La fin des célébrations risque d’annoncer des mauvaises surprises : faillite, saisie de biens et endettement. Et pourtant, la microfinance, incarnée n
Le danger silencieux de la microfinance en période de festivités : un risque pour les familles comoriennes
Alors que la période des vacances et des grands mariages bat son plein, le parti RDCE – section Auvergne Rhône-Alpes en France, engagé dans une réflexion sur l'avenir du pays– alerte l’opinion publique sur un danger souvent méconnu : le surendettement et la perte de biens précieux au sein des familles comoriennes.
En cette saison de célébrations, la tentation de recourir aux crédits, notamment via le réseau Meck, risque de se transformer en un piège financier pour les plus vulnérables.
En effet, la hausse spectaculaire des prêts sur gage ou autres crédits à court terme durant cette période de fêtes peut rapidement conduire à une spirale infernale. La fin des célébrations, souvent marquée par la fin des rentrées d’argent temporaires, risque d’annoncer des mauvaises surprises : faillite, saisie de biens, et endettement insurmontable.
Et pourtant, la microfinance, incarnée notamment par l’institution financière Meck, s’est rapidement affirmée comme un levier essentiel pour favoriser l’accès au crédit des populations vulnérables et des petites et moyennes entreprises dans un contexte où le système financier traditionnel demeure fragile et peu développé. Elle joue un rôle crucial en finançant des activités agricoles, commerciales et artisanales, contribuant ainsi à l’amélioration des conditions de vie et au développement local.
Cependant, malgré ses bénéfices et avantages indéniables, le secteur de la microfinance aux Comores est confronté depuis quelque temps à des défis majeurs qui menacent sa pérennité, sa capacité d’action et son rôle de soutien au développement du pays, en particulier en faveur des populations les plus vulnérables.
Parmi ces problématiques figurent le surendettement des emprunteurs, l’accumulation de défauts de paiement, la fixation d’intérêts exorbitants, la brièveté des délais de remboursement ainsi que l’exigence de garanties excessives.
Par ailleurs, plusieurs scandales, tels que ceux liés à l’affaire Nazra ou à l’achat controversé de l’hôtel Les Arcade pour 1,126 milliard de francs comoriens sans l’aval du conseil d’administration, illustrent la faiblesse du cadre réglementaire et le manque d’intervention de l’État pour encadrer, réguler et protéger, en particulier, les acteurs les plus vulnérables du secteur.
Prenons l’exemple d’un pêcheur de n’importe quelle ville comorienne qui décide d’emprunter une somme importante auprès d’une institution financière locale pour acheter un bateau de pêche moderne et un moteur hors-bord. Son objectif est d’accroître sa capacité de pêche, d’augmenter ses revenus et d’améliorer la vie de sa famille. La banque lui propose un crédit à rembourser sur une période de 24 mois, avec des échéances mensuelles fixes et élevées, correspondant à environ 50 % de ses revenus mensuels estimés.
Les défis liés à la rigidité des échéances sont accentués par la dépendance du secteur de la pêche aux conditions météorologiques, aux saisons et aux fluctuations du marché. Ainsi, certains mois, le pêcheur peut réaliser de bonnes pêches et rembourser facilement, mais d’autres, ses revenus sont faibles voire inexistants.
La rigidité des échéances ne lui laisse aucune marge d’ajustement lorsque la saison est mauvaise ou en cas de coup dur.
En plus du remboursement du crédit, cet homme doit faire face à des charges familiales importantes : nourriture, scolarisation des enfants, soins de santé, et autres dépenses courantes que l’Etat n’apporte aucun soutien. En période de faibles revenus, ces charges deviennent difficiles à couvrir, augmentant ainsi le stress financier et la vulnérabilité.
Face à cette rigidité, le pêcheur se trouve souvent obligé de réduire ses dépenses essentielles ou de recourir à d’autres emprunts pour faire face aux échéances. Si la situation perdure, cela peut conduire à un cercle vicieux de surendettement, la perte du bateau et du moteur représentant alors une menace réelle en cas de défaillance.
