En 2012, un sondage en fait le chef d'Etat le plus haï d'Afrique. (Cliquez ici pour lire l'article). Majorité silencieuse ...
En 2012, un sondage en fait le chef d'Etat le plus haï d'Afrique. (Cliquez ici pour lire l'article).
Majorité silencieuse et insidieux complot du silence sur l'île de Mohéli.
Les Mohéliens souhaitent un départ du Président mais n'osent pas le dire en public .
Le 18 septembre 2012, un grand diplomate qui a longtemps dirigé la Direction Afrique du ministère des Affaires étrangères de son pays, parlant de son chef d'État m'a dit: «Néanmoins, il a été desservi par sa Cour car, qui dit Cour dit autoritarisme, et qui dit autoritarisme dit complot du silence». Or, le complot du silence est le pire des complots car il est le meilleur moyen par lequel la majorité, toujours silencieuse, ne s'exprime pas, pour mieux s'exprimer. À Mohéli, aujourd'hui, personne ne s'exprime publiquement contre le Président de la République, mais en privé, les Mohéliens sont furieux et ont honte. Ils se disent déshonorés et floués, méprisés et piétinés. Toutes les nouvelles qui viennent de Beït-Salam les alarment car la présidence actuelle, loin de devenir un motif de fierté insulaire pour eux, est devenue tout simplement un motif de honte et de colère froide.
Quand le paysan, le cadre, le pêcheur et la ménagère de Mohéli apprennent qu'il y a eu des bagarres à Beït-Salam, avec des tentatives de strangulation, devant des témoins gênés, ils se disent tous que sous les Présidents des autres îles, on n'a jamais entendu parler de telles hontes et que c'est Mohéli dans son ensemble qui subit l'humiliation à travers le comportement malheureux de deux individus qui ne savent pas où ils sont. Quand ils apprennent que le Président a choisi de s'entourer de gens qui l'enfoncent chaque jour dans la bêtise alors que la classe politique du pays était prête à l'aider, ils se disent que Mohéli baigne dans la malédiction. Quand ils voient les proches du Président insulter les gens, au point même de demander le versement du piment dans les organes génitaux d'une Anjouanaise qui a dit des mots qui ne concernaient pas le Président et qu'on a fait glisser vers lui, ils se disent que la coupe est pleine. Quand ils voient des gens qui n'ont aucun mandat public menacer et insulter les gens, en se basant sur leur proximité familiale avec le Président, ils lèvent les mains vers Dieu. Quand ils voient ce qui arrive à cette République transformée en une affaire de famille, ils disent que c'est le lamentable début d'une triste fin.
On ne se lassera pas de le dire: l'élection présidentielle de 2010 a eu pour fait majeur des candidatures très pointues: quatre Docteurs (du jamais vu aux Comores) et d'autres diplômés de l'Université, un Vice-président en exercice, un ancien Vice-président, deux anciens Premiers ministres, d'anciens ministres, un ancien Président de l'Île autonome de Mohéli, un ancien Président de l'Assemblée nationale, des Députés, etc. Les Mohéliens, qui se disent les parents pauvres de la République depuis des millénaires, paradaient en disant qu'ils avaient, enfin, la possibilité de prouver leur humanité, talent, compétence et patriotisme. Mais, pour l'instant, ils n'ont pas vu ce que leur Docteur a fait par rapport à des Présidents qui sont supposés avoir un capital culturel d'une moindre importance. Tintin, donc. Quand le Président nomme un Docteur, il l'exile là où il n'a aucune espèce de compétence. Quand il réalise un misérable projet, il fait tout pour qu'il ne soit pas réalisé là où il avait plus de chance d'être plus utile. Le bien se fait à travers le mal, et le mal domine le bien. Que devient la République dans tout ça? Une honte.
