Rien n’interdit au chef de village de siéger au sein du conseil municipal. Surtout pas la loi. En tout cas pas celle relative au scrutin co...
Rien n’interdit au chef de village de siéger au sein du conseil municipal. Surtout pas la loi. En tout cas pas celle relative au scrutin communal et celle portant code électoral en Union des Comores, lesquelles ont largement consacré ce droit. Il faut être de mauvaise foi ou animé par une volonté de semer la discorde et de susciter la confusion pour nier l’évidence. Car, ensembles les dispositions des articles 24 de la loi sur le scrutin communal et 194 de la loi relative au code électoral prévoient, de façon claire et sans équivoque, que les Chefs de quartiers et de villages, désignés conformément à la tradition de leur village, sont de droit membres du Conseil communal de la commune dont relève leur village et leurs sièges s’ajoutent au nombre de siège impaire établi par la loi.
Contrairement aux affirmations de certains commentateurs, les chefs de village participent pleinement aux délibérations des conseils, ainsi qu’à l’élection des maires et des adjoints.
C’est le législateur qui en a décidé ainsi, puisque la loi sur le scrutin communal dispose, dans son article 24 alinéa 2, que ces conseillers municipaux (les chefs de village) jouissent des mêmes droits et obligations que les autres membres du conseil municipal. Les seules restrictions imposées par la loi sont l’incompatibilité des fonctions de chef de village et celles de maire et le fait que la perte des fonctions de chef de village entraîne automatiquement la perte de celles de conseiller municipal.
Image d'illustration. ©Soilihi Said Soilihi |
Il faut qu’on arrête de vouloir saucissonner les lois et de les raboter au gré de l’humeur et eu égard aux intérêts du moment. Il faut que nos vaillants politiques arrêtent de chercher à dévoyer la loi, expression de la volonté générale, en préconisant à chaque bout de champs le consensus. Comment peut-on affirmer qu'on vient de découvrir que le chef de village est membre de droit de sa commune, alors que cette loi sur le scrutin communal est votée en avril 2011 et promulguée en juillet de cette même année. Et ce n'est pas un seul article qui est consacré au chef du village, mais un chapitre entier (le chapitre 6) composé de quatre articles (les articles 24, 25, 26 et 27) et la loi relative au code électoral de 2014 en a repris les dispositions pertinentes. Comment préconiser la révision d’une loi votée et promulguée il y a plus de quatre ans au moment où on veut l’appliquer pour la première fois ? Une révision de cette loi dans le seul dessein d’écarter les chefs de village est inopportune ; si elle était faite, comme certains le préconisent, elle devrait s'appliquer à la prochaine mandature.
Il ne faut pas oublier que le village, socle de la tradition comorienne, est reconnu comme une unité administrative et la commune n’est qu’une somme de plusieurs villages. Comme l’a si bien dit M. Modibo Keita, le premier président de la République du Mali, le village est chez nous la cellule de base et c’est la vitalité de cette cellule qui engendrera la vitalité de la nation tout entière. Écarter le village dans la gestion communale serait une erreur monumentale et un coup d’arrêt à la démocratie participative naissante.
Par ailleurs, il est incompréhensible que le pouvoir de l'Union s'autorise d'intervenir dans l'administration des collectivités territoriales, un domaine de compétences dévolue aux îles autonomes par la constitution, en désignant illico des chefs de villages et de quartiers dans le seul dessein de s'arroger des majorités dans les municipalités. En effet, l’article 9 de la constitution dispose que l’administration des collectivités locales relève de la compétence des îles autonomes.
Abdou Elwahab Moussa