On a déjà élu un président pour 4 ans, il s'est prolongé d'un an son mandat sans que cela ait empêcher la terre de tourner. Rallonge...
On a déjà élu un président pour 4 ans, il s'est prolongé d'un an son mandat sans que cela ait empêcher la terre de tourner. Rallonger de quelques jours, voire de quelques mois, le mandat actuel, pour trouver une solution durable à l'équité des îles, serait une solution sage.
Le bilan des quarante années d'indépendance, se résume à quelques lignes : six mois de révolution, deux ans de dictature, dix-huit ans d'occupation, six ans d'anarchie et vingt ans de séparatisme. Nos meilleurs littéraires trouveraient quelques lignes à rajouter pour faire une page; par contre, notre avenir commun est la principale préoccupation à mon sens. C'est en cela, que je suis favorable à des Assises Nationales pour préparer et garantir cet avenir. Il n'est plus besoin de confondre course et précipitation?
On est nombreux à citer comme exemple de développement les Seychelles, pour prouver que le coup d'état de France Albert René n'a pas empêché son évolution. Mais personne n'évoque le caractère pragmatique des Seychellois, qui manque aux Comoriens. Un exemple vient étayer ma démonstration. En 1992, les Seychelles comme les Comores décident de convoquer des conférences nationales pour sortir de leurs crises. Aux Seychelles, les délégués à la conférence, étaient élus à la proportionnelle intégrale par listes, aux Comores, chaque formation qui avait déposé une copie de statut à la préfecture, a eu droit à un délégué. Conclusion, les Seychellois ont choisi la voie qui était la meilleur pour leur Nation, les Comores ont accouché d'un texte sans tête ni queue, qui empêchait même l'organisation d'une élection présidentielle, par le seul fait que les candidats devaient être parrainés par 12 élus par île, alors que Mohéli n'en comptait que 5. Il fallait être vraiment comorien pour ne pas comprendre cela. La suite, on la connait, déportation du Président, puis autre conférence nationale.
Au jour d'aujourd'hui, si l'on se posait la simple question, en quoi le conseil constitutionnel et le CENI seraient-ils cette fois-ci plus honnêtes que leurs prédécesseurs, pour organiser des élections impartiales, libres et démocratiques? Personne ne peut garantir une réponse. Le coup de maître du Conseil Constitutionnel sur les élections du bureau de l'Assemblée Nationale est la bonne illustration. Invalider des élections l'avant-veille de l'ouverture de l'Assemblée, sans donner obligation de désigner leurs remplaçants avant l'ouverture de l'Assemblée, pour que celle-ci soit au grand complet, démontre qu'il y a des limites de confiances que nous devons reserver.
Partant de ce constat, je reviens à une interview que j'ai accordé au journal « le Matin des Comores » en 2002, suite aux querelles, qui opposaient les Présidents Azali et Elbak sur l'application de l'article 9 de la constitution. Le Président Azali, a compris au dernier moment, que ses délégués au comité de suivi étaient incompétents et n'avaient rien compris des sens des mots. Il a racheté le chef de la délégation de l'opposition pour faire croire à une unanimité, puis a fait usage de la force de l'armée pour imposer un point de vue contraire aux aspirations légitimes des populations des îles.
C'est pourquoi, j'avais déclaré que le comportement de l'Union était de nature à replonger le pays, dans une nouvelle zone de turbulences. A l'arrivée au pouvoir de A. A. Sambi, Mohamed Bacar, qui a bénéficié durant quatre ans, de l'application à l'esprit et à la lettre de la constitution, avec sa gendarmerie pour le maintien de l'ordre, des sociétés régionales, a franchi à son tour le pas qu'il ne fallait pas commettre, à savoir l'obstruction de la libre circulation des biens et des personnes. La suite, un débarquement des forces de l'Union.
Si certains aujourd'hui parlent de stabilité retrouvé, c'est parce que Ngazidja a accepté une spoliation budgétaire qui vient d'atteindre ses limites avec le cas de la question de l'eau au Centre de la Grande Comore. Dans un pays normal, où les dirigeants seraient nationaux plus tôt qu'îlois, le Ministre de l'énergie ferait acheter un groupe électrique de secours pour le pompage de la seule station d'alimentation en eau de l'île. Cette question cruciale n'est même pas une préoccupation gouvernementale, tant que les camions citernes de l'Armée, alimentent les gouvernants à leur domicile.
L'unité des Comores, aujourd'hui, relève de la seule volonté des Grands-comoriens, qui paient la dette, qui versent la totalité du budget de l'Union, et à combler les budgets des autres îles. Cette attitude est d'autant illusoire que les deux îles Anjouan et Mohéli jouissent d'une partie de leurs autonomies tandis que celle de Ngazidja est complètement confisquée et ceci en violation des articles 7-3 et 9 de la constitution. Le ministre de l'intérieur nomme des préfets, alors que les collectivités régionales sont de la compétence exclusive des îles. En violation de l'article 12 qui confère à l 'Union la défense extérieure, on voit les ministres de l'intérieur envoyer des gendarmes pour le maintien de l'ordre alors que cela relève de la compétence des îles.
Depuis 2001, l'Union a refusé de créer une fonction publique territoriale, qui serait la première marque de l'autonomie des îles. La contribution au quote-part des recettes publiques est transformée en partage au prorata, les sociétés d'états qui conformément à l'article 11 de la constitution, devaient céder la place à des sociétés iloises comme à Anjouan, sont restées de vaches à lait du gouvernement. De l'équité des îles, qui fut la cheville ouvrière de cette constitution de 2001, dans sa lettre comme dans son esprit, il est mis en place une égalité des îles si ce n'est une suprématie de l'île de la Tournante. Alors, allons nous prendre le risque d'organiser une élection présidentielle sans avoir dépoussiéré tout cela? Allons-nous, encore une fois rater ce rendez-vous, devant permettre de définir une fois pour toute, le sens de la réelle participation de toutes les îles, à tous les échelons des décisions de la Nation, afin de garantir une harmonie capable de bâtir une vraie Nation?
Il est à craindre, quoi que l'on puisse raconter, sans une clarification suivie de gardes fous avant ces présidentielles, le pays va tout droit à l'implosion. Ngazidja est cette fois-ci vaccinée et son réveil risque d'être douloureux et irréversible. Et ce ne sont pas les arguments qui manquent.
Un bilan de tout cela s'impose, et le fait que ce soient les plus sages d'entre nous, ceux à qui, ils restent de brins de patrie soit à l'avant-garde de cette cause, j'adhère sans hésitation. Faute de quoi, ceux qui pensent nous jouer le tour d'Ikililou, non élu, mais président pendant cinq ans, en auront pour leurs frais et le pays paiera l'addition. M, Carvallo, ancien Représentant du PNUD, au plus haut du séparatisme, a dit avant la tenue de la conférence d'Antananarivo : « Quoi qu'il advienne, Ngazidja paiera l'addition ». Depuis, l'addition est plus salée. Comme disait le slogan de l'ASEC : « Personne ne peut empêcher le soleil de briller », alors mettons-nous à l'abri sous les arbres avant qu'il ne soit trop tard.
Paris le 25/09/2015.
Mohamed Chanfiou