La « marche Rose » sur Mayotte : un épisode marquant du régime du président Ali Soilihi
La « marche Rose » sur Mayotte : un épisode marquant du régime du président Ali Soilihi
Après le coup d’Etat du 3 août 1975, intervenu 28 jours après la proclamation unilatérale du 6 juillet 1975, Le prince Said Mohamed Jaffar est proclamé président. Un Conseil National de la Révolution (CNR) est annoncé à la radio. Il comprend 16 membres dont le prince Said Mohamed Jaffar, Ali Soilihi (UMMA), Said Bacar Said Tourqui (RDPC), Mouzaoir Abdallah (RDPC), Ali Toihir (MOLINACO), Said Ali Said Tourqui, Abdoulmadjid Youssouf (Objectif Socialiste), Mohamed Mouigni, Abbas Djoussouf, Said Ahmed Said Ali, Dini Zaïd, Salim Hadji Himidi (PASOCO), Abdérémane Mohamed Sidi (UMMA), Mohamed Ali Djimbanao, Sultan Chouzour et Christian Novou.
Un conseil exécutif national (CEN) est également constitué quelques jours plus tard. Il regroupe des représentants de toutes les îles dont Abdoul Wassion et Christian Novou pour Mayotte, Kamal Eddin Said Ali et Abdoulkader Ahmed pour Anjouan, Mohamed Hassanaly pour Mohéli et Salim Hadj Himidi poul Ngazidja. Les anciens ministres sont remplacés par des nouveaux responsables portant le titre de «délégué» ou de «commissaire». Ali Soilihi est nommé délégué à la Défense et à la justice.
Leader charismatique, Ali Soilihi Mtsashiwa est véritablement le seul maitre à bord. Dès le mois de septembre 1975, il entame des négociations avec l’ancienne puissance coloniale. Cette dernière a formulé, comme préalable, à la partie comorienne la proposition de différer la demande d’admission de l’Archipel aux Nations Unies. Le refus du gouvernement comorien d’obtempérer a engendré une rupture des négociations. Exaspéré et se sentant trahi tant par ses anciens amis du Mouvement Populaire Mahorais (MPM) et que de ses amis en France, Ali Soilihi Mtsashiwa va poser une série d’actes symboliques contre la présence française à Mayotte.
Le 21 novembre 1975, il décide un débarquement aérien sur Mayotte, connu sous le nom de la « marche rose ». À l’instar de la « marche verte » effectuée dans l’ex-colonie espagnole du Sahara Occidental par les sujets du roi Hassan II du Maroc, Ali Soilihi Mtsashiwa prend la tête d’une cinquantaine de ses militants, arborant des foulards à carreaux roses et blancs pour tenter de reconquérir et de rétablir pacifiquement l’autorité de l’Etat sur la quatrième île.
A bord d’une petite flottille d’avions bimoteurs, avec à son bord plusieurs jeunes Comoriens volontaires, il débarque à l’aéroport de Pamandzi. L’opération sera de courte durée car repoussée par l’intervention musclée des légionnaires et des gendarmes français aidés par des militants du MPM
Ali Soilihi Mtsashiwa accompagné de son bras droit Ismael Mouchtadi est neutralisé et gardé dans des locaux des forces de l’ordre. es jeunes militants révolutionnaires qui l’accompagnent sont molestés et remis manu militari dans les avions en direction de Moroni. La crise s’est dénouée grâce à l’intervention du président Saïd Mohamed Jaffar auprès des autorités françaises.
Ali Soilihi Mtsashiwa et ses compagnons sont libérés et réembarqués dans les avions DC4 et DC3 utilisés pour le débarquement. Dans la foulée de cet échec, Ali Soilihi Mtsashiwa décide de créer et de financer un Mouvement de Libération de Mayotte (FROLIMA), dirigé par des jeunes originaires de Mayotte et membres de ses comités révolutionnaires. Le FROLIMA n’aura qu’une existence éphémère. Il disparait quelques mois plus tard, après avoir fait exploser quelques bombes dans l’île.
Elu, début janvier 1976, chef de l’Etat, Ali Soilihi Mtsashiwa décide d’intensifier la campagne diplomatique autour de la réintégration de Mayotte dans le giron comorien. Dès le 28 janvier 1976, il adresse au président du Conseil de Sécurité des Nations Unies un télégramme dont la teneur est sans équivoque sur le retour dans l’ensemble comorien.
Ali Soilihi Mtsashiwa saisit aussi l’OUA et le groupe des pays non-alignés pour l’inscription de la question de Mayotte à l’ordre du jour de la 31ème session de l’Assemblée générale des Nations Unies. Une demande est effectivement introduite auprès des Nations Unies par Henri RASOLONDRAIBE, chargé d’affaire a.i. de la mission permanente de Madagascar auprès des Nations Unies et président du Groupe africain. Depuis cette période, la question de l’intégration de Mayotte à l’archipel est régulièrement inscrite aux Assemblées des Nations Unies.
Feu le président AAA avait continué ce combat à sa manière avec sa fameuse « guerre de la salive ». Si aujourd’hui la question de Mayotte a pris d’autres tournures, il n’en demeure pas moins que la diplomatie française a toujours œuvré pour que la question ne soit pas inscrite aux ordres du jour de l’Assemblée Générale de l’ONU en persuadant les gouvernements successifs de privilégier les rencontres bilatérales. Au vu de la situation présente, la balle est maintenant dans le camp de la jeune génération des quatre iles.
Photo : Membres du Conseil National de la Révolution (CNR) en réunion
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