Dans les années 1989-1990, après l'assassinat du Président Ahmed Abdallah perpétré par les mercenaires en connivence avec Bob Denard ...
Dans les années 1989-1990, après l'assassinat du Président Ahmed
Abdallah perpétré par les mercenaires en connivence avec Bob Denard et en sa présence d'ailleurs, ayant constaté l'incapacité du gouvernement intérimaire de poursuivre Denard et ses sbires, j'avais recommandé à Salim Ahmed Abdallah, le fils du Président défunt, d'entrer en négociation avec Maître Jacques Vergès afin qu'il assure le suivi des suites pénales de cette affaire. Il convenait en effet de défendre la mémoire du Président assassiné et dans le même temps de poursuivre Denard et ses mercenaires. C'était la moindre des choses.
Photo d'archives. Ikililou et Azali à Mohéli |
La rencontre avec Jacques Vergès fut donc organisée et un accord
tacite stipulait que l'avocat examinerait les dispositions à suivre
afin de poursuivre Denard et ses sbires devant les tribunaux français. A cet égard il convient de rappeler que le Président Abdallah, comme beaucoup d'autres comoriens, disposait également de la nationalité française.
C'est peu dire que Salim Abdallah fut alors mis sous pression par les "Amis des Comores" qui jouaient quelque rôle au sein de la haute administration française. Le choix de Maitre Vergès inquiétait.
L'avocat des causes perdues était bien connu pour ne reculer devant rien et certains semblaient craindre une éventuelle mise en accusation de la France par Vergès qui aurait pu évoquer une complicité de la France, dés lors responsable de cet assassinat.
Salim Abdallah décida de renoncer à charger Maître Vergès de le
représenter. La déception fut grande.
Ce qu'il est particulièrement intéressant de souligner ici, c'est bien
sûr la réaction de Maître Vergès. L'homme était aussi un adversaire
farouche de l'inique et il avait un jugement qui voyait loin. Il me
confia que d'après lui si Denard n'était pas poursuivi en France,
alors il était certain qu'il retournerait aux Comores afin de
déstabiliser un Etat qu'il savait fragile. Ne pas poursuivre Denard
était à ses yeux une faute devant l'Histoire.
Faut il simplement rappeler ici que la Vision s'avéra prophétique,
Denard fut derrière la tentative de coup d'état, il agressa une
nouvelle fois le pays, la destitution et l'exil du Président élu S.M.
Djohar en fut une triste conséquence.
Si j'écris aujourd'hui ce message, c'est pour enrichir notre réflexion commune. Des faits graves se sont produits au cours de ces dernières années. Jamais les actes de corruption n'avaient atteint une telle ampleur. Les plus hautes personnalités de l'Etat furent impliquées, les sommes volées représentent des dizaines d'années du budget de l'Etat! Il est interdit de passer sous silence des actes aussi monstrueux, c'est interdit au nom des centaines de milliers de comoriens qui manquent de tout et n'en peuvent plus.
C'est interdit parce que si rien n'est fait cette corruption
s'installera encore pour de nombreuses années dans notre paysage, s'il n'y a pas de suite judiciaire ces gens là recommenceront encore et toujours. Il faut donc créer une commission d'enquête objective et indépendante, définir les sommes détournées, en poursuivre le remboursement , juger sévèrement les prédateurs nationaux, professionnels du mensonge. Il convient de le faire sans délai et sans complaisance.
Le sommet Afrique France qui se joue actuellement à Bamako doit nous ouvrir les yeux. La corruption est un crime. La délinquance en col blanc est un crime. Si elle n'est pas combattue elle se transforme en gangrène. Le pardon devient une faiblesse coupable quand on parle de centaines de millions de dollars détournés. Demain les Partenaires au développement nous regarderont autrement si nous sommes fermes sur les principes, si nous faisons des exemples, ce sera un pas de plus vers l'état de droit et la démocratie.
Said HILALI
14 janvier 2017