La chambre constitutionnelle de la cour suprême vient de rendre son verdict, treize candidats sont retenus pour concourir au suffrage. El...
La chambre constitutionnelle de la cour suprême vient de rendre son verdict, treize candidats sont retenus pour concourir au suffrage. Elle a surpris dans son arrêt en raison de contradictions intellectuelles, mais conforme au droit, notamment l’invalidation du candidat de JUWA à la présidentielle et la validation des candidats du même parti aux postes de gouverneurs.
Par curiosité intellectuelle, un juge ne peut se saisir d’une affaire, mais au plaignant de le saisir et à défaut de plaignant c’est le ministère public qui le saisit.
Les juges de la cour suprême ont d’abord jugé sur pièce les dossiers de candidatures et ont validé en l’état la première liste. Ensuite, ils ont été saisis par divers plaignants qui ont fait recours. Sur ce ils ont statué sur les recours et non sur l’ensemble du dossier.
Sur la présentation du recours d’El Maaceli, le procureur auprès e la cour aurait pu profiter de l’occasion des données avancées, pour saisir la cour pour fin d’invalidation des autres candidatures du parti JUWA aux postes de gouverneurs. Ne l’ayant pas fait, la cour ne saurait se saisir d’elle-même pour invalider les candidats de ce parti aux postes de gouverneurs. Le procureur pourtant, n’a pas manqué de diligenter une enquête supplémentaire, sur la patrimoine d’ l’ex-vice-président, jusqu’à obtenir les documents qui ont valu à sa disqualification.
Le corps électoral étant maintenant en mesure de choisir parmi les treize candidats à la présidence et aux 21 candidats, il est intéressant de voir comment les comoriens élisent leurs candidats.
En général le taux de participation se situe aux alentours de 70%, ce qui n’est pas négligeable. De ces comoriens qui se déplacent, 30% votent par conviction religieuse et juge sur pièce les candidats par rapport à leur pratique. Ils n’obéissent à aucune consigne de vote. Cette caste électorale est née dans les années 90 avec l’avènement de Taki. Ils ont fait élire Taki, Azali en 2001, Elbak, Sambi, Ikililou etc… Il y a 20% qui se déplacent par adhésion à une formation politique et 20% qui se déplacent en fonction d’une opportunité.
Chaque prétendant doit inscrire ses électeurs dans ces trois catégories et bâtir sa stratégie de campagne. Les plus riches achèteront les voix des 20% d’opportunistes, les plus religieux feront campagne sur la récitation du coran et les partisans se partageront les 20% de militants, sous le slogan nous avons la meilleure approche pour le pays. Cette sanctuarisation du corps électoral, a fait que les programmes sont rédigés à la hâte pour les besoins des réseaux sociaux, mais que les grandes lignes ne sont jamais que rarement reprises dans les discours des meetings.
Pour cette année nous allons assister à deux phénomènes nouveaux. Le premier, les faiseurs du roi ne sont ni candidats, ni opportunistes, ce sont des hommes de conviction. Comme cette élection se jouera à Anjouan, les hommes forts ne sont en mon sens : Mohamed Bacar et Ibrahim Halidi. Leur choix sera décisif car ils ont des militants fidèles.
L’invalidation d’Ibrahim Halidi à la candidature du gouverneur d’Anjouan pourrait sonner comme une double trahison d’Azali et libère ce dernier de la tutelle pour reconnaissance du choix d’Azali en 2006 qui s’est porté sur sa personne contre son propre vice-président Caambi El Yachourtui. Sa participation aux Assises, puis au référendum, lui a permis de s’affranchir de cette dette et prendre son envol.
Pour Mohamed Bacar, son exil forcé n’a jamais été avalisé par ses partisans qui sont nombreux dans l’ile. Ces élections sont une occasion rêvée pour ces militants pour régler à la fois leur compte contre JUWA et signer un pacte de retour du chef. A cet égard, le président Azali fait les yeux doux à ces deux hommes, Sarkozy à la Direction Régionale des Impôts et Halidi dans le premier cercle dans toutes les représentations.
Le second phénomène, est l’exacerbation de la population non habituée à voir des ex-dirigeants de très haut-rangs occupaient les bancs des accusés. Jusqu'à ce jour, les dirigeants détenus dans des prisons l’ont été pour des raisons politiques ou assimilées, cette fois-ci le discours ne passe pas tant les accusations sont flagrantes et il n’y a que leurs partisans à croire à la détention politique.
De cette situation, est née une détermination à en découdre avec le pouvoir. Cet état d’esprit conduit toutes les classes sociales à doubler de vigilance à tel point que même l’armée pourrait pour une fois, se plier au verdict des urnes.
Paris le 10/02/2019
Par Mohamed Chanfiou Ben Charafa
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