Ahmed Ali Amir change de métier. Il n’est plus journaliste, mais coordinateur de la communication et de la presse de la présidence. Sa mi...
Ahmed Ali Amir change de métier. Il n’est plus journaliste, mais coordinateur de la communication et de la presse de la présidence. Sa mission consiste à «concevoir la stratégie et le plan de communication, de piloter leur mise en œuvre».
Convaincu «qu’il y a urgence à peser sur le cours de notre histoire commune», il compte organiser les assises de la presse, œuvrer pour l’adoption du nouveau code de l’information et estime qu « il n’y a point de communication qui vaille, si l’État de droit n’est pas garanti ». Propos recueillis par BIM
Convaincu «qu’il y a urgence à peser sur le cours de notre histoire commune», il compte organiser les assises de la presse, œuvrer pour l’adoption du nouveau code de l’information et estime qu « il n’y a point de communication qui vaille, si l’État de droit n’est pas garanti ». Propos recueillis par BIM
Masiwa : Ahmed Ali Amir, pourquoi avez-vous été limogé de la direction d’Alwatwan il y a quelques mois ?
Ahmed Ali Amir : Vous m’avez posé cette même question lors de mon limogeage au poste de directeur du journal Alwatwan. Je vous ai répondu que la nomination et la destitution appartient au chef de l’État, il n’avait pas motivé sa décision. J’ai cru comprendre que le positionnement éditorial du journal ne plaisait pas. Nous avons tenté d’expliquer, par des éditos et des chroniques, que toute réforme constitutionnelle, sans une large concertation, impliquant l’opposition serait source de discorde.
Masiwa : Aujourd’hui un autre décret vous hisse au rang de collaborateur du chef de l’État, pour occuper quel poste?
AAA : Il a été crée une coordination de la communication et de la presse de la présidence. Il aura entre autres tâches, de créer des moyens, des actions, permettant d’assurer la visibilité des actions de la présidence et du gouvernement. La tâche essentielle est de concevoir la stratégie et le plan de communication, de piloter leur mise en œuvre à l’échelle nationale et internationale. Dans mon message privé adressé aux lecteurs, j’ai rappelé qu’avec les enjeux de communication moderne, l’avènement du numérique, les bouleversements apportés par les réseaux sociaux, nous devons penser autrement et se réinventer. L’intelligence consiste désormais à s’appuyer sur les compétences des entreprises de communication pour agir.
Masiwa : Ancien Directeur Général d’Alwatwan, correspondant de plusieurs organes de presse, donc, ce n’est pas l’argent votre motivation principale. Pourquoi cette fois-ci avez-vous accepté la proposition d’Azali d’intégrer son staff?
AAA : J’ai décidé tout simplement de me reconvertir. Je n’écris plus depuis six mois dans la presse nationale. Demeurer pigiste des agences de presse aussi prestigieux que Reuters n’était pas suffisant. D’autant plus, que les choix des sujets à traiter sont limités et sont rarement reluisant pour le pays. De journaliste, j’ai décidé de passer à la communication. Comme vous l’avez dit, j’ai résilié trois contrats de travail, dont celui de Reuters, Mayotte première et Alwatwan. J’ai proposé l’idée de créer une agence nationale de presse comme l’AFP en France, l’idée n’a pas obtenu l’adhésion des autorités. J’ai accepté le poste aussi, en raison des engagements pris par le chef de l’État de prendre très rapidement des mesures d’apaisement.
Masiwa : Quelles seront vos priorités?
AAA : Dans nos discussions, nous nous sommes convenus d’organiser en priorité et dans les délais courts, une assise de la presse pour élaborer un diagnostic en vue d’émettre des propositions et de formuler des recommandations au gouvernement. Je vais m’atteler à cette tâche. La priorité est l’examen de la nouvelle loi de la presse élaborée par le Conseil National de la Presse et de l’Audiovisuel. Des échanges ont commencé, il faudra continuer ce travail pour qu’elle puisse être examinée et adoptée par la prochaine session de l’assemblée. Et puis, il y a l’ampleur de la crise financière qui frappe la presse écrite. Imaginer très vite les politiques publiques de subvention et d’appui à la presse est une urgence.
