Une minute d'Histoire des Comores... 7 décembre 1989, la jeunesse héroïque Les Comores sont dirigés par les affreux de Bob Denard. Après...
7 décembre 1989, la jeunesse héroïque
Les Comores sont dirigés par les affreux de Bob Denard. Après l'assassinat du président Abdallah, les mercenaires détiennent la réalité du pouvoir, contrôlent les frontières aériennes, maritimes et terrestres. Les déplacements sont soumis au contrôle de la garde présidentielle.
Depuis le 5 décembre, avec l'échec cuisant de Bob Denard d'organiser le hitima et la foule criant Bob Denard assassin, tous les quartiers de Moroni sont encerclés, subissant jour et nuit les bruits de bottes. Les sommeils sont très difficiles et les lendemains incertains.
Ce 7 décembre, les étudiants de l'École Nationale Supérieure de M'Vouni ont pris l'initiative de manfiester contre Bob Denard en criant trois slogans : "Bob Denard Nalawé (dehors), "Bob Denard assassin", "les mercenaires dehors".
Parti de M'Vouni, ils se sont dirigés vers le lycée Saïd Mohamed Cheikh où les jeunes présents ont rejoint cette manifestation.
Ce millier d'étudiants et lycéens avait pour objectif commun, se rendre à la présidence de la République pour réclamer le départ de Bob Denard et de ses mercenaires. J'ai eu la chance, adolescent, d'avoir participé à cette manifestation. Je n'ai fait que quelques kilomètres avant d'être stoppé avec des manifestants et des journalistes dont celle de RFI devant le Ministère comorien des Affaires Étrangères.
Après avoir été aspergé des gaz lacrymogène, certains d'entre nous se sont rabattus au magaza, puis à la mosquée de Mtsangani. C'était pour moi ma première manifestation mais la première qui avait une importance capitale pour le destin des Comores.
Un deuxième groupe fût arrêté devant l'Alliance Franco-comorienne de Moroni. Poursuivi avec des matraques et des bombes lacrymogènes, certains d'entre nous se sont réfugiés dans notre quartier Mtsangani où les Comoriens exerçant au sein de la GP nous ont pourchassés, arrêtant quelques uns qui seront par la suite torturés.
Cette journée est assez importante pour la jeunesse comorienne post-indépendance, une première que les jeunes osent braver l'interdit et manifester contre la présence des mercenaires. Cette journée a été aussi marquante, puisque cette jeunesse exige, outre le départ des affreux, le rétablissement des droits démocratiques et des élections transparentes.
Cette manifestation a eu un écho dans le monde. Tous les journaux de RFI et de Radio Praha, la radio francophone de Prague, avaient repris en boucle cette révolte étudiante. A l'issue de cette mobilisation et la médiatisation de cette révolte, treize journalistes et photographes étrangers ont été expulsés des Comores, jeudi soir 7 décembre, par les mercenaires européens qui contrôlent l'archipel.
Les nuits suivantes, notre quartier Mtsangani a vécu sous les coups de matraques et des bottes. Dès 21 heures, les hommes armés, cachés ou passant dans les ruelles et les petits coins de la Médina nous obligeaient à rentrer chez nous, ou parfois passant avec les véhicules équipés de mitrailleuses.
Cette date est un tournant pour la fin du mercenariat aux Comores. La manifestation relayée par la presse et les questions parlementaires au Sénat et à l'Assemblée Nationale en France ont permis de déclencher le départ de Bob Denard aux Comores.
Celles et ceux qui ont participé à cette journée peuvent compléter ce témoignage.
Par Nakidine Mattoir
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