4 Questions à IDRISS MOHAMED Irchad Abdallah : Bonjour Idriss M. Idriss Mohamed: Bonjour Irchad. 1- Irchad Abdallah : Aujourd’hui s...
4 Questions à IDRISS MOHAMED
Irchad Abdallah : Bonjour Idriss
Irchad Abdallah : Bonjour Idriss
M. Idriss Mohamed: Bonjour Irchad.
1- Irchad Abdallah : Aujourd’hui se tient le 4ème sommet des chefs d’Etats et de gouvernement de la COI. Quelle en est votre lecture ainsi que celle du Comité Maoré qui appelle par le biais d’un communiqué la population comorienne à manifester « sa rage » à l’occasion de la visite du président français M. François Hollande.
Ne
pensez-vous pas que la question du VISA BALLADUR relève plutôt de la
négociation bilatérale d’autant que les autres membres de la COI
semblent s’en désintéresser ?
1- M. Idriss Mohamed :
Je pense que ce qui important de souligner dans le déplacement de
François Hollande, c’est sa position intransigeante sur la question de
l’ile comorienne de Mayotte. Il n’a aucun respect pour ses partenaires
comoriens. Même sur un plan diplomatique lorsqu’on a des divergences, on
essaie de les exprimer d’une certaine façon. Lui non ! Les gens ont
entendu les déclarations qu’il a faites à Mayotte. Donc connaissant nos
autorités malgré la résistance dont ils font preuve ces derniers temps
en particulier lors de la dernière conférence des ministres, on ne peut
qu’appeler à une RIPOSTE ÉNERGIQUE pour qu’au moins la dignité de notre
peuple ne soit pas piétinée et bafouée comme si nous étions des moins
que rien par des gens arrogants, qui n’ont aucun sens de l’amitié entre
les peuples et qui croient que les grands pays peuvent malmener les
petits pays sans aucun respect des principes.
Je crois
que le général De Gaulle avait dit que les pays n’ont que des intérêts à
défendre et c’est vrai, mais il faut le compléter avec autre chose. Il
y’a des principes ! Si on n’applique pas un minimum de principe dans la
défense de ses intérêts, le monde devient une jungle. Et c’est ce que
font les français aux Comores. Donc c’est normal que nous demandions une
réaction vigoureuse pour montrer aux dirigeants français et au monde
que nous n’avons pas renoncé et que nous ne renoncerons pas !
S’agissant
des négociations entre les Comores et la France,il faut savoir que tout
conflit se règle en dernière analyse par la négociation. Nous, nous
avons toujours demandé à ce que la France reconnaisse la vocation de
Mayotte à réintégrer l’Etat comorien et qu’à partir de ce moment là,
tout peut être mis sur la table. Mais, si la France veut négocier avec
les Comores pour accorder des visas à ceux-ci et pas à ceux-là etcétéra,
mais dequel type de négociation s’agit-il ? C’est de la moquerie !
Nous, nous avions avancé une idée : 1 pays, 2 administrations !
Je
voudrais saisir cette occasion pour dire quelque chose. Les maorais
disent que nous ne tenons pas compte d’eux lorsqu’on s’exprime sur cette
question. Mais en fait ce sont eux qui ne tiennent pas compte de nous.
Parce qu’ils considèrent que toutes ces questions qui concernent
Mayotte, ça ne leur regarde qu’à eux seuls. Mais Mayotte est une ile
comorienne, donc j’ai autant de droit qu’un maorais sur Mayotte de la
même façon qu’un maorais a autant de droit que moi sur la Grande-Comore
qu’un grand-comorien. C’est comme ça ! Donc, lorsque nous revendiquons
Mayotte ça ne veut pas du tout dire que nous ne tenons pas compte de
leurs aspirations. C’est plutôt eux qui ne veulent tenir compte des
notes parce qu’ils considèrent qu’ils ne sont pas comoriens. Il faut
bien que les choses soient remises à leurs places. Nous savons aussi
qu’à Mayotte il y’a des gens se battent pour l’indépendance et l’unité,
mais jamais on ne les entend. D’ailleurs même ceux qui crient ... quand
on gratte un peu on se rend compte que finalement leur comorianité est
là.
2-Irchad Abdallah : Vous venez de publier aux Éditions Cœlacanthes un livre sur votre parcours politique et militant. En quelques mots, pourriez-vous nous dire ses principaux jalons et les faits saillants qui vous ont marqué ? Et, votre livre constitue-t-il une forme aggiornamento ?
2-Idriss Mohamed : (rire) Je ne sais pas ce que veut dire aggiornamento !
Irchad Abdallah : Une forme de mise à jour!
M. Idriss Mohamed :
Non. Moi ce qui m’a poussé à écrire ce livre, c’est parce que beaucoup
de camarades n’arrêtaient pas de me solliciter pour que je le fasse..
Pour que j’écrive. Et même temps, plusieurs personnes ont écrit, et puis
plusieurs expressions ont été faites dans les blogs. Et finalement ce
sontdes personnes qui ont le droit d’écrire ce qu’ils veulent sur ce que
nous avons vécu mais qui ne l’ont pas vécu de près. Et en même temps
j’estime que nous avons incarné un grand espoir dans le pays et nous
l’avons déçu ! Là, il y a des enseignements à tirer.
Donc
le principal objet de mon livre est raconter comment j’ai vécu cette
expérience de l’intérieur. Comment moi j’ai vécu les problèmes qui se
sont posés à la révolution comorienne, quelles sont les réponses que
nous avons apportées et pourquoi ça a échoué. Et en même temps lancer
une idée d’un nouveau patriotisme qui pourrait rassembler les rescapés
de tous les mouvements passés comme les nouveaux, un patriotisme qui
allierait comme disait Hessel, le local à l’international. Un
patriotisme internationaliste. Un patriotisme qui est fondé sur la
solidarité aussi bien locale, régionale, nationale et internationale.
