60 années après les indépendances africaines : l’indépendance reste à conquérir

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60 années après les indépendances africaines : l’indépendance reste à conquérir A – DES INDÉPENDANCES FORMELLES Après plus de 60 années d’in...


60 années après les indépendances africaines : l’indépendance reste à conquérir

A – DES INDÉPENDANCES FORMELLES


Après plus de 60 années d’indépendance, la réalité s’impose à tous. L’indépendance fut par maints cotés, ou principalement une mascarade. Le pouvoir colonial mua en pouvoir néocolonial sous des formes diverses. La constante étant la domination étrangère et la continuation d’un pillage sans vergogne des ressources des pays africains. 

Comment comprendre cette situation ? Comment se fait-il qu’elle perdure ? 

Côté colonialiste dont la France me semble le porte drapeau !


Le cas de la France sous le règne de Degaulle, illustre parfaitement les pratiques colonialistes et néocolonialistes de l’impérialisme en Afrique.

Il est de notoriété publique que : « De Gaulle a sacrifié les indépendances africaines au profit de celle de la France. Pour quatre raisons : 
  • La première, c’est le rang de la France à l’ONU avec un cortège d’États clients qui votent à sa suite ; 
  • La deuxième, c’est l’accès aux matières premières stratégiques dont le pétrole, l’uranium, l’or, le bois, le cacao, etc ; 
  • La troisième, c’est le financement de la vie politique française, à travers des prélèvements sur l’aide publique au développement ou la vente des matières premières ; 
  • La quatrième raison, c’est le rôle de la France comme sous-traitant des États-Unis auprès des pays d’Afrique. 

Donc, pour ces quatre raisons, la France a mis en place un système qui maintient ses anciennes colonies sous dépendance. Voilà les raisons pour lesquelles le sang continue à couler sur le continent noir, mamelle nourricière de la France » (Coupsfrancs.com )

Telles sont les bases de l’idéologie criminogène qu’on appelle gaullisme dont les ravages sont incommensurables et qui fut incarné par Jacques Foccart.« La France accordera l’indépendance à ceux qui la réclamaient le moins, après avoir éliminé ceux qui la réclamaient avec le plus d’intransigeance » dixit Messmer, ancien premier ministre français. (in Kamerun une guerre cachée aux origines de la FrançAfrique 1948-1971 par Thomas Deltombe, Manuel Domengue, Jacob Tatsita édition de la découverte 2011), une traduction concrète de l’orientation tracée par De Gaulle. 

Cette idéologie criminogène conduisit à l’assassinat de pratiquement tous les patriotes africains. Des assassinats massifs comme en Algérie, à Madagascar et ailleurs. Des assassinats ciblés : au Congo Patrice Lumumba après son discours mémorable prononcé à la célébration de l’indépendance ; au Burundi, le prince Louis Rwagasore, fils du Mwami et Premier Ministre, proche de Patrice Lumumba ; au Rwanda Mwami Mutara III qui se préparait à se rendre aux Nations unies réclamer l’indépendance de son pays ; au Cameroun Ruben Um Nyobe et Felix Moumié, présidents de l’UPC (Union des populations du Cameroun), Ernest Ouandié fusillé en 1971 après une mascarade de procès politique ; au Maroc Mehdi Ben Barka, leader du mouvement nationaliste et opposant au roi du Maroc et tant d’autres car il est impossible de les lister tous. Sans oublier les innombrables militants peu connus et les simples gens, « pertes collatéraux », bombardés au napalm comme au Kamerun.

Cette idéologie criminogène conduisit à l’assassinat de tout Chef d’État africain patriote ou en rébellion ou montrant des velléités de résistance. Au Ghana Kwame Nkrumah ; au Mali Modibo Keita ; aux Comores Ali Soilihi et Ahmed Abdallah ; au Burkina Faso Sankara ; en Libye le colonel Khadafi ; au Congo-Brazzaville Marien Ngouabi ; à Madagascar Richard Ratsimandrava ; en Algérie Mohammed Boudiaf, etc.

