Réviser la constitution est-il une urgence inéluctable ? Créer des assises nationales est-il un mode opératoire démocratique ?

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Réviser la constitution est-il une urgence inéluctable ? Créer des assises nationales est-il un mode opératoire démocratique ?

Deux problématiques majeures qui nécessitent d’être débattues et analysées…

Dans toute société politique, il est normal qu’il y ait des dynamiques normatives puisque les réalités sociales, dans un sens global, évoluent et s’adaptent dans le temps. Ce n'est pas mauvais de réformer mais il faut réformer dans le bon sens des choses. En effet, le pouvoir de réviser une constitution est une prérogative constitutionnelle qui appartient concurremment au pouvoir exécutif et au pouvoir législatif selon une procédure bien définie. C’est le principe général que l’on trouve pratiquement dans tous les pays qui jouissent le phénomène démocratique.

 Cependant, il est bien aussi important de préciser que le pouvoir de réviser une constitution connait un certain nombre de limites parmi lesquelles il y a une limite de révision liée à la matière de la constitution. Comme par exemple la forme républicaine d’un pays, la tournante, le mandat présidentiel sont toutes des matières constitutionnelles. On ne saurait par exemple réviser la constitution des Comores pour changer la réforme républicaine de l’Union des Comores en une monarchie royale. Tout pouvoir politique ne doit guère franchir à cette limite. 

Pour répondre, dans une honnêteté intellectuelle possible, à la première question demandée, je pense que « réviser la constitution n’est pas une urgence inéluctable » sous réserve aux Accords de Fomboni de 2001. En effet, si on remonte un peu dans le temps, on va tous en constater que les Accords de 2001 ont contribué à une grande partie d’apaisement sur les plans politique et social notamment. Ce qui a en effet motivé beaucoup à cet apaisement politique et social ; c’est la naissance de la « TOURNANTE » dans la constitution de 2001 qui est d’ailleurs en application actuelle. Certes, il y a eu dans le temps des réformes constitutionnelles qui ont modifié certaines dispositions. Ce fut en ce sens l’avènement du référendum de 2009. Malgré ces modifications constitutionnelles en 2009 mais elles n’ont pas touché la disposition liée à la « TOURNANTE » qui est considérée, aux yeux du peuple comorien, comme vecteur de paix et de cohésion sociale. 

En plus, il est important de souligner qu’une constitution rigide telle que la nôtre ne doit pas être banalisée à chaque fois par des mesures de révisions constitutionnelles récurrentes. La rigidité d’une constitution signifie tout simplement que c’est « SACREE », difficile à réviser à n’importe comment et n’importe quand… Cependant, si la nécessité de réviser la constitution est profondément majeure, il faut dans ce cas situer les points capitaux qui seront ajoutés ou supprimés dans la constitution. Ces modifications ne doivent pas entrainer un changement de constitution. Autrement dit, la présente constitution doit continuer à primer tout en préservant surtout la disposition liée à la « TOURNANTE ». 

Une démocratie ne se limite pas seulement à un simple processus électoral mais elle tient compte aussi à d'autres enjeux importants qui permettent d'établir la paix et la stabilité sociale. Mais il est vrai que l'aspect politique occupe à nos jours une certaine prééminence voire même prévalence sur les autres aspects de la société. C'est pourquoi il est impératif et nécessaire de maintenir la " TOURNANTE " dans notre système électoral car celle-ci a beaucoup plus participé à la réduction des instabilités violentes politiques et sociales depuis sa mise en place. Avant la décennie 2000, il y a eu énormément des instabilités politico-sociales sans précédent à cause de la chaise présidentielle. On est venu à un stade que cette instabilité est presque neutralisée. Il n’est donc pas question de revivre encore une fois dans cette impasse dramatique qui a causé notre pays durant une vingtaine d’années de plus avant. 

Évidemment que l’on constate un certain nombre d’inconvénients sur la « TOURNANTE ». Et pour certains, ils la qualifient de destructrice à la démocratie en la limitant sous l’angle électoral. Mais il faut aussi savoir que dans toute chose, il y a à la fois des avantages et des inconvénients. C’est naturel… Mais il est toujours bon de mettre les deux dans une balance afin de savoir ceux qui constituent un lourd poids plus qu’autres. C’est justement dans cette logique que les avantages liés à la « TOURNANTE » prévalent beaucoup plus que ses inconvénients.

Vous regardez une démocratie américaine qui est d’ailleurs considérée comme le premier modèle démocratique universel subit également un certain nombre d’inconvénients en termes de processus électoral. Autrement dit, le système de « grands électeurs » révèle une certaine impasse majeure dans le choix définitif sur l’élection du président des Etats-Unis. Cela veut dire que ce système est dans une certaine mesure moins démocratique par rapport à une démocratie strictement normale. Or, c’est le même système qui a fait élire plus de 45 présidents depuis 1789 jusqu’à nos jours. 

