Il a été retrouvé mort il y a deux mois, par hasard, dans sa chambre universitaire de Villeneuve-d’Ascq. Ce Mahorais de 22 ans était sans d...
Il a été retrouvé mort il y a deux mois, par hasard, dans sa chambre universitaire de Villeneuve-d’Ascq. Ce Mahorais de 22 ans était sans doute décédé depuis plusieurs semaines. Il vivait sur le campus depuis deux ans mais n’a laissé aucun souvenir à personne. Isolé, sans le sou, il a simplement disparu.
Il repose sur sa terre, au milieu de l’Océan indien. Mais sans pierre tombale, anonyme. Faute de moyens. La dernière demeure d’El Anfani Abdallah est à son image : discrète jusqu’à la transparence. Pourtant, le 8 décembre, ils étaient nombreux à le mettre en terre. Pour accompagner sa dépouille jusqu’au cimetière, une rangée de jeunes Mahorais arboraient des tee-shirts étonnants. « Klin » pouvait-on y lire, « parce que cette histoire n’est pas propre, la vérité n’est pas dite, la justice pas rendue », soutient Anli Madi Ngazi, président de l’association But étudiant mahorais.
La mort d’El Anfani, à 8 000 km de chez lui, a semé le trouble à Mayotte. Manque de formations supérieures sur l’île, prétendues incompétences de l’administration mahoraise, dédain supposé de l’État vis-à-vis de ce Français du bout du monde... C’est la déclaration de sa maman aux médias locaux, début novembre, qui a mis le feu aux poudres : son fils serait mort de faim.
Plus un sou pour se nourrir
El Anfani l’appelait régulièrement au secours, lui affirmant qu’il n’avait plus un sou pour se nourrir. Elle avait alerté l’administration mahoraise, pris contact avec des associations étudiantes. Tous ont réagi avec plus ou moins de rapidité. Aucun n’a réussi à extirper El Anfani de son marasme. Il avait bien été hospitalisé quatre jours, en juin, pour « grève de la faim ». Mais vite renvoyé à sa chambre du campus. En fait, le jeune homme était comme prisonnier de ces 10 m2.
En janvier 2014, il disparaît des registres de la fac
Il était arrivé à Villeneuve-d’Ascq en novembre 2013 pour étudier les sciences économiques. Un choix courageux pour ce jeune de 20 ans qui avait obtenu un bac professionnel. Il s’était installé dans une chambre de la résidence Galois, témoin décrépi de la construction du campus dans les années 1960. Il bénéficiait d’une bourse du CROUS pour poursuivre ses études. À partir de janvier 2014, il disparaît des registres de la fac. Aucune inscription en 2014-2015, ni cette année. Donc pas de bourse, pas de billet retour possible à Mayotte. Malgré ses retards de loyers importants, malgré l’absence de justificatifs sur sa scolarité, le CROUS l’autorise à garder sa chambre universitaire. Elle sera sa dernière demeure.
Les raisons du décès inconnues
On ne pourra jamais affirmer qu’El Anfani Abdallah est mort de faim. Ni même quand il est mort. L’autopsie, les analyses post-mortem ont juste permis de certifier l’absence de coups ou de blessures. La République, par la voix du procureur de Lille, ignore officiellement les raisons du décès de ce jeune de 22 ans. Son corps a été retrouvé par hasard le 28 octobre, suite à une campagne sanitaire du CROUS. Sous ses couvertures comme sur le campus, il ne restait déjà rien du jeune homme qu’il avait été. Publié par Nord Eclair avec habarizacomores