques :
Nous ne devons pas nous voiler la face : de simples dispositions d’articles insérées dans des textes épars ne suffisent pas pour réglementer un aspect aussi sensible que celui des déchets médicaux. C’est la raison pour laquelle, nous demandons au nom des représentants du ministère de la santé et avec tous ceux qui sont concernés, d’ouvrir un débat dans les instances habilitées, en vue de pousser le législateur à combler les vides juridiques constatés, par des lois et des règlements spécifiques à ce type de résidus. Cela passera par un certain nombre d’actes concrets :• la définition des déchets médicaux, à l’image de « la loi française du 15 juillet 1975 portant définition des déchets médicaux »
• la réglementation harmonisée des techniques de gestion allant de la collecte à l’élimination.
Les textes doivent exiger que le tri soit uniquement de la compétence du personnel soignant du fait de sa connaissance du malade qu’il a soigné. Et pour cette phase capitale de la gestion, les déchets seront séparés en quatre catégories et collectés dans autant de récipients en jouant sur la couleur.
Nous proposons par exemple qu’il ait des poubelles de couleur verte pour les déchets assimilés aux simples ordures ménagères, des récipients de couleur bleue pour les déchets alimentaires. En ce qui est des objets tranchants et coupants, nous encourageons le système des boîtes de sécurité. Les autres déchets infectieux après emballage dans des sacs à plastique
seront conservés dans des conteneurs rouges. Enfin les déchets liquides devront, après prétraitement, être déversés dans des fosses étanches construites selon des normes bien définies.
Si cette réglementation était appliquée, ce serait d’un intérêt capital, car toute personne (professionnel de la santé, visiteur, accompagnant, malade) qui quitterait l’hôpital pour se rendre dans un dispensaire, ou dans le secteur privé du milieu médical, retrouverait les mêmes couleurs, donc les mêmes habitudes. Le stockage serait plus commode s’il est effectué dans un local muni d’un dispositif rendant impossible la pénétration des animaux.
Pour la collecte, des camions spécialisées servant uniquement à cela, achemineront les résidus de préférence la nuit, à des heures tardives, afin d’éviter toute collision fatale dans la circulation.
En ce qui concerne les moyens de destruction, toute réglementation doit interdire formellement la mise en décharge, le brûlage, le déversement et l’enfouissement non réglementaires, et opter plutôt pour l’enfouissement réglementaire et l’incinération, avec bien évidemment des incinérateurs de qualité. Il serait même louable d’envisager des pôles d’incinérateurs, ce qui amènerait à doter chaque centre de santé de référence d’un incinérateur de grande capacité, placé dans un endroit hors de portée de nuire et qui recevrait ceux de tous les services le composant. Et cela est également possible pour les hôpitaux villageois.
Dans un souci d’effectivité, le législateur édictera des mesures de sanction civiles et pénales, à côté de celles d’ordre moral, éthique et déontologique. Toutefois, des cas d’indemnisation par la solidarité nationale seraient les bienvenus. En effet, il arrive des situations exceptionnelles qui ne permettent pas d’identifier le ou les responsables parce qu’il y a absence de faute, présence de cause étrangère ou d’autres facteurs. Prenons l’hypothèse ou un récupérateur ou un enfant se fait piquer par des aiguilles de seringues dans une décharge publique comme celle de l’ancien aéroport de Moroni, et contracte le sida ou une hépatite ; il sera dans l’impossibilité de savoir d’où proviennent ces déchets. Doit-il donc s’en prendre seulement à lui-même ?
Dans un souci d’équité, il est temps de créer un mécanisme d’indemnisation à travers une « caisse de sécurité et de garantie », à l’image de la loi française du 4 mars 2002 instituant « l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales ».
Enfin, il serait salutaire que toutes ces règles soient renforcées et intégrées dans le Code de la santé publique.
ALI DJAMBAE NASSER ©habarizacomores.com