Changer la donne A l’occasion de son investiture, SEM le Président Azali Assoumani a promis à la population comorienne d’œuvrer de tout...
Changer la donne
A l’occasion de son investiture, SEM le Président Azali Assoumani a promis à la population comorienne d’œuvrer de tout son possible pour jeter les bases nécessaires à la graduation des Comores en pays émergeant.
Les Comores se situaient en 2015 au 21ème rang des pays plus pauvres du monde avec un PIB par habitant de 736,8$US pour une population de près de 800 000 habitants. Il est à rappeler que Singapour avait en 1968 un PIB par habitant de l’ordre de 458 $US. Ce pays appelé aussi la Cité-Etat disposait en 2015 d’un impressionnant PIB par habitant estimé à 55,000 $US. Le même pays dépendait en 1968 de la pêche et du commerce du coprah.
En 2016, Singapour rayonnait d’une économie florissante couronnée par le statut de 1ère place financière du monde après la Suisse et de deuxième port mondial après celui de la Chine. Les Comores ont le potentiel de sortir des rangs des pays les plus pauvres par la transformation et la restructuration de son tissu économique, encore basé et dominé par l’agriculture de subsistance, les petits services, la pêche artisanale et l’exportation des produits de rente que sont la vanille, le girofle et l’ylang ylang.
Il n’est jamais trop tard pour bien faire dit le dicton. Les Comores paient aujourd’hui le prix fort de la dépendance quasi exclusive de son économie par rapport au commerce des produits de rentes pendant les 40 ans d’indépendance. Les Maldives, comme les Seychelles et l’Ile Maurice, ont amorcé leur politique de diversification depuis les années 70. Les Maldives se sont spécialisées très tôt dans le tourisme contre les recommandations du PNUD en 1970. Le pays compte aujourd’hui 89 stations balnéaires, un PIB par habitant de 6153.86 $US en 2014 et est classé parmi les plus grandes destinations touristiques mondiales avec un total de 1,205,000$US.
L’Ile Maurice abonde pour sa part un PIB par habitant de 7116.59 $US et plus de 1,200,000 touriste annuel et une place financière de rang mondial, alors que le pays était selon un rapport britannique condamné aux sous-développement avant la prise de son indépendance.
Ces exemples montrent si besoin est que la diplomatie économique, lorsque bien réfléchie, articulée et bien pensée peut aider à changer la donne économique du pays et son paysage entier en quelques décennies. Les Comores ont tout intérêt à s’inspirer de ces francs succès et à se trouver une feuille de route et un modèle engagé pour sa diplomatie économique.
Repenser le rôle et la participation des Comores dans les échanges mondiaux de services avancés
LE PAYS A UNE OCCASION BÉNIE DE REPENSER LES TERMES ET L’ETENDUE DE SON AVANTAGE COMPARATIF DANS LE CONTEXTE DE SON INDÉPENDANCE ET DU NOUVEL ORDRE MONDIAL
La spécialisation du pays dans le commerce des produits de rente est une conséquence de la spécialisation imposé par les autorités coloniales, se basant sur les principes que les pays colonisés devaient selon la théorie ricardienne de l’avantage comparatif des pays dits du sud à se spécialiser dans les échanges des matières premières et les pays dit du nord dans leur transformation.
Cet ordre mondial a eu pour conséquence historique de spécialiser les uns dans la pauvreté et le sous-développement, et les autres dans développement et le progrès. Le Japon fut la première nation à questionner ledit ordre mondial et à s’industrialiser par la suite, suivi de Hong Kong, Taiwan, Singapour, Malaisie, Thaïlande, Indonésie, Brésil, Mexique et plus récemment le Rwanda, l’Ile Maurice, les Emirats Arabes Unis, etc.
Les Comores sont encore enfermées dans l’orthodoxie ricardienne et sont dès lors plus exposés au chômage, au sous emplois, à la dépréciation du pays et au final à la perception par l’étranger, et surtout par les investisseurs, d’un pays sclérosé, figé dans le temps, peu ouvert au progrès et à la modernité.
Cette image et perception adverse explique en partie pourquoi le pays n’attire pas autant d’investisseurs et de bailleurs de fonds qui aspirent à s’associer à la performance, à la modernité et au progrès.