C’est cette idéologie criminogène qui poussa le Général De Gaulle à tout entreprendre pour renverser Sékou Touré. Poussant la veulerie jusqu’à fabriquer de la fausse monnaie guinéenne. Les complots et tentatives d’assassinat de Sékou Touré sont innombrables. Ils ont détruit ce président patriote et progressiste dont la vigilance contre les manœuvres françaises a viré à l’obsession. C’est sous cette pression constante que Sékou est devenu au fil des ans, un dictateur, réagissant brutalement face à toute opposition et à toute personne susceptible d’être utilisé par les services français pour le renverser voire le tuer. 

C’est cette idéologie criminogène qui poussa la France à renverser Bagbo en 2011. Le crime de Bagbo : avoir voulu traiter d’égal à égal avec le président français, avoir voulu défendre les intérêts de son pays face à la France, un crime de lèse-majesté aux yeux de Sarkosy ! On a utilisé le CFA pour asphyxier le pouvoir ivoirien. Face à l’échec et à l’initiative de la Cote d’Ivoire de créer sa propre monnaie, la France utilisa son armée, bombarda la Cote d’Ivoire, faillit diviser le pays. Et cela avec l’appui de la « communauté occidentale ». Le président Bagbo fut emprisonné, un calvaire de près de dix ans. Besogne dont s’est acquitté avec empressement et détermination la prétendue « Cour Pénale Internationale ». 

Cette idéologie criminogène marche sur deux pieds : la coopération économique et financière (le CFA) et militaire. Le CFA prolonge le « pacte colonial » dont les quatre règles principales sont : « 1-les colonies ont l’interdiction de s’industrialiser, devant se contenter d’approvisionner en matières premières la métropole qui transforme en produits finis qu’elle leur vend ensuite 2- la métropole a le monopole sur les exportations et les importations des colonies 3-elle a aussi le monopole sur le transport des produits de commerce extérieur des colonies 4 la métropole octroie des préférences commerciales aux produits des colonies » (l’arme invisible de la Françafrique une histoire du franc cfa par Fanny Pigeaud et Ndongo Samba Sylla édition de la découverte) 

Cette idéologie criminogène généra un système rodé, nommé la FrançAfrique, qui enchaînait et enchaîne politiquement les pays. La politique d’influence française manœuvre pour placer à leur tête des fantoches à leurs soldes. Tous les moyens sont bons, y compris militaire pour préserver les liens de domination qui place les économies africaines au service de l’économie de la France impériale.

Cette françAfrique poursuit son œuvre criminelle en changeant simplement la façade. Car les héritiers de Degaulle, de gauche comme de droite, cherchent simplement à maquiller le visage hideux de leur néocolonialisme pour continuer tranquillement à piller l’Afrique.

Enfin, on doit évoquer la balkanisation de l’Afrique. Durant la période coloniale, la France avait mis en place des grands ensembles administratifs : l’Afrique Occidentale Française et l’Afrique Équatoriale Française. Par contre l’indépendance fut « accordée » à une multitude de « pays » créés de toute pièce sur le principe de « diviser pour mieux régner », rendre les pays incapables de faire contrepoids et facilement manipulables. 

Côté africain 


La première question me semblent être l’attitude des dirigeants de nos pays. Comment comprendre que pendant plus de 60 ans, ils agissent tous en « nègres de maison » de la France ? Il va de soi que les multiples coups d’État téléguidés, les innombrables assassinats ont propulsé les fantoches sur les devants de la scène. Pire encore, nombre de politiciens africains en arrivent à l’idée que sans être au service de la France on ne peut ni accéder au pouvoir, ni s’y maintenir. D’où une certaine subordination des élites africaines ravagées par des ambitions personnelles. D’un autre côté, cet état de fait induit une dynamique nuisible faite de corruption, de clientélisme, etc. 