Masiwa : Pensez-vous disposer des coudées franches pour agir?
AAA : Je l’espère. Je vous rappelle que j’ai dirigé le journal Alwatwan. Nous avons fait du bon boulot. Durant cette période, la liberté de ton du journal a permis de protéger les autres rédactions des médias indépendants. Nous avons ouvert nos colonnes aux opinions diverses, parfois les plus sévères. Nous avons durant cette période, fait des bons dans le classement de la liberté de la presse. Le respect de la liberté de la presse était le seul paramètre qui nous rapprochait de l’émergence, contrairement aux classements Doing Business, développement humain etc… Je suis de nature optimiste.
Masiwa : Pourtant, le président a la solide réputation de tout savoir, comment pensez-vous l’infléchir un peu sur certains points?
AAA : Je l’ai souvent rencontré. Il a besoin qu’on lui assène des vérités. Je vous rappelle que c’est la sixième fois qu’il sollicite mes services pour diriger la communication à la présidence. Je n’ai jamais voulu quitter ce métier noble du journalisme. Je pense qu’il y a urgence à peser sur le cours de notre histoire commune. Je suis convaincu d’être plus utile à ce poste.
Masiwa : Bien entendu, c’est lui qui décide. Mais quels sont les points sur lesquels vous serez intransigeant ?
AAA : La défense des libertés publiques et la lutte contre la corruption. Il n’y a point de communication qui vaille, si l’État de droit n’est pas garanti, notamment l’intégrité morale des juges et l’indépendance de la justice en ce qui concerne notre pays. L’impunité dont bénéficient les cols blancs et le premier défi à relever. Et puis, les décideurs doivent enfin comprendre que si le peuple n’est pas formé et surtout bien informé, c’est l’autoritarisme qui prend le dessus. Je vais me battre surtout pour mettre en place les instruments prévus pour protéger les libertés.
Masiwa : Vous avez incarné la défense de la liberté de la presse, et les médias sont encore plus exposés et vulnérables en ce moment, auriez-vous un plan pour remédier à cette anomalie fonctionnelle ?
AAA : Il n’y a pas de meilleur plan que la restructuration et le renforcement des organisations professionnelles des médias. Vous avez vu le 3 mai, journée internationale de la liberté de la presse. Je n’ai pas vu grand monde. Il n’y a que Idriss Mohamed qui nous accompagne tous les ans. Son absence était remarquée cette année. Après le défilé, j’ai pris la parole publiquement pour dénoncer, la censure, les journalistes jetés en prison. Je pense que les journalistes doivent compter sur eux-mêmes d’abord. Ceux qui sont « perplexe » à ma nomination n’ont pas pris la peine de manifester. Vient après le rôle du régulateur, le Conseil national de la presse qui est extrêmement important. Il faut donner à l’institution les moyens d’exercer cette mission d’observation des règles et les moyens de sanctions des abus et des dérives.
Interview d'Ali Amir Ahmed, coordinateur de la communication et de la presse de la présidence
Propos recueillis par BIM ©Masiwa Komor
Masiwa : D’icône de la défense des libertés en coordinateur de la communication d’un président en rupture avec une partie de la population, qu’allez-vous répondre aux accusations de «trahison»?
AAA: Je n’appartiens à aucun mouvement politique pour répondre aux accusations de trahisons. Si j’étais journaliste qui officie en qualité de communiquant de la présidence, j’aurais enfreint les règles de la déontologie. Ce n’est pas le cas. J’ai pris congé de ma carrière de journaliste pour relever les défis de la communication institutionnelle. Je dois apporter la preuve, par des résultats tangibles, que l’État n’a pas pour vocation de réprimer mais de garantir la liberté et de la protéger. Les gens misent sur mon échec avant même de franchir le portail de Beit-Salam, moi je mise sur le succès.Interview d'Ali Amir Ahmed, coordinateur de la communication et de la presse de la présidence
Propos recueillis par BIM ©Masiwa Komor