La logique aimerait que ce soit le montant de l’emprunt investi qui produit des revenus servant à son remboursement. Or le délai de remboursement court peut sous-entendre que le capital n’a pas pris suffisamment de temps pour produire des revenus. De ce fait, le débiteur pourrait être en difficultés de trésorerie et rencontre les problèmes de liquidités à l’échéance.
Le parti RDCE interpelle sur les délais courts de remboursement du microcrédit. Il souligne que les modalités de remboursement proposées par Meck et d’autres institutions sont souvent rigides et peu adaptées aux revenus irréguliers des emprunteurs vulnérables, tels que les petits agriculteurs, pêcheurs ou commerçants informels. Ces conditions, conjuguées à des taux d’intérêt pouvant atteindre 20 à 30 %, rendent le remboursement difficile, limite leur capacité à investir et à se développer, entraînant des spirales de dettes, des impayés et la perte de garanties en gage, telles que l’or, les terres ou les maisons.
Le parti RDCE constate qu’en plus de ne proposer aucune solution aux problèmes existants, le gouvernement comorien aggrave la situation. En effet, aujourd’hui, le principal emprunteur auprès du réseau Meck n’est ni les petites entreprises, ni les promoteurs de projets, ni même les parents souhaitant faire soigner leurs enfants ou un parent malade. Il s’agit désormais du gouvernement lui-même, qui s’endette principalement pour couvrir son déficit budgétaire, et non pour financer des projets d’investissement ou des commandes publiques profitables aux plus démunis.
Par exemple, le dernier emprunt contracté par le gouvernement s’élevait à 2 milliards de francs comoriens, destinés à financer les festivités du cinquantième anniversaire d’indépendance, alors que la dette publique intérieure à augmenté de 9% s’établissant à 32 milliards en 2023, contre 29,3 milliards en 2022 et atteindra 12% en 2025 selon les dernières prévisions.
Si au moins l’État s’engageait d’abord à respecter les échéances de ses emprunts antérieurs avant de solliciter de nouveaux crédits, cela constituerait déjà une avancée vers une gestion plus responsable. Toutefois, poursuivre la demande de financements supplémentaires sans rembourser ses dettes existantes est non seulement incohérent, mais aussi irresponsable pour un pays qui souhaite garantir la pérennité de son économie et la stabilité de son système financier.
Le RDCE recommande un renforcement de la réglementation bancaire, notamment par la mise en place de plafonds sur les garanties, la création d’un fonds de garantie publique et l’extension des délais de remboursement, avec des mécanismes d’ajustement et de moratoires. Il insiste aussi sur la nécessité de préserver l’indépendance de la gestion de Meck en évitant toute ingérence politique ou abusive.
La mise en place d’échéances ajustables, de moratoires en cas de difficultés, ainsi que de mécanismes d’accompagnement, permettrait de réduire ces risques et de favoriser un développement plus inclusif. Cela implique notamment la rédaction de contrats de crédit avec des échéances plus longues, adaptées à la capacité de remboursement des emprunteurs.
Le parti RDCE souligne que la microfinance doit continuer à soutenir le développement tout en étant encadrée pour éviter qu’elle n’accroisse la pauvreté. Des mesures telles que la réduction des garanties excessives, telles que celles exigeant la détention d’or ou la constitution d’hypothèques, faciliteraient l’accès au crédit pour les emprunteurs. Ensuite, l’adoption d’une politique prudente, intégrant la diversification des types de garanties, la baisse des taux d’intérêt, ainsi que la facilitation de l’accès à des crédits à des conditions plus avantageuses pour les membres les plus vulnérables, favoriserait un développement économique équilibré. Ces stratégies contribueraient à limiter les risques de faillite et de surendettement, tout en promouvant une croissance inclusive et durable sur l’ensemble de l’archipel.
Le bureau du parti RDCE, Section Auvergne Rhône-Alpes
Par BACAR Mmadi

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