En définitive, il ne faut pas s’acharner contre la « TOURNANTE ». On ne saurait permettre de réviser la constitution pour déconsolider la démocratie vers une calamité nationale. A chaque fois qu’on veut réviser la constitution c’est dans le dessin de consolider la démocratie par rapport aux institutions républicaines et aux droits et libertés fondamentaux des citoyens pour en assurer la stabilité politique et sociale. Par exemple redonner une autonomie considérable aux insulaires est une bonne chose. Car cela permettra non seulement aux élus insulaires de se sentir très responsables sur des enjeux importants qui ressortent directement dans leurs propres champs d’actions mais aussi d’exercer librement leurs prérogatives vis-à-vis du pouvoir central. Il y a par ailleurs la question liée à la décentralisation qui constitue aujourd’hui un élément important sur la mise en œuvre de la démocratisation des institutions étatiques. C’est ainsi que les lois organiques doivent jouer leurs rôles là-dessus. 

S’agissant de la deuxième question, je pense que l’idée de mettre en œuvre des assises nationales est tout à fait démocratique car cela va permettre aux différents acteurs de la société de discuter et débattre ensemble sur des questions d’ordre national et international du pays.

Mais comme les objectifs de ces assises nationales vont déjà dans le sens d’un projet des réformes constitutionnelles, il faut donc privilégier la SOCIÉTÉ CIVILE d'être la conductrice principale pouvant faire un bilan global sur l'évolution de notre société en termes des développements économique, social, politique. Evidemment, la Société Civile doit, à toute égalité, constituer des représentants pour chaque île afin de travailler harmonieusement sur les différentes questions qui les interpellent. Une fois ce faisant, celui-ci servira comme une référence qui pourrait, si c'est nécessaire, faire l'objet d'une révision constitutionnelle à travers une procédure normale (mais cela dépend aussi des dispositions ou matières qui sont envisagées à supprimer ou à ajouter dans la constitution). Néanmoins, dans telle une perspective, la voie référendaire (le vote du peuple) est la plus et mieux légitime pour apprécier une telle problématique puisque cela relève profondément sur des questions sensibles pour le peuple comorien dans son indivisibilité. Le rôle que va jouer la société civile sera essentiellement important. Ainsi, il faut que le gouvernement accepte de donner les moyens nécessaires (matériels, financiers etc.) à cette institution citoyenne pour qu’elle puisse bien mener et parfaire sa mission sur ce processus. Toutefois, c’est à la Cour Constitutionnelle de décider le nombre des représentants que va constituer la société civile à travers une note authentifiée par le président de la Cour Constitutionnelle. 

A titre d'exemple, la République du Bénin est l'un des pays en Afrique qui laisse souvent le soin à la société civile béninoise d'analyser et discuter sur des questions liées à des réformes constitutionnelles avant que celles-ci soient entérinées ou non par l'organe habilité. Cette pratique existe depuis la mise en œuvre d'une Conférence Nationale suivant la décennie 1990. Ce qui fait qu’il est très difficile au Bénin de réviser la constitution même si le pouvoir de réviser la constitution appartient concurremment entre l’exécutif et le législatif. Les deux pouvoirs peuvent en effet avoir par chacun l’initiative mais en ce qui concerne les expertises relatives à l’amendement reviennent à la commission nationale (En l’occurrence à la société civile) d’en tirer les différentes solutions meilleures. Le but c’est d’empêcher toute manœuvre de violation de la constitution ainsi qu’un renforcement des pouvoirs personnels. En dernier ressort, la juridiction constitutionnelle s’engage à veiller au respect de la constitution. 
C’est pour dire que la société civile représente directement le peuple plus que les députés puisqu'elle veille et défend impartialement les intérêts nationaux et non partisans d'un groupe au pouvoir ou d'une opposition d'un ou des partis politiques. Il faut que le régime en place soit totalement à l'écart que possible dans ces assises même s'il est l'initiateur du projet. Autrement dit, il doit, à la limite des choses, avoir un droit d’une simple observation passive tout au long de l’aboutissement de ces assises. Pourquoi ?...Parce qu’il faut reconnaitre que tout gouvernement a comme objectif principal de se pérenniser au pouvoir par tous les moyens que ce soient légaux ou illégaux. C'est une évidence réelle dans une logique politique que le gouvernement se bat pour rester au pouvoir. Donc c'est une prudence nécessaire qu'il faut y avoir tous pour face à toute manipulation ou influence de la part du régime en place.

Voici l’économie de ma réflexion par rapport aux enjeux actuels de notre pays.

Par TOIOUILOU DHOIHAROU, Etudiant comorien de Master en Science Politique
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