En déplacement à Mayotte, le président de LR, Laurent Wauquiez a voulu ouvrir le débat sur le « droit du sol » dans l’île face au flux migr...
En déplacement à Mayotte, le président de LR, Laurent Wauquiez a voulu ouvrir le débat sur le « droit du sol » dans l’île face au flux migratoire. Mais si c'est de cela qu'il s’agit, la principale question qu’il faudrait se poser est celle du « droit de sol » du colonialisme français à Mayotte.
Laurent Wauquiez est venu à Mayotte pour soutenir le candidat LR pour les législatives partielles des 18 et 25 mars prochain. Il a rencontré des gendarmes, des policiers, des agents de la Police des Frontières mais aussi procédé à la mise en scène de rencontres « avec la population locale ».
Et dans cet « élan d’écoute » populaire Wauquiez a tiré des conclusions : « Je demande que sur Mayotte on sorte des conditions d’application du droit du sol et qu’on revienne à un principe de bon sens. Quand un enfant naît ici de parents clandestins ça ne peut pas aboutir à l’octroi de la nationalité française ». Voilà la recette miracle qu’il semble avoir trouvé pour répondre aux problèmes sociaux et économiques profonds qui affectent l’île.
En effet, Mayotte est un territoire submergé par la misère, conséquence directe de la domination coloniale française. Les salaires et les allocations sociales sont bien inférieurs qu’en France ; le PIB par habitant est de 6 575 euros – près de cinq fois moins élevé que dans l’Hexagone. Le taux de chômage est de 26%, contre 9,2% en France. Les services publics y sont dans un état catastrophique.
Parmi les personnes les plus précaires de l’île on retrouve une majorité de mahorais, immigrés sans-papiers, venus des pays limitrophes où le niveau de vie est encore plus bas. Certains y arrivent dans des embarcations de fortune en risquant leur vie, ce qui d’ailleurs a fait l’objet d’une « blague » du président Macron en juin dernier.
Ces conditions de vie déplorables peuvent parfois engendrer une certaine décomposition sociale, faisant que les pauvres se battent entre eux. Cette situation peut aussi amener à des mobilisations ambiguës et confuses mélangeant des revendications sociales à des revendications sécuritaires, comme on le voit depuis quelques semaines déjà sur l’île.
C’est sur les aspects sécuritaires que Wauquiez a voulu s’appuyer avec ses déclarations. Son intention est de canaliser le mécontentement populaire à propos de leurs conditions de vie vers une voie réactionnaire, en essayant d’opposer les travailleurs et les classes populaires à leurs frères et sœurs étrangers plutôt qu’à l’impérialisme colonialiste français, le principal responsable de la misère sur l’île.
Ainsi, il a continué sa rafale réactionnaire anti-immigrants : « Dix bateaux débarquent ici par jour ! On a des femmes qui viennent ici juste pour accoucher sur le sol de Mayotte. Des enfants qui sont nés à Mayotte servent ensuite à permettre le regroupement familial de toute la famille ». Et dans une mise en scène sur un barrage « au contact de la population » il renchérit : « je sais (?), pendant la période des vacances ils [les sans-papiers] se mettent là avec les départs volontaires pour qu’on leur paye les billets de vacances (!!) ».
Évidemment, avec ces déclarations Wauquiez ne cherche pas simplement à « donner un coup de main » à son candidat, ni même à gagner de la sympathie parmi la population mahoraise, il vise aussi à envoyer un message à l’électorat réactionnaire et xénophobe en France. En effet, depuis l’échec cuisant de LR à l’élection présidentielle et la crise interne qui en a suivi, la nouvelle direction du parti est rentrée dans une dynamique effrénée et désespérée pour attirer les électeurs du FN. Et cette nouvelle sortie raciste en fait partie.
Or, ce qu’il faudrait se demander sur la question du « droit du sol » que Wauquiez veut remettre en cause à Mayotte c’est : quel est le droit de sol que la France a à Mayotte ? Ce territoire faisait partie de l’archipel des Comores et a été colonisé au milieu du XIX siècle par la France. En 1974, lors du référendum sur l’indépendance des Comores la France a occupé cette île (la seule où le vote pour l’indépendance était minoritaire), violant ainsi les règles internationales qui impliquaient le respect des frontières coloniales ; ces règles, d’ailleurs, créées et imposées par les puissances impérialistes elles-mêmes.
L’importance stratégique d’un point de vue militaire et commercial de cette île coincée au milieu du canal du Mozambique pousse l’impérialisme français à garder ce territoire sous sa coupe, tout en imposant des conditions de vie désastreuses à sa population et en appliquant l’une des politiques les plus hostiles aux étrangers de tous les domaines coloniaux hexagonaux.
Par Philippe Alcoy ©Révolution Permanente L’importance stratégique d’un point de vue militaire et commercial de cette île coincée au milieu du canal du Mozambique pousse l’impérialisme français à garder ce territoire sous sa coupe, tout en imposant des conditions de vie désastreuses à sa population et en appliquant l’une des politiques les plus hostiles aux étrangers de tous les domaines coloniaux hexagonaux.