Après le sommet de la COI, quelle politique régionale pour les Comores?

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« L’essentiel, pour jouer un rôle international, c’est d’exister par soi-même, chez soi. Il n’y a pas de réalité internationale qui ne soit ...

«L’essentiel, pour jouer un rôle international, c’est d’exister par soi-même, chez soi. Il n’y a pas de réalité internationale qui ne soit d’abord une réalité nationale». Ce constant a été fait par Charles de Gaulle lors de sa déclaration du 13 décembre 1959. En ce qui nous concerne, les Comores ont mobilisé leur diplomatie pour organiser la IVème conférence des chefs d’États et de gouvernement de la Commission de l’océan Indien (COI) avec bravoure et succès. Il n’a pas été facile pour le gouvernement, surtout, pour le Président de la République d’être hôte et victime des propos sur Mayotte tenus par son invité de marque, le Président français, François Hollande. Ceci est d’autant plus compliqué qu’on qualifie notre chef d’État d’un novice ou d’amateur de la chose politique, voire de la diplomatie. On oublie souvent qu’aux Comores, on regorge beaucoup d’hommes de talents, toujours mal exploités ou inexploités. Pour nous en convaincre, il suffirait à peine de rappeler une preuve très parlante, le geste remarquable de notre gouvernement d’offrir comme cadeau d’adieu à Philippe Lacoste, Ambassadeur de France à Moroni au cours des 3 derniers années, le livre d’un des intellectuels comoriens les plus brillants, le Docteur Abdelaziz Riziki Mohamed, ARM. Ce livre est intitulé La diplomatie en terre d’Islam, L’Harmattan, Paris, 2005. C’est le seul Comorien à ma connaissance qui a deux Doctorats, l’un préparé à Rabat au Maroc et l’autre à la Sorbonne. Aujourd’hui, on peut se targuer d’avoir une diplomatie, en ayant des diplomates formés, et qui peuvent travailler pour la coopération régionale et internationale. Les dirigeants comoriens ont perdu beaucoup de temps avant d’occuper une place honorable au niveau de la région à cause des déstabilisations permanentes de notre pays. On oublie souvent comme l’a dit Lionel Groulx que «la diplomatie est l’arme des faibles». L’avènement de la présidence tournante, nous a permis d’avoir une stabilité institutionnelle, politique et sociale.
  
Il est donc, temps que nos dirigeants «osent» aujourd’hui penser à l’avenir et songent non seulement à y être présents mais à y exercer une influence. Les Comores devaient accueillir un «sommet» de la COI, le 26 juillet 2014. Mais, cet événement diplomatique a été reporté à cause de l’accident d’avion survenu au Mali sans survivants. C’était une occasion inestimable pour les Comores pour se faire connaitre dans le monde et surtout dans la région. Les Comores, par ses hommes et femmes, ont montré une image d’un pays uni et solidaire pour l’unité et l’intégrité de notre territoire. Ceci sous-entend notre unité nationale pour faire comprendre à la France notre détermination à libérer et faire retourner Mayotte au sein de son giron national. Nous ne pouvons jamais être forts et respectés au niveau de la région et au-delà si nous n’arrivons pas à nous imposer sur la question de Mayotte.
  
Le Président de l’Union des Comores a su avec beaucoup de tact diplomatique imposer à ses pairs la question de Mayotte, qui lui tient à cœur que tous les autres sujets au cours de ce «sommet». En dehors de la question de Mayotte, qui couve comme un volcan sur toutes nos relations avec les autres pays de la région et du monde, nous devons aussi relancer les domaines économique, sanitaire et culturel. De ce fait, la COI doit évoluer vers une zone de libre-échange et de circulation des biens et services comme au sein de l’Union européenne. Avant d’arriver à cette étape, nous devons relancer les relations bilatérales.
    
