"La Tanzanie livre à la mort un opposant politique comorien". Lettre ouverte à la Présidente de la République Unie de Tanzanie, Mme Samia Suluhu Hassa
Lettre ouverte à la Présidente de la République Unie de Tanzanie, Mme Samia Suluhu Hassan
À l’heure où la Tanzanie livre à la mort un opposant politique comorien
Madame la Présidente,
Il est peut-être déjà trop tard. En ce moment même, à l’aéroport, un homme est en train d’être expulsé. Il s’appelle ABDOUSALAM MPINGO DIT BACHAR. Il est entouré de trois mercenaires noirs, pour le ramener de force aux Comores. Ce n’est pas une simple extradition, Madame la Présidente. C’est une livraison politique. Une trahison. Une condamnation à mort.
Comment avez-vous pu ? Comment la République Unie de Tanzanie, si respectée dans la région, peut-elle se faire complice d’un régime qui tue ? Vous le savez, tout le monde le sait : aux Comores, il n’y a ni justice, ni droits humains, ni liberté. Il n’y a qu’un homme, un clan, une répression brutale qui s’abat sur tous ceux qui osent parler, résister, s’opposer.
BACHAR n’est pas un terroriste. Ce n’est pas un criminel. C’est un homme libre, un citoyen révolté, un militant en colère. Oui, ses mots sont parfois violents, cruels, blessants. Oui, il insulte — même moi, Moronien, frère de même ville NADJIDA SAID ABDALLAH, j’ai été atteint par ses paroles. Mais dans une démocratie, ce n’est pas un motif pour être livré à la torture ou à la disparition forcée.
Vous l’avez livré à un régime de sang
La liste des morts s’allonge chaque mois : FANOU, abattu comme un chien. MBAPALE, exécuté froidement. AYMANE, assassiné dans le silence. Et maintenant ? BACHAR, à qui l’on tend les menottes pour le conduire à son supplice, pendant que le monde détourne les yeux ? Non, Madame la Présidente. Cela, c’est votre décision. Votre responsabilité. Votre tache noire sur l’histoire africaine.
Je vous le dis avec douleur : vous êtes noire. Noire non de peau — cela, nous le sommes toutes et tous, avec fierté — mais noire de trahison, noire d’aveuglement, noire d’avoir livré un homme à son bourreau. Où est passé l’héritage de Nyerere ? Où sont les valeurs d’hospitalité, de solidarité, de résistance africaine ? Pourquoi vous êtes-vous abaissée devant Azali Assoumani, un dictateur sans scrupule, un fossoyeur de son peuple ?
Ce geste ne sera pas oublié
En livrant BACHAR, vous n’avez pas seulement cédé à un voisin. Vous avez cédé à la terreur. Vous avez brisé la confiance que de nombreux Africains avaient placée en vous. Vous avez humilié la Tanzanie. Vous avez abandonné un homme à la merci d’un régime qui tue sans procès, qui enterre sans nom, qui fait taire dans le sang.
Mais je vous le dis ici solennellement : le peuple comorien n’oubliera pas. L’Afrique libre n’oubliera pas. Et même votre peuple, en Tanzanie, vous demandera un jour : « Pourquoi avez-vous fait ça ? »
Un appel de dernière minute
S’il vous reste un soupçon d’humanité, de conscience, de mémoire de l’histoire, alors arrêtez ce transfert. Faites revenir cet avion. Protégez celui qui, malgré ses excès, n’a commis aucun autre crime que celui de parler. Protégez-le au nom de l’Afrique. Au nom de la justice. Au nom de la vie.
Il est encore temps d’être grande.
Avec une douleur immense,
et la colère d’un frère comorien trahi,
Citoyen comorien
Témoin de l’injustice, porte-voix de la vérité
Je crois, j’ai dit.
Pr. BASHRAHIL
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