Cette couverture de The Economist, date de novembre 2012. La semaine dernière dans le New York Times, Paul Krugman, néanmoins Prix Nob...
Cette couverture de The Economist, date de novembre 2012.
La semaine dernière dans le New York Times, Paul Krugman, néanmoins Prix Nobel d’Économie, et la coqueluche de nombreux penseurs français, titre son éditorial "La Chute de la France". L'annonciateur en 2012 de la chute de l'Euro et le pourfendeur des politiques d’austérité continue à avoir une crédibilité en matière européenne qui surprend ceux qui ne se fient pas aux slogans. Tout en disant que la France n'est pas pire que ses partenaires européens (à l'exception de l'Allemagne et de quelques autres) il argumente que François Hollande a abandonné la France, et ce faisant, l'Europe. Mais laissons le à ses opinions, et examinons de plus prés une réalité inquiétante.
La débâcle politique.
L’éclatement des deux principales familles politiques qui ont régné sur la France depuis la seconde guerre mondiale n'est pas une coïncidence. Il intervient à un moment où les problèmes économiques et sociaux de la France, fruit d'une absence de réformes de plusieurs décennies, atteignent un niveau insoutenable.
Il ne s'agit pas ici de blâmer l'une plus que l'autre de ces formations, divisées par des guerres de personnes maquillées derrière des débats idéologiques. En attendant une (ré) solution de ces divisions, le blocage du processus de décision laisse les amis et alliés de la France désespérés de voir une amélioration de la situation du pays.
Le faux débat de l’austérité.
Un de ces débats entre les acteurs politiques utilise comme arme leur souhait ou leur rejet de l’austérité.
La source de cette opposition est profondément ancrée dans un refus de regarder avec objectivité ce qu'est la situation de la France. Et tout d'abord son endettement. Malgré toutes les déclarations contraires, au premier trimestre de 2014, la dette publique française a augmenté de 45 milliards d'euros, une hausse de plus de 2%. Ce n'est rien par rapport aux 600 milliards en cinq ans de l’ère Sarkozy, mais c'est plus qu’inquiétant. Avec 1.985 milliards d'euros fin mars 2014, cette dette a certainement dépassé aujourd'hui les 2.000 milliards d'euros. Voici ce que cela donne en termes d'endettement par rapport au produit Intérieur Brut.
Ce tableau de l'INSEE nous montre qu'en six ans, ce ratio est passé de 65 à 95% (93.6% fin mars 2014). A ce rythme-la, le ratio dépassera 100% a la fin de 2014. La situation de l'endettement a ce redoutable privilège d’être irréductible et radicale. Nous le savons tous et toutes au niveau de nos foyers, de nos entreprises ou de nos associations, la dette est redoutable. Qui plus est, elle a cette horrible habitude d’être assortie de taux d’intérêt.
La chance inouïe de la situation présente est que les taux d’intérêt que doit payer le Trésor pour le renouvèlement et l'augmentation de son endettement ont connu, au niveau européen, une baisse extraordinaire. En un an, les obligations à 10 ans de la République ont vu leur rendement baisser à 1,25% alors qu'il y a un an, le taux était de 2,58 %.
Dans un avenir rapproché, la hausse de l'endettement, jointe à une inévitable hausse des taux mondiaux, va se rappeler au bon souvenir des investisseurs. Aucune justification politique ne peut se substituer à l'obligation de gérer son endettement de manière responsable.
Le débat sur l’austérité est un faux débat. Il s'agit d'une indispensable discipline qui permette de piloter le navire France sans qu'il prenne l'eau. Ce n'est pas un choix politique: c'est un danger imminent dont la gestion s'impose à tous les dirigeants politiques du pays.
La chute de la France est inéluctable si toutes les forces politiques ne se mettent pas autour de la table pour éviter le pire. C'est un problème de salut public face auquel les calculs politiciens n'ont pas de légitimité.
Par Georges Ugeux | LeMonde.fr