Monsieur IMAM Abdillah, vous êtes un référent incontournable de la région de l’océan indien. Vous êtes aussi le Point focal national de l’O...
Monsieur IMAM Abdillah, vous êtes un référent incontournable de la région de l’océan indien. Vous êtes aussi le Point focal national de l’Organisation internationale IORA depuis notre adhésion jusqu’aujourd’hui, pouvez-vous nous dire de quoi il s’agit exactement ?
- L’IORA ou Indian Ocean Rim Association, est une Organisation internationale à vocation régionale regroupant 21 pays de l’océan Indien : Comores, Madagascar, Maurice, Seychelles, Afrique du Sud, Mozambique, Tanzanie, Kenya, Somalie, Oman, Emirats arabes Unis, Iran, Inde, Sri Lanka, Bangladesh, Singapour, Thaïlande, Malaisie, Indonésie, Yémen et Australie. Elle a été créée en 1997 et les Comores sont membres depuis 2012.
Mais comment une Organisation de 21 Etats peut-elle être inconnue, alors que la COI est plus visible ?
- Je comprends votre étonnement. D’ailleurs, la rendre visible et lisible, vulgariser sa valeur ajoutée est une de mes priorités. Je me suis lancé le défi de faire d’elle, une Organisation proche du peuple comorien et connue de tous. A partir du mois d’août prochain, la machine sera lancée en amont d’un grand rendez-vous régional au mois de septembre de cette année. Pour revenir à votre question, il faut savoir que la COI a de gros bailleurs, au premier rang duquel l’Union européenne, qui financent des projets sur le terrain. L’IORA, en revanche n’a que des partenaires au dialogue. La Coopération au sein de l’IORA s’inspire du nouveau concept de coopération Sud-sud, basée sur le partage et les échanges dans le respect de la souveraineté des Etats et de leur intégrité territoriale. Les fonds proviennent des Etats eux-mêmes, et un peu souvent de certains Partenaires, notamment la Chine qui participe activement au programme de développement durable, une sorte de fonds spécial pour le soutien aux pays en voie de développement.
Quels sont ses domaines d’intervention ?
- Globalement, les secteurs prioritaires de l’IORA sont la Pêche et l’aquaculture, la facilitation des échanges économiques, la coopération touristique, académique et scientifique, les énergies renouvelables, la sécurité maritime et l’autonomisation des femmes. Seulement, cette coopération est longtemps restée à un stade théorique, se limitant à des ateliers et des renforcements de capacités. En 2015 à l’Île Maurice, les Ministres réunis, conscients des opportunités que peut nous offrir l’océan, ont voulu donner une nouvelle impulsion à l’Organisation. Ils ont inauguré une nouvelle ère de la coopération régionale, qui prend en compte les atouts de la mer, cette richesse qui nous lie.
Voulez-vous dire que l’IORA a changé sa politique ?
- Pas du tout. L’Organisation a juste pris un nouvel envol d’une coopération pragmatique. On parle de l’Economie bleue. Il s’agit désormais de faire de notre océan, un levier de développement économique durable. Concrètement, il est question de coopération basée sur : la Pêche et l’aquaculture, les échanges maritimes, les énergies océaniques renouvelables, l’exploration des dépôts marins et minéraux, le tourisme côtier et la sécurité maritime. Les Comores se sont beaucoup impliquées dans ce nouveau cadre de coopération. Le discours du Ministre à cette rencontre, avait interpellé les Etats membres qui ont manifesté leur disponibilité à soutenir le pays. C’est pour cette raison que nous accueillerons l’atelier du mois de Septembre sur la Pêche, l’aquaculture et la manutention des fruits de mer, grâce à un fonds de soutien accordé au pays.
Qu’en est-il de la question de l’Île comorienne de Mayotte dans cette Organisation ? Il nous parvient que la France est membre de l’IORA ?
- Dans l’IORA comme dans toutes les Organisations internationales, l’intégrité territoriale des Comores s’étend sur les contours définis par la résolution 3291 et surtout 3385 (XXX) du 12 Novembre 1975 des Nations Unies. La Charte de l’IORA est claire. En mars 2017, la signature d’un cadre général par les Chefs d’Etat marquera davantage cette solidarité dans la défense de l’intégrité territoriale de nos pays respectifs. Toutes les précautions ont été prises pour le respect systématique de l’intégrité territoriale des Etats membres. Concernant votre 2ème question, je vous ai cité les 21 Etats membres de l’IORA. La France n’est qu’un Partenaire au dialogue au même titre que les USA, la Chine, le Japon, l’Allemagne, l’Egypte et le Royaume-Uni. Il n’y a aucune porte ouverte à cette éventualité.
Un dernier mot ?
- Ce serait peut-être de vous informer que le développement du pays est une réalité qui commence à prendre forme. Je suis personnellement convaincu que ce développement émergera de l’océan. Par-delà nos relations avec nos pays amis traditionnels, nous devons fortement nous impliquer dans la coopération de proximité avec les pays riverains de l’océan indien, avec lesquels nous partageons cette richesse. L’IORA est pour moi, l’Organisation internationale qui répond le mieux aux aspirations du peuple et à l’économie du pays. C’est l’Organisation des Organisations à plus d’un titre :
- D’abord, parce que les pays de la côte Est africaine, vers lesquels les Comores doivent se diriger, sont membres. Le Mozambique sera dans les décennies à venir l’un des pays les plus riches au monde.
- Ensuite, les pays arabes avec lesquels le pays entretient de bonnes relations, sont également membres.
- Puis, vous avez des pays émergents comme l’Inde et l’Afrique du Sud, mais aussi un grand pays comme l’Australie.
- Après, vous avez les pays de l’Asie du Sud-Est qui ont de fortes potentialités économiques et une expérience avérée dans le commerce maritime. Ces pays-là sont également membres de l’ASEAN qui est une des organisations d’intégration régionale les plus importantes.
Si les Comores arrivent à s’imposer dans cette Organisation et à faire valoir ses intérêts, le décollage économique sera effectif. C’est mon plus grand souhait. D’ores et déjà, un Comité national a été mis en place comme force de proposition. Il constitue un socle d’intérêt économique, impliquant toutes les différentes parties prenantes pour aider à la formulation d’une stratégie nationale Economie bleue. Le premier Sommet des Chefs d’Etat en mars 2017 en Indonésie, sera une occasion pour le pays de s’engager vers cette dynamique. Restons optimistes.
Recueillie par IBN