Procès des journalistes : Le Syndicat National des Journalistes dénonce un réquisitoire injuste qui envoie des signaux négatifs à la liberté de la pre
Communiqué N°23-003/SNJC
Procès des journalistes du 22 juin 2023 : Le SNJC dénonce un réquisitoire inique
Le 22 juin 2023 s’est tenu à Moroni un procès pour «diffamation et injures» contre 4 journalistes, membres du Syndicat. Cette affaire fait suite à un discours prononcé par le Syndicat le 17 janvier à l’occasion de la cérémonie de présentation des vœux du Président de la République à la Presse, un discours relayé par la presse notamment RFI.
Dans ce discours, le Syndicat faisait état des difficultés rencontrées par la profession et a notamment dénoncé des faits d’abus sexuels rapportés au sein de l’Office de Radio et de Télévision des Comores (ORTC).
Bien que le discours n’ait pas désigné d’auteur présumé des abus sexuels déplorés, un cadre dirigeant de l’Office de télévision publique a décidé de porter plainte contre 4 membres du Syndicat des Journalistes dont Andjouza Abouheir, la vice-présidente qui avait lu le discours signé par le bureau du Syndicat. C’est dans ce contexte que s’est tenu le procès ce jeudi, en l’absence de deux des mis en cause qui se trouvent à l’étranger.
Fait étonnant. Le plaignant a reconnu à l’audience qu’il ne s’est pas senti personnellement identifié dans le discours du Syndicat lu et rapporté par les deux journalistes présents à l’audience. Il a également reconnu qu’un autre journaliste mis en cause n’avait même pas relayé les faits prétendument diffamatoires. Cependant, le Parquet a requis une peine particulièrement sévère d’un an de prison assortie d’une interdiction d’exercer.
Ces peines iniques ont été requises alors même qu’en vertu du Code pénal comorien, les infractions de diffamation et d’injure ne sont punissables que de six mois d’emprisonnement pour la diffamation et deux mois pour l’injure et que l’interdiction d’exercer qui peut être prononcée n’est prévue que pour les fonctions de dirigeant d’organe de Presse.
Le Syndicat dénonce un réquisitoire injuste qui envoie des signaux négatifs à la liberté de la presse à six mois des élections présidentielle et gubernatoriales.
Dans son réquisitoire, le Parquet a justifié la gravité de la peine requise par le fait que le discours du Syndicat aurait terni l’image du pays parce que relayé par la Presse internationale. Ce faisant, il révélait se soucier des apparences plus que de la sécurité des femmes journalistes sur leur lieu de travail.
Ce même Parquet s’est abstenu d’ouvrir une enquête suite à la dénonciation par toute une profession d’abus sexuels récurrents au sein d’un organisme public. Il démontrait ainsi, si besoin était, que le discours du Chef de l’État du 6 juillet 2020, lors duquel il a dit son engagement « pour prendre des initiatives et des mesures contre la recrudescence INQUIETANTE des actes et de violence et d’agressions, en particulier contre les femmes et les enfants » est resté lettre morte.
Sachant qu’il est de notoriété publique que les victimes des abus sexuels sont, la plupart du temps, réduites au silence par la peur du jugement de la société et des représailles en milieu professionnel, le Syndicat des journalistes déplore cette politique pénale qui tend à perpétuer l’omerta et, ce faisant à en protéger les auteurs.
A l’heure où la parole des femmes peine à trouver son chemin dans l’espace public, le Syndicat réaffirme sa détermination à dénoncer systématiquement le sexisme et les violences sexuelles qui demeurent prévalantes dans le milieu journalistique et à réclamer une meilleure protection de toutes les femmes journalistes. Le nécessaire respect de la vie privée n’implique jamais de protéger les auteurs d’abus sexuels. Le Syndicat appelle les autorités à faire toute la lumière sur les faits supposés de “violences sexuelles” contre des femmes journalistes et à ne pas se tromper de cible.
Moroni, le 24 juin 2023
Le Bureau national
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