Identifier et déterminer les niches potentiellement porteuses pour le pays
LES SERVICES AVANCES ET L’INDUSTRIE DE LA REEXPORTATION ONT LA FAVEUR DES INVESTISSEURS ET DE LA DIPLOMATIE ECONOMIQUE DANS LE MONDE ET AUX COMORES
Les Comores ne peuvent aspirer à sortir du statut des pays les plus pauvres du monde et à devenir un pays émergent sans la contrepartie de moderniser son tissu économique en se spécialisant davantage sur les échanges à revenus croissants au des échanges présents à revenus décroissant que sont les petits services et les produits de rente.
Le pays se trouve dans l’impératif de s’engloutir sans délais les nouvelles niches qu’offrent la mondialisation et le nouvel ordre économique qui redistribue les cartes selon une logique accrue de déconcentration, de décentralisation et de délocalisation des centres de production, de services et de marché.
Les Comores font parties de la COI, du COMESA, de la ligue arabe, de l’Union Africaine, et se trouve de surcroît dans le canal de Mozambique, dont les experts en géostratégie n’hésitent pas à qualifier de futur eldorado en raison de ses réserves de gaz et de pétrole.
Modifier les orientations économiques et commerciales du pays
Le pays se doit de sortir de l’économie primaire caractérisée le commerce des produits rentiers pour se projeter dans les économies à moyenne et haute valeur ajouté s’il veut remplir ses obligations de sortir de la pauvreté et de devenir à terme un pays émergent.
Les services avancés et l’industrie de la réexportation sont les avenues les meilleures pour placer le pays sur les rampes du progrès et de la croissance accélérée. Les services avancés comprennent des secteurs aussi variés que la banque offshore, les centres d’appels, le tourisme, le paiement électronique, l’e-santé, etc.
La banque offshore représente un capital financier notoire pour l’Ile Maurice qui grâce au dispositif agrée par la Banque Centrale a capté en 2013 plus de 300 millions de dollars réinvestis en grande partie en Inde et dans le financement de l’Economie mauricienne. Cinq pays dont l’ile Maurice, l’Uruguay, les Emirats Arabes Unis, la Géorgie, et les Seychelles, se taillent le marché pour ce qui concernent les pays en voie de développement et émergents.
Les Philippines emploient plus de 1,2 million de personnes dans les centres d’appel qui contribuent à 8% du PIB. Les Comores peuvent modestement se positionner sur ces marchés en croissance et tirer elle aussi les bénéfices de la mondialisation et des échanges mondiaux.
A l’instar de Singapour et de Dubaï, les Comores peuvent elle aussi exploiter la position stratégique de l’archipel dans le canal de Mozambique pour servir de port de ravitaillement des pétroliers croisant la zone. Le pays peut aussi servir de port de réexportation vers la sous-région (COI et COMESA), les pays de la Ligue arabe, l’Union Européenne, et les Etats Unis.
Grace à la diplomatie économique que le pays pourrait engager avec ses partenaires politiques, économiques et commerciaux, les Comores pourraient à terme devenir une plaque tournante essentielle dans la région et attirer pour les besoins un flux d’IDE tout aussi important que l’ile Maurice et les Seychelles.
Tirer les bénéfices de la mondialisation au lieu de la subir
Le pays a le potentiel sans en douter de devenir dans les années à venir un centre névralgique pour la rencontre entre l’offre et la demande mondiale de services financiers, de tourismes, de produits à valeur ajoutée et de services avancés, susceptibles de sortir le pays de la pauvreté et de le mettre sur les rails des pays émergents.
Ces initiatives appuyées par la diplomatie économique contribueraient à adresser les problèmes du sous-emploi ainsi que du fonctionnement effectif de l’administration publique et de l’image du pays dans le monde dans le contexte d’améliorer les conditions de vie des Comoriens, d’augmenter leurs revenus et d’offrir au pays de meilleures perspective de développement, de progrès et de changement.
Le pays devra néanmoins devenir un pays où il fait également vivre pour importer les talents qu’il lui faudrait pour tirer le maximum de bénéfice des IDE à mobiliser, faciliter le tourisme, améliorer le système éducatif et prévoir les logements décents aux milliers d’étrangers qui y viendraient travailler dans le tourisme, les finances, la logistique, l’éducation, etc., ou qui y viendraient investir comme cela se passe aux Seychelles où le secteur du tourisme emploie 50% d’étrangers et 50% de locaux, ou à Singapour où les étrangers représentent 45% de la population, soit 2,5 million contre 3 millions de Singapouriens.
Abdoul Anziz Said Attoumane