À Mohéli, sans que cela ne soit une affaire de jalousie, tout le monde est convaincu que le Président se moque de tout sauf de s'enrichir à une vitesse défiant celle de la lumière. Voir ces gens-là se constituer un immense magot sur le dos de Comores Télécom, en se servant de leur homme de paille, Abiamri Mahmoud, que tous les Comoriens honnêtes maudissent, a de quoi mettre toute l'île de Mohéli et les autres îles en rogne. On ne couvre pas un voleur de cette façon, sauf si on est son commanditaire. Ça fait du désordre. Pendant des années, les Mohéliens ont milité et ont réclamé des droits liés à un équilibre de droits entre les îles, et quand ils ont envoyé un des leurs à la présidence (alors qu'avant la Constitution du 23 décembre 2001, personne n'avait pensé qu'un Mohélien pouvait être Président), ils croyaient que c'était la fin de toutes les humiliations. Rapidement, ils ont déchanté. Pour eux, l'humiliation est trop grande, car elle vient de l'un des leurs. Mais, le Président et ses gens ont oublié l'essentiel: d'autres avant eux ont été là où ils sont en ce moment, et on sait ce qu'ils sont devenus. Et cinq ans, ça passe très vite. Hier, on était en train de se demander quand Ahmed Sambi allait enfin partir de Beït-Salam, et aujourd'hui, le chef de l'État est à mi-mandat. Aux Comores, on en a vu d'autres. À Mohéli, en particulier, on en a vu d'autres.
Voilà un Président qui a claironné partout qu'il allait lutter contre la corruption et qui est devenu le mécène des corrompus et des corrupteurs. Bientôt, il va construire une Fondation nationale de la Corruption et de Protection des Corrompus et Corrupteurs de la République. La Justice sous son régime politique est devenue une immense plaisanterie. Comment peut-on respecter un Président dont la Justice est tellement corrompue que le juge chargé de l'affaire de la CRC est un homme d'Azali Assoumani qui, vient de rendre un jugement favorable à ce dernier, au détriment de Houmed Msaïdié, pour qui milite le Droit pourtant? C'est ça la Justice du chef d'État parti en guerre contre la corruption? Comment peut-on lutter contre la corruption si, en guise de Justice, on a un passoir et on s'associe aux corrompus?
En tout état de cause, quand viendra l'heure des comptes et des règlements de comptes, il faudra qu'on sache que des Mohéliens ne se reconnaissent pas dans ce régime politique qui ne brille que par sa propension à la corruption et aux mélanges de genres conduisant à confondre les affaires de l'État avec les histoires d'une famille. Les Mohéliens, qui ont souffert pendant des décennies de marginalisation et de mépris, n'ont pas milité pour qu'un clan se substitue à un pays. Et, ce qui est extraordinaire dans l'affaire, c'est que le porte-parole du chef de l'État en France a trouvé une parade, quand on critique le régime politique actuel. En effet, systématiquement, quand un article est publié sur Internet, sa question est: «Est-ce que celui-là n'a pas de siens pour lui dire d'arrêter de critiquer le Président?». Seulement, le porte-parole ment car il connaît les dizaines d'oncles paternels et maternels et de tantes paternelles et maternelles des auteurs des articles, mais omet de s'interroger sur «les siens et siennes» à lui. La proximité avec le Président ne permet pas qu'on insulte des citoyens qui s'interrogent sur le fonctionnement du régime politique de leur pays. Tous les Comoriens ont le droit de dire ce qu'ils pensent sur la manière dont leur pays est gouverné.
Il arrivera un jour où ceux qui se taisent aujourd'hui à Mohéli et sur les autres îles de l'Union des Comores parleront. C'est ce jour-là qu'on saura à quel point le régime politique actuel est maudit par les Comoriens. Et la malédiction d'un peuple envers ceux qui lui privent de ses droits légitimes ne passe jamais à la trappe. Les Mohéliens et les autres Comoriens se taisent aujourd'hui, mais demain, ils finiront par s'exprimer. Pour l'instant, le silence est devenu un moyen indirect d'expression. Mais, un jour, les gens pourront s'exprimer sans avoir peur de dire ce qu'ils ont sur le cur. Ce jour viendra. Et, si on a des doutes là-dessus, il suffirait d'organiser un référendum pour ou contre le maintien du chef de l'État. Si on pouvait le faire, on serait surpris de constater à quel point les Mohéliens et les autres Comoriens souhaiteraient que le chef de l'État s'en aille tout de suite. De toute façon, un sondage réalisé en Suisse en 2012 et selon lequel il est le chef d'État le plus détesté d'Afrique est le meilleur des indicateurs.
Par ARM
© www.lemohelien.com - Lundi 23 septembre 2013