Relancer les relations bilatérales avant celles multilatérales
   
Pour avancer dans ce monde instable et imprévisible, il vaut mieux d’adapter les recettes qui ont réussi ailleurs tant au niveau économique que diplomatique. Au niveau de l’océan Indien, nous avons des pays avec lesquels nous sommes liés sur la base d’une Histoire commune, comme Madagascar, le Mozambique, la Tanzanie et Kenya, et d’autres où nous avons une forte communauté, comme à la Réunion. Ces approches ont été appliquées ailleurs, surtout en Europe, où les conflits entre voisins ont été violents et sanglants. À un moindre degré d’engagement, Madagascar (hormis l’économie) est pour les Comores, ce que l’Allemagne est pour la France.$
    
Renforcer notre relation avec la Grande Île rouge, Madagascar
   Madagascar est une île continent, avec une superficie de 587.040 km² et une population de 21 millions habitants. La colonisation française avait rattaché les Comores à Madagascar de 1912 à 1946, quand l’Archipel obtient une autonomie administrative, avec pour capitale Dzaoudzi. Ce rattachement a permis un contact et un mélange de sang qui ont favorisé l’accès mutuel à des connaissances, des cultures, coutumes et mœurs entre Malgaches et Comoriens. Nombre de dirigeants comoriens ont fait leurs études à Madagascar. Aujourd’hui plusieurs centaines d’étudiants comoriens poursuivent leurs études à Madagascar en payant des droits de visa exorbitants: 300 euros par an. C’est une situation intenable pour des étudiants non boursiers issus souvent des familles à revenus lamentables. Ce sont, entre autres, des raisons qui doivent nous pousser à renforcer des relations bilatérales. Nous avons connu, certes les massacres de la fin de l’année 1976, plusieurs familles comoriennes ayant perdu leur vie et leurs biens. Depuis ce massacre, aucune justice n’a jamais été réclamée par nos autorités d’alors et d’aujourd’hui. Ceci ne doit pas nous empêcher de renforcer nos relations bilatérales dans les domaines économique, éducatif et sanitaire.
  
Le renforcement de nos relations diplomatiques avec Madagascar consiste à donner un sens à notre Ambassade à Antananarivo, en définissant les rôles et les tâches de nos Ambassades à Madagascar et ailleurs. Pour Madagascar, nous devons ouvrir un Consulat général à Majunga (il en existe déjà mais dans un désordre pire que celui de l’Ambassade des Comores à Antananarivo), un Consulat général à Antsiranana (englobant les Comoriens d’Antsiranana et de Nosy-Be) et un Consulat général à Fianarantsoa (incluant nos compatriotes vivant à Tuléar). L’Ambassade et le Consulat général jouent les rôles des défenseurs de nos ressortissants là où ils se trouvent. On sait que par définition, un consulat «est le service d’un État chargé des relations avec les ressortissants de l’État accréditant (l’État qui dirige le service) au sein de l’État accréditaire (l’État où se situe le service) et son rôle est avant tout la protection de sa communauté». Mais, les Consulats doivent aussi promouvoir le commerce et le tourisme, en faisant la publicité de notre pays et en facilitant l’obtention des visas d’entrée. Notre Ambassade et les Consulats nous permettront de connaître les Comoriens afin qu’on puisse les recenser, leur faire passer un service national de deux ans dès l’âge de dix-huit ans.
  
Nous devons demander à Madagascar et à tous les autres États membres de la COI de faciliter la circulation des étudiants et des chercheurs, en supprimant les visas quelle que soit la durée de séjour. Au-delà de la libre circulation des étudiants et des chercheurs, on doit évoluer graduellement vers la circulation des biens et services. La Grande Île a été choisie par ses pairs de la COI pour être le grenier de l’océan Indien. Cette mission est largement à sa hauteur, pourvu que l’île soit stable. Or, les Comores ont un rôle de grande importance pour la stabilité de Madagascar, compte tenu de l’importance de leur communauté sur l’île et de l’Islam, souvent assimilé aux Comoriens. Au Nord de Madagascar, à Antsiranana, on appelle le Comorien «Silam», comme si la religion fut une race.
  
Ceci est d’autant plus énigmatique qu’après le massacre de décembre 1976, le gouvernement malgache a été obligé de créer une association soutenu par la Lybie dénommé «Silam malgache», c’est-à-dire «Islam malgache», loin de l’Islam comorien. Heureusement l’Islam à la comorienne reste vif à Madagascar jusqu’à nos jours. Notre pays doit tenir compte de ce facteur islamique, car nous véhiculons un Islam de tolérance depuis plusieurs siècles. Donc, le gouvernement comorien ne devait pas remettre seulement à l’Ambassadeur de France qui quitte Moroni le livre de notre frère Abdelaziz Riziki Mohamed sur «La diplomatie en terre d’Islam» mais aussi à tous nos diplomates, pour qu’ils comprennent le credo défendu par l’auteur: «L’Islam, c’est l’éthique et l’esthétique».
    