La Cote d’Ivoire offre une expérience lumineuse en la matière. Sous Félix Houphouët-Boigny, un pilier de la françAfrique, impliqué dans l’assassinat de l’immortel Sankara, la Cote d’Ivoire faisait figure de leader, un pays prospère, exemple de réussite. Puis arrive au pouvoir Laurent Bagbo. Il n’était pas spécialement « anti-français ». Sous son règne les grosses entreprises française, piliers économiques de la françAfrique, détenaient des pans entiers de l’économie ivoirienne. Bagbo tenait à sa dignité de président et tenait à être traité comme tel par le président français Sarkozy, d’égal à égal. 

Un crime de lèse-majesté qui lui a valu la foudre de l’Élysée. Il fallait donc punir cet insolent et le remplacer par un fidèle. Les présidentielles ivoiriennes de 2010 fournirent l’occasion. Bagbo les avait manifestement remportées mais quoi de plus faciles que de les contester, de créer des troubles surtout quand l’on dispose de moyens. La France utilisa le CFA pour étouffer Bagbo et finit par intervenir militairement pour placer Allasane Wattara. la Cote d’Ivoire faillit même éclater. Aujourd’hui, on assiste à l’impensable, face à la candidature de Wattara pour un 3ème mandat, en principe anticonstitutionnel, la classe politique ivoirienne n’a rien de mieux qu’à solliciter l’intervention française. Les hauts dirigeants ivoiriens sollicite l’ingérence française dans leurs affaires intérieures. 

Une honte pour l’Afrique. Un scandale qui ne s’explique par la lâcheté et la veulerie des dirigeants de premier plan de la Cote d’Ivoire. Crainte de la brutalité française dans sa détermination à placer au pouvoir ses fantoches. On préfère le scintillement juteux des palais présidentiels à des années de prison dans les geôles de la Cour Pénale Internationale. Une servilité assumée des politiciens africains.

Mais on doit aussi prendre en compte l’entreprise coloniale d’acculturation dont les piliers idéologiques sont la négation de l’histoire des africains et l’inculcation de valeurs occidentales : le beau est blanc, le laid noir africain. La belle mangue comorienne est qualifiée de « yakizungu », on fait primer la langue coloniale. Dès l’école primaire, on vous apprend à vous sous estimer, on vous inculque des complexes d’infériorité face aux blancs, on vous oblige à parler français et à abandonner voire détester les parlers comoriens. Tout cela crée une élite africaine dépourvue de sentiment patriotique, de dignité dont le must est de singer l’occident.

L’exception rwandaise brille en Afrique. Sa rupture avec la France, loin de faire sombrer le pays, a contribué à lui a fait gravir des sommets qu’aucun pays du pré carré français n’est capable d’envisager. Bien évidemment le Rwanda est soumis au feu nourri de défenseurs pointilleux des droits de l’homme dont on imagine aisément l’inspiration et les objectifs. Quoiqu’on puisse en dire, malgré tout ce qu’on peut reprocher les résultats sont tangibles et devraient inspirer. La gestion libre du pays a produit un miracle inimaginable dans le pré-carré français : « le Rwanda a réussi le difficile pari de la réconciliation nationale alors qu'il fut victime d’un génocide qui frappe encore chaque famille. 

De plus, les Rwandais bénéficient, outre d’une sécurité sociale, d’un congé de maternité payé, d’infrastructures médicales modernes, d’une lutte anti-corruption en constante progression, d’une sécurité absolue dans tout le pays, d’une propreté supérieure à la plupart des villes européennes, d'un réseau routier à plus de 90 % asphalté et entretenu, d’un réseau Internet 4G et de la fibre optique, etc » (voir wikipedia) 

Ce qui devrait conduire à un examen attentif du combat du Front Patriotique Rwandais contre l’impérialisme et d’un autre coté à s’interroger sur la lutte de libération nationale des autres pays africains, son organisation, ses idéologies. Une riche expérience à creuser pour éclairer la voie de la continuation de ce combat nécessaire qui est entrain de prendre corps. 

(Suite programmée : une économie dépravée)

Idriss (14/09/2020)

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