Ici quand tu es pauvre, que tu n’es personne, que tu n’as pas d’oncle ayant fait le grand mariage, ou un frère « cadre » tu peux te faire ba...
Ici quand tu es pauvre, que tu n’es personne, que tu n’as pas d’oncle ayant fait le grand mariage, ou un frère « cadre » tu peux te faire bannir sans autre forme de procès, pour un oui ou non, de façon totalement subjective et inique.
Ce système en réalité épargne les riches, les nantis, les grandes familles qui ont une assise au village.
Ceux qui ont des oncles, des frères, qui vont au Bangweni, un mharuma sur l’épaule. Le bannissement de longue durée n’est prononcé qu’à l’endroit des « marentsi », qui n’ont personne pour les défendre. Quand l’on me parle de solidarité grande comorienne ça me fait marrer. En réalité , il s’agit d’échange de bons procédés, de troc, de prêt. Aux pauvres, on ne donne rien.
Je pense donc à cette femme qui a été bannie pour des futilités, à qui on a demandé de présenter des excuses pour une erreur non commise et dont les excuses n’ont quand pas été acceptées. Une attitude cruelle, méchante, indigne, malveillante.Je me dis la vie est injuste pour les plus pauvres d’entre nous.
Le traumatisme de cette femme , par rapport à la pression subie, l’exclusion sociale, la mise au ban par ses paires est édifiant sur notre capacité à faire taire la petite voix qui nous dit que la voie choisie n’est pas la bonne. Seul compte l’honneur du village, lequel est indéfinissable finalement.
Dans un pays où le divertissement se résume aux mariages, l’on comprend aisément à quel point l’arme de l’excommunication fait mal. Mon amie est complètement dépassée par les événements, elle n’en dort plus, a des pertes de mémoire. Elle a quand même la force de sourire, de rire, d’espérer.
Ceux qui prennent ces décisions iniques doivent se dire, qu’ils auront des comptes à rendre devant Dieu. Que ce qui se passe aujourd’hui pour cette amie est pour moi de la persécution, parce qu’elle est pauvre, parce qu’elle est femme et parce qu’elle est sans lignage familial « digne d’intérêt ».
Par Faïza Soulé Youssouf
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