Renforcer notre relation avec l’île de la Réunion
  
L’île de la Réunion est entrée au sein de la COI le même jour que les Comores. La Réunion a une surface de 2.512 km² et une population de 840.974 habitants, dont 5% sont d’origine comorienne, selon les statistiques officielles. Les Comoriens constituent donc l’une des premières communautés de la Réunion. Ceci ne tient pas compte des Comoriens assimilés à l’ethnie Kafr, l’une des quatre (Kafr, Zarabes, Malbar et Yabs) composantes du peuplement de l’île. Celle-ci regorge plus de 50.000 Comoriens, sans aucun Consulat. Or, notre diaspora est non seulement un levier économique, mais aussi politique et diplomatique. Ainsi pour le renforcement de notre relation avec ce département français doit-il consister à ouvrir un Consulat général, qui aura pour rôle entre autres de s’occuper des Comoriens et de faire la publicité touristique de notre jeune nation.
    
Renforcer notre relation bilatérale avec l’île Maurice
  
L’île Maurice est l’un des trois membres fondateurs de la COI, comme les Seychelles et Madagascar. Il est peuplé de 1.236.817 habitants et a une dimension de 1.865 km². Elle est une modèle de réussite économique de l’océan Indien et de l’Afrique. L’île Maurice est pour les Comores, au point de vue économique, comme l’Allemagne pour la France. Nous devons renforcer nos relations économiques, sanitaires et touristiques avec elle. L’île Maurice est dotée d’une structure économique et financière fiable, qui peut nous donner plus de visibilité en tant que modèle à adapter ou référence à suivre. Il faut renforcer surtout la coopération en matière de santé afin de faciliter la prise en charge de nos malades non traitables aux Comores. Ces derniers temps, les évacuations sanitaires coûtent très cher à chaque famille comorienne, surtout à celles qui ne profitent pas l’argent de l’État. Nous devons signer des accords en matière sanitaire avec l’île Maurice et Madagascar afin de diminuer les coûts de soins et pour bien en assurer la prise en charge. En dehors de la santé, nous avons besoin de coopérer en matière de tourisme. Dans la région du Sud de l’océan Indien, nous sommes les derniers dans tous les domaines: économique, sanitaire, éducatif et touristique. Prenons l’exemple du nombre des touristes visitant la région Sud de l’océan indien. Comores: 28.000 touristes, Seychelles: 132.000 touristes, Madagascar: 228.784 touristes, la Réunion: 426.000 touristes, les Maldives: 484.000 touristes et Maurice: 682.000 touristes.
  
Ces chiffres montrent l’écart que nous devons combler pour attirer des touristes dans notre pays. Ceci doit être de loin l’action de nos diplomates et de notre gouvernement pour favoriser le développement du tourisme.
    
Renforcer nos relations bilatérales avec les Seychelles
   
Les Seychelles sont un archipel de 115 îles (115), dont la superficie, 445 km², ne dépasse guère l’île d’Anjouan (424 km²) avec une population de 89.000 habitants. Il fut un temps où l’économie des Seychelles reposait sur l’agriculture (coprah, cannelle et vanille) presque comme les Comores. Aujourd’hui, l’économie des Seychelles est axée sur trois piliers, la pêche, le tourisme et les services offshores. Les Seychelles ont su attirer les investisseurs directs du Proche-Orient pour augmenter leur capacité d’accueil en infrastructure hôtelière. Au moment où nous demandons à nos partenaires du Proche-Orient de nous construire des mosquées (qui sont plus nombreuses aux Comores que les écoles primaires), les Seychelles construisent des hôtels de luxe pour développer l’économie. La faute ne vient pas de ceux qui viennent nous aider mais de nous-mêmes, de nos dirigeants.
  
Nous devons cibler nos relations avec nos voisins selon les intérêts réels que présentent ces États. Le quatrième «sommet» de la COI nous a prouvé qu’on peut faire mieux avec beaucoup de volonté et surtout de visibilité.

Par Saïd-Abdillah Saïd-Ahmed
Président du Parti Comores Alternatives (PCA)
Candidat à l’élection présidentielle de 2016
© www.lemohelien.com – Samedi 13 septembre 2014.
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