Oui : Sambi est un danger pour les Comores. Et je ne veux pas parler ici de sa démagogie (faire croire à la population comorienne que...
Oui : Sambi est un danger pour les Comores. Et je ne veux pas parler ici de sa démagogie (faire croire à la population comorienne que gouverner un pays pauvre et peu instruit est facile ou que l'on peut résoudre les problèmes sans les étudier profondément) ; je ne veux pas parler de ses promesses non tenues (éliminer les cases en végétaux, généraliser l'eau et l'électricité, créer des emplois pour les jeunes instaurer une justice impartiale, moraliser la vie politique...) ; je ne parlerai non plus de la vente de notre citoyenneté ni du fait de rapprocher les Comores d'un pays banni par la communauté internationale (l'Iran) ni de l'introduction du chiisme aux Comores ni de l'assassinat de Combo Ayouba qui a eu lieu sous on mandat et qui reste encore un grand mystère...
Je veux parler du rapport que Sambi entretient avec la loi de la République. Les choses sont simples : Sambi n'aime la loi que quand elle lui sert !
Regardons les faits. Azali, qui aurait pu mettre le pays à feu et à sang pour se maintenir au pouvoir, respecte la constitution et se retire en 2006. Sambi arrive à Beit Salam, modifie la constitution et se fait bénéficier ce changement (qui allait évidemment dans ses intérêts !). Il ne cède le tour de la présidence du pays à l'île de Mohéli que contraint et forcé (serait-il parti si Kadafi était encore resté au pouvoir ?). Je vous épargne bien sûr le conflit qu'il a eu avec la Cour Constitutionnelle (sur le cas de Mouzoir Abdallah), celui qu'il a eu avec l'assemblée nationale (lors du vote de la loi sur la citoyenneté économique). Je vous évite aussi la mascarade électorale qui a eu lieu à Anjouan...
Et puis avant de quitter Beit Salam, il s'est servi de la loi qu'il n'a pas pu violer pour placer tous ses hommes au pouvoir dans l'espoir de se resservir de la même loi pour le regagner. Mais les choses ne se déroulent plus comme il l'avait imaginé ! La loi ne lui sert plus et les hommes qu'il a placés au pouvoir ne lui obéissent plus !
Et nous arrivons au tour de la présidence de Ngazidja. Sambi, par ses talents de sophiste (qui trompent seulement les esprits les plus fragiles), veut se présenter aux élections présidentielles. Je simplifie : Sambi, devenu président de la République parce qu'il était Anjouanais, voulait empêcher Mohéli de gouverner (car il voulait rester au pouvoir !) ; et il ne veut pas laisser Ngazidja y accéder (car il veut revenir au pouvoir !).
Et la loi qui lui a permis d'accéder au pouvoir ? Il s'en moque évidemment : elle ne lui sert plus maintenant et il n'a pas envie d'attendre 2021 – c'est beaucoup trop loin pour lui ; et le plus important, c'est lui bien sûr !
La candidature de Sambi aux élections présidentielles de 2016 fait planer sur le pays une gigantesque menace d'instabilité. Quelle sera la réaction de la Cour Constitutionnelle si Sambi lui soumet sa candidature ? Si elle la valide, quelle sera celle de l'armée nationale (de plus en plus composée de personnes qualifiées) ? Quelle sera la réaction de la population de Ngazidja qui se verra refusée ainsi son tour de gérer le pays ? Sambi se souvient-il que les séparatistes ne sont pas seulement logés à Anjouan ? Et qu'ils sont très nombreux et peut-être plus nombreux à Ngazidja qu'à Anjouan ?
Et que ces derniers, qui savent qu'Anjouan n'est revenu dans le giron de l''Union que de façon superficielle, et que Ngazidja paie souvent pour les autres îles, espèrent et prient même pour que renaisse une nouvelle crise séparatiste qui viendrait cette fois-ci non de Mutsamudu mais de Moroni ? Sambi perçoit-il vraiment cette menace ? Se sent-il capable de la gérer ? Ou croit-il que l'invocation des versets coraniques suffira à calmer des esprits naïfs, affamés et désespérés ?
Il ne suffit pas maintenant de constater la menace ; il faut surtout la combattre, et de façon démocratique : en créant une large coalition capable de mettre Sambi en minorité dans le pays. Que certains se rappellent que le retour de Sambi à Beit Salam signe leur mort (au moins politique sinon biologique !) avant celle du pays.
Nassurdine Ali Mhoumadi, docteur ès Lettres, enseignant et essayiste, est chroniqueur à l'hebdomadaire Albilad publié à Moroni.
Photo. Credit : HabarizaComores.com | أخبار من جزر القمر.