Le Président Ikililou Dhoinine rappelle à l’ordre les crâneurs de son régime politique
Il est demandé aux arrogants et aux nouveaux riches de penser à l'après 26 mai 2016.
La scène se déroule à Malabo, Guinée Équatoriale, en 2013, lors d'une conférence africaine. Le Président Ikililou Dhoinine voit cette Mohélienne qui n'avait aucun motif normal de s'y trouver. Intrigué et légèrement énervé, il s'approcha d'elle et lui demanda: «Que fais-tu ici?». Et il attendit cette protégée d'un ministre mohélien lui répondre du tac au tac: «C'est notre règne». L'affaire déplut au Président de la République, qui se maîtrisa pour éviter le scandale à l'étranger. Le linge sale ne lave-t-il pas en famille, et le chien qu'on a eu dans sa maison ne doit-il pas être enterré dans la cour de ladite maison à sa mort? Depuis, la formule malheureuse du «Yino Dé Yatrou», «Yino Dé yi Yezi Yatrou», «C'est le nôtre», «C'est notre règne», a connu de fortunes diverses et a contribué à rendre les Mohéliens des gens arrogants et impopulaires, des parvenus, voire des maquignons faisant beaucoup de bruit en ville. Mohéli venait de perdre à la fois son innocence, si tant est qu'elle a déjà été innocente, et son alibi consistant à crier à la «marginalisation» pour tenter d'expliquer son retard par rapport aux autres îles.
Des Mohéliens au nombre de quatre à cinq n'ont pas compris que le pouvoir est quelque chose d'éphémère et que ceux qui l'ont exercé ne sont pas les plus heureux des Comoriens, étant donné l'état de décrépitude et de mendicité dans lequel sont tombés certains parmi les anciens dirigeants comoriens. C'est ainsi qu'on dit que l'entreprise publique Comores Télécom est devenue un bastion de Mohéliens. Au Maroc, on accusait l'inusable Mahjoubi Aherdane de ne s'entourer que des Berbères comme lui quand il était à plusieurs reprises ministre, dont celui des Postes et Télécommunications, des Berbères qui refusaient systématiquement de parler arabe: «Tous les fonctionnaires de son ministère sont ses hommes et tous ne veulent parler que le berbère au sein du ministère»: Belkassem Belouchi: Portraits d'hommes politiques du Maroc, Préface d'Ahmed El Kohen Lamrhili, Afrique-Orient, Casablanca, 2002, p. 101.
Est-ce vrai ou s'agit-il d'une simple exagération de la part du Docteur Belkassem Belouchi? Accusation rituelle de Marocains? Seul l'intéressé peut répondre à la question. Toujours est-il qu'une conception féodale du pouvoir complique tout aux Comores, et les Mohéliens installés au pouvoir ont été mal inspirés de ne pas comprendre le piège tendu par un pouvoir par définition éphémère. Des arrogants et des crâneurs, il y en a parmi les Mohéliens et parmi les autres Comoriens. Ces Mohéliens se comptent sur les doigts d'une seule main, mais dans un pays où on n'a pas l'habitude de voir des Mohéliens occuper des postes stratégiques, la chose est très mal vécue par les tenants de la suprématie insulaire, pendant de la suprématie raciale.
Pour autant, le Président Ikililou Dhoinine a parfaitement compris les dangers véhiculés par le comportement irresponsable de cette poignée de Mohéliens, et répète à l'envi à tous les Mohéliens travaillant avec lui, même de loin: «Moi, je sais que dans quelques mois, je vais redevenir un simple Comorien, un modeste citoyen. Alors, je refuse de prendre la grosse tête. Je prie Dieu pour qu'Il me donne la possibilité de quitter le pouvoir sain et sauf. Je n'oublie pas que le pouvoir, c'est quelque chose qui finit très vite, parfois mal. Je place mes espoirs en Dieu. Alors, quand demain, je serai dans la rue en tant qu'ancien Président des Comores, je veux pouvoir regarder les gens droit dans les yeux sans avoir à les baisser par honte d'avoir fait du mal aux uns et aux autres. Par contre, je plains ceux d'entre vous qui vous comportez comme si ce pouvoir était quelque chose de durable et vous appartenait en propre. Un pouvoir, ça finit toujours. Je plains donc ceux parmi vous qui aurez du mal à vivre avec les autres parce que vous vous comportez mal avec eux aujourd'hui, pour un pouvoir qui n'appartient à personne parmi nous. Pensez à votre vie après la fin de ce régime politique et pensez aux gens qui vous observent, en guettant la moindre de vos erreurs pour l'étaler sur la place publique aujourd'hui ou demain. Le pouvoir ne s'exerce qu'avec un minimum de prudence et de respect envers les citoyens. Si les Comoriens se plaignent du comportement de certains d'entre vous, vous avez vraiment intérêt de changer de mentalités et de comportement pour éviter certaines choses aujourd'hui et demain. Nous sommes aux Comores, un pays où chacun connaît l'autre». Si seulement le Président pouvait parler également à son ministre de l'Intérieur, pour lui demander de ne pas frauder les élections à venir et qui inquiètent tant les Comoriens!
La question qui se pose alors est celle de savoir si discours est entendu. Ce n'est pas du tout certain parce que la petite poignée de Mohéliens semant la haine inutile n'a rien changé des habitudes qui font polémique. Ces Mohéliens n'ont pas encore compris les dangers véhiculés par le pouvoir politique. Or, le discours de haine prononcé sous le manteau contre les Mohéliens est alarmant. Il n'y a pas un jour qui passe sans qu'on attende tel augure de la politique comorienne promettre «un coup de balai» pour chasser des administrations tous les Mohéliens en vue. Même en conseil des ministres, certains ministres ne cachent pas leur aversion envers les Mohéliens, pendant que sur l'île de Mohéli, les gens se plaignent en disant que «le Président mohélien» n'a rien fait pour recruter un nombre important de Mohéliens et pour réaliser des projets d'envergure à Mohéli. Entre les deux discours radicaux, imprégnés d'une haine palpable, où se situe la vérité? En tout cas, certains Mohéliens travaillant à la Grande-Comore se préparent au pire dès que le Président Ikililou Dhoinine tournera le dos à Beït-Salam, le 26 mai 2016.
ARM
©lemohelien – Samedi 6 décembre 2014.