Sur le plan du droit positif, le recours diligenté par Mohamed Ali Soilih contre l’arrêt de la Cour suprême statuant en matière électoral...
Sur le plan du droit positif, le recours diligenté par Mohamed Ali Soilih contre l’arrêt de la Cour suprême statuant en matière électorale et arrêtant la liste définitive des candidats aux élections anticipées était recevable. Mais, droit dans ses bottes, la Cour bras armée du régime, continue à faire de la politique en rejetant cette demande.
Le recours en révision de Mamadou juridiquement recevable...
Le recours en révision de l’arrêt de la Cour suprême arrêtant la liste définitive des présidentiables aux élections anticipées de mars prochain de Mohamed Ali Soilih est sur le plan strictement juridique recevable. N’en déplaise aux juges et à ceux qui soutiennent le contraire. En effet, la Cour suprême dans sa section administrative est devenue juge électoral depuis la révision constitutionnelle de 2018.
En d’autres termes, elle est compétente pour instruire les demandes de candidature et en arrête la liste définitive des candidats habilités à concourir aux diverses élections.
Sur quelles dispositions juridiques se fonde-t-elle ? Sur ce point, des divergences apparaissent entre ceux qui considèrent que la Cour suprême devait rejeter le recours en se fondant sur l’article 96C selon lequel ses décisions sont insusceptibles de recours. D’autres comme Mohamed Rafsandjani soutiennent le contraire estimant que la décision rendue peut faire l’objet d’un recours en révision. Nous nous inscrivons parfaitement sur cette dernière position. En effet, la période transitoire au cours de laquelle la Cour suprême exerçait les compétences de la Cour constitutionnelle a pris fin avec l’adoption de la Constitution révisée.
Par conséquent, la loi organique relative à la Cour constitutionnelle a disparue avec la suppression définitive de celle-ci depuis ladite révision constitutionnelle, et en cela inapplicable. Il y a donc lieu d’appliquer les dispositions constitutionnelles en vigueur. Mais comment ? La Constitution révisée consacre la compétence de la Cour suprême en matière électorale dans son article 96. Mais ces dispositions sont en l’état inapplicables, puisque le même article in fine prévoit pour ce faire une loi organique devant fixer les modalités de son application. Cette loi n’a jamais été adoptée comme tant d’autres d’ailleurs.
Du coup, comme la nature a horreur du vide, la Cour suprême se fonde sur la loi organique de 2005 lui attribuant les compétences pour statuer. Cette loi organique prévoit ainsi cette possibilité de recours en révision dans ses articles 161 et suivants. D’ailleurs, la Cour ne pouvait pas faire autrement en l’occurrence puisqu’elle est déjà compromise. Elle continue à statuer nonobstant l’existence de la loi organique spécifique pour le contentieux électoral conformément à la Constitution révisée. Dans cette logique le recours de Mamadou était parfaitement fondé en droit et donc recevable.
... Mais politiquement inadmissible pour la Cour, bras armée du régime
Ce recours était pour des raisons politiques voué à l’échec devant une Cour qui a déjà montré sa disponibilité à défendre avec force les intérêts du régime en place au détriment du droit et de l’intérêt général. Peu importe les conséquences que telle décision pourrait engendrer. Mais comment des juges peuvent-ils se laisser berner par un imposteur ? Comment peuvent-ils se fonder sur des allégations mensongères sans preuves tangibles pour invalider un candidat à la magistrature suprême ? Pourquoi n’ont-ils pas procédé aux vérifications nécessaires avant de rendre leur décision ?
Bourhane Abdallah a sciemment menti à la Cour et celle-ci est tombée dans la boue, l’opprobre. Elle continuera pour longtemps à patauger. Mais maintenant que la vérité a éclaté au grand jour, que faire ? Rien puisque les sages ont décidé de manière conforme à la volonté de leur dieu sur terre, le président candidat.
Il fallait d’ailleurs s’attendre à un tel dénouement. Ce recours ne pourrait pas être accueilli dans la mesure où si la Cour jugeait en faveur de Mamadou en le rétablissant dans ses droits ce serait reconnaître son erreur aussi manifeste, grotesque soit-elle. Or justement le hold up était échafaudé en haut lieu pour neutraliser ce candidat potentiellement dangereux contre le dessein machiavélique de ce régime moribond. La Cour confirme qu’elle n’applique pas le droit mais qu’elle fait de la politique.
On peut regretter malheureusement que le droit soit tributaire de la volonté politique. A minima, on peut le concéder, mais l’admettre de manière générale, c’est faire montre de soumission à cette volonté qui, du reste, n’est qu’une volonté individuelle et non l’expression de la volonté générale. Or dans un Etat de droit, c’est la volonté politique et ceux qui la portent qui sont autant soumis au droit que les particuliers. Admettre une telle subjugation à une seule personne aussi éminente soit-elle cela signifie que la justice demeure sous ses ordres et donc elle est loin d’être indépendante. Les décisions qui seront rendues seront toujours marquées du sceau de la partialité et de l’injustice, donc contestables. Alors vaillant Peuple des Comores, réveillez-vous, avant qu’il ne soit trop tard !
ALI ABDALLAH Ahmed
Docteur en Droit public
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