Djimba et Mgomdri, les meilleurs protagonistes du théâtre comorien de tous les temps. Nous sommes aux années 90, deux jeunes comédiens amate...
Nous sommes aux années 90, deux jeunes comédiens amateurs se lancent au théâtre à la Radio Loisir, une des anciennes radio de la capitale. Lahère et Djounaïd écrivent des scénarios parfaits en langue comorienne ou plutôt improvisent en s'inspirant de la vie quotidienne des anciens.
Ils créent un univers original et vraisemblant propre à eux tournant autour de trois localités imaginaires des Comores à savoir "Nkoda Dziwa", "Chengué Djuwu" et "Mtsumburidji Zigadani". Le choix des noms est quasiment talentueux illustrant les expressions idiomatiques de "Mbae Trambwe", illustre auteur de plusieurs proverbes comoriens.
Plusieurs personnages vont entrer en scène notamment "Mze Djimba Nofumu wa Simbaba" et "Mze Mgomdri wa Mnuka Wudi", deux amis de longue date, pourtant antagonistes mais qui ont servi pendant la deuxième guerre mondiale et qui s'affichent comme "anciens combattants" devant leur communauté pour imposer leur pouvoir.
"Mkaribu" fille de "Mdrwapvili wa Magombe" et soeur de "Kari wa Mdrwapvili" est la femme de Mze Djimba avec qui ils ont eu un fils "Mrikawu". Mze Mgomdri quant à lui est marié à Ruzuna et prèfère donner à ses enfants des noms modernes comme "Claude" et "Arlette" car il a pu suivre quelques cours à l'école des colons français de "Mché Kwaleti" et se prend pour un nouveau lettré.
Ils vivent tous les deux à "Nkoda Dziwa", lieu principal de la scène où l'on peut trouver les notables comme "Hadji Assoumani", un personnage rigolo à la voix d'un perroquet mais aussi le fameux "Al Aniyu", le plus satirique et charismatique car à chaque fois que l'on appelle son nom, il répond "Kaza Mmmtsi", une sorte de formule ironique qui renvoie aux hommes très occupés et qui n'aiment pas être appelé pour rien.
Al Aniyu s'est fait surtout remarqué par sa qualité de manier la langue et son aisance en vocabulaire péjoratif mais qui provoque le rire. Il lance toujours d'abord une grossièreté bien que fortement atténuée pour respecter la règle de bienscéance comme "Undawe Bo Mafuzi Ya Mnambwa Kotri" puis l'accompagne avec la formule de politesse "Kwez" à la fin. Enfin, il y a les personnages secondaires des trois localités complétés par les jeunes bavards des lieux qualifiés de "Hirimu Ya Abega".
Et tout cela se faisait par la voix de deux personnes seulement : Lahère et Djounaid, des vrais génies. Ils ont été sollicité par la suite, par toutes les anciennes radios voire même la Radio Nationale des Comores pour diffuser leurs pièces surtout au moment de l'Iftar pendant le mois de Ramadan afin qu'ils amusent la gallerie. Il est vrai que ces enregistrements continuent de nous faire rire aux éclats jusqu'à nos jours et sont impérissables.
Aujourd'hui, il serait bien profitable que les passionnés d'écriture puissent s'approcher de ces deux artistes (qui vivent en France actuellement) pour reconstituer toutes leurs pièces et les sauvegarder dans des ouvrages qui seront accessibles au grand public, tout en employant le maximum de langues possibles (Shikomori, français, arabe...). Ce serait un atout pour la promotion du théâtre comorien mais aussi pour la valorisation et l'immortalisation de nos meilleurs artistes.
©Sur les traces de la culture comorienne
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