Hommage à Kari Adjali. l s’appelait Lou Belletan, mais aux Comores, on l’a souvent connu sous d’autres noms : Side, Kari Adjali, Kana Azidjuwao, Casim
Hommage à Lou Bellatan, dit Side, Kari Adjali, Kana Azidjuwao, casimir...
Un grand homme. Un vrai chercheur, au sens noble.
Il s’appelait Lou Belletan, mais aux Comores, on l’a souvent connu sous d’autres noms : Side, Kari Adjali, Kana Azidjuwao, Casimir… Des noms d’engagement, des noms d’amour.
Professeur français d’anglais, il arrive au Lycée Said Mohamed Cheikh de Moroni en 1972. En 1975, la France rompt ses relations diplomatiques avec les Comores nouvellement indépendantes. Tous les enseignants français repartent. Lui, il reste.
Et il ne reste pas pour s’accrocher à une fonction, il reste par fidélité humaine, intellectuelle et politique. Il reste pour comprendre. Pour chercher. Pour apprendre la langue du pays, pour écouter les gens, pour écrire les voix.
Il apprend rapidement à parler le shikomori, sans accent, sans interprète. Il sillonne les villages, interroge les anciens, collecte les récits oraux, fouille les archives, enregistre, transcrit, classe, publie.
La révolution comorienne d’Ali Soilihi devient pour lui un axe essentiel de réflexion. Il étudie ses discours, les traduit, les analyse, les contextualise, en discute avec les acteurs de cette époque intense et brève. Il en extrait la pensée, la critique, les contradictions, les espoirs.
Après la chute de la révolution, il continue d’explorer les séismes comoriens avec passion : identité, féodalité, religion, jeunesse, école, parole politique. Ses écrits sont autant de miroirs tendus à la société comorienne. Il y a mis du temps, de l’amour et du courage.
Revenu en France, il ne renie rien. Il fonde la maison d’édition Djahazi, où il publie ses œuvres majeures sur les Comores et l’océan Indien. Il reste lié à la diaspora comorienne en France, participe à des conférences, écrit, échange, partage.
Son livre « L’Imposture féodalo-bourgeoise » est un monument. Une bibliothèque à lui seul. Une archive vivante de la révolution comorienne.
Aujourd’hui, nous perdons un frère de pensée. Un camarade de recherche. Un amoureux exigeant de notre histoire.
Biographie sommaire du chercheur Lou Belletan
Né en 1938 à Nice
Études primaires à Nice (1944-48), secondaires à Paris (1948-58)
Service militaire en Algérie (1959-61)
Enseignement et études universitaires entre 1962 et 1972 (Tunisie, Congo-Brazzaville, Paris, Angleterre, Nice)
CAP d’instituteur (1964) — Enseignement en Tunisie (1962-64)
Licence d’anglais (1968), Maîtrise (1970), CAPES (1971), Licence de Lettres Modernes (1971)
DEA Anthropologie-Histoire (1996)
Arrivée aux Comores en septembre 1972
Enseignement à Moroni (1972-1974)
Recherche historique, linguistique et anthropologique à partir de 1974
Collecte (inachevée) de traditions orales et écrites dans les quatre îles (1974-77, 1984-85)
Travaux d’archives à Aix, Maurice, La Réunion, Paris, Toulon, Comores
Enregistrements de témoins et personnalités comoriennes
Enseignement à Mayotte (1985-88) puis à La Réunion (1988-98)
Retraite à Grasse, reprise des travaux et publications par la maison Djahazi
A toi, Lou, en fraternité
Dans le silence vibrant de nos entretiens,
Il y avait plus que des mots, il y avait le lien.
Un feu tranquille, une écoute en éveil,
Le parfum mêlé de la recherche et du miel.
On parlait des Comores comme on parle d’un frère,
Avec respect, avec ferveur, avec lumière.
Ta voix devenait écho à mes pensées tissées,
Et nos silences, des archives partagées.
Tu riais comme on pense, tu pensais comme on aime,
Sans détour ni posture, mais avec ce qui sème.
Et moi, camarade, je garde en mon cœur
Ta comorianeté profonde, ton regard sans peur.
Repose en paix, Lou,
Navigateur des vérités sensibles.
Tu es parti, oui
Mais tu restes,
Indélébile.
Dini Nassur

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