Mon livre est une invitation à la réflexion pour la création d’un
nouveau parti politique.
Je crois que parmi les
nombreux problèmes que traverse aujourd’hui notre pays, je considère que
depuis la fin du FD il n’y a plus de parti révolutionnaire qui incarne
les aspirations profondes du pays. À partirde ce moment là tout va à vau
l'eau..
Je vais vous donner un exemple pour que les
gens puissent comprendre ce que je vais dire. Lorsque nous étions là, si
quelqu’un vole l’argent du pays il devait se cacher. Et ceux qui
étaient contre ces voles cherchaient tous les moyens pour débusquer
l’infraction et nous donnaient l’information et nous on le disait ou on
le publiait. Rien que cela faisait que ceux qui volaient n’avaient le
front haut dans le pays, dans les madjiliss et autre , ils avaient honte
parce qu’on les attaquait. Il y’avait une certaine dynamique dans la
jeunesse qui faisait que celle ci s’intéressait à ces choses la.
3- Irchad Abdallah : Depuis la chute du régime du président Ahmed Abdallah il y’a ¼ de
siècle, la plupart de vos anciens « camarades » ont participé d’une
façon ou d’une autre à la gestion du pays, avec les résultats que l’on
sait. Est-ce que selon vous le désenchantement actuel de la jeunesse,
jusqu’à l’absence de mobilisation en faveur des sujets et combats
importants comme la journée du 12-Novembre appelée
aussi« journée-maoré » par exemple, ne trouvent pas leur source dans les
errements des anciens du FD ou de leurs avatars ?
3-M. Idriss Mohamed :
Je comprends bien la question. Mais ce qu’il faut bien retenir, c’est
que si quelqu’un qui a été avec nous, qui s’est battu avec nous et qui à
moment donné à décidé de rompre avec nous et d’aller de l’autre
côtén’est plus représentatif de nous. Bien sûr que ce n’est pas aussi
simple que ça car on voit des gens aujourd’hui auxquels on peut
se demander s’ils pensaient vraiment une parcelle de ce qu’ils disaient
il y’a quelques années. Quand on les voit piller le pays comme ils font
et qui plus est, avec arrogance!
Souefou, .. Abodo Souefou, il s’est prêté je crois, des centaines de millions et il a affronté son Conseil d’administration pour lui dire.. « mais je me suis prêté !!! ».
Ce sont des gens qui ont l’audace de ce qu’ils font. Pour moi, ils sont
beaucoup plus venimeux, ils font beaucoup plus de tort car c’est des
gens qui ont une culture, une façon de faire et qui osent. À partir du
moment où ils ont choisi de rompre et qu’ilsont changé de camps ils ne
nous représentent plus.
Maintenant il faut se dire que
tous les mouvements révolutionnaires dans le monde ont eu leurs
transfuges. C’est un peu ce qui s’est passé chez nous. Il y a des gens
qui sont partis après 1985 avec la répression, d’autres après 1989,
d’autres quand il y’avait le président Azaly parce qu’ils y ont vu une
porte ouverte, d’autres sont partis pour ceci ou pour cela. Ce n’est pas
un bloc monolithique, d’ailleurs si c’était le cas on aurait pu penser
qu’ils allaient créer quelque chose pour aller encore plus loin mais non,
rien de tout ça ! C’est des gens qui sont descendu du train mais ça
n’empêche que le train devait continuer..
Mais
l’interprétation que les gens font de ces errements et de ces reniements
est que la politique est une mauvaise chose, c’est vraiment pourri,
c’est sale.. Et le résultat fait qu’aujourd’hui on a que des larrons
enfoire sur la scène politique comorienne.
Moi c’est
un combat que j’ai voulu mener à un moment donnépour inciter la jeunesse
à s’engager en politique. Par exemple dans Habari, pour pousser les
jeunes les plus sains, les plus déterminés à servir le pays à
s’intéresser à la politique car c’est là où tout se passe. Toutes les
décisions se mènent là et non sur les réseaux sociaux.
Aujourd’hui
on voit par exemple Kiki, qui se prétend candidat et qui ambitionne
d’être président de la république. On ne sait même pas d’où il vient,
enfin je n’en sais rien. Mais je crois que c’est un bon symbole pour
montrer que la jeunesse doit s’intéresser à la politique et doit aussi
s’impliquer.
Notre problème aujourd’hui c’est que les
idées révolutionnaires dans le monde ont baissé, le libéralisme l’a
emporté avec beaucoup d’arrogance et de force même si la crise qu’il a
engendrée crée des situations extrêmement tendues y compris dans les
grandes métropoles capitalistes mais il n’y a pas encore l’émergence
d’un mouvement ou d’une riposte internationale malgré les quelques
tentatives incarnées par les mouvements altermondialistes. Le monde
manque de boussole mais je suis convaincu que ça viendra et que cette
situation ne pourra pas perdurer.
4-Irchad Abdallah : Le Comité
Maoré milite pour l’organisation de la prochaine tournante au profit de
l’ile comorienne de Mayotte jusqu’à soutenir un candidat déclaré, alors
que la Constitution vise l’île à laquelle échoit la tournante (Art.13),
et non « une citoyenneté insulaire ». Ne faites-vous pas une lecture erronée de la Constitution du 23-12-2001 sachant que tout comorien peut
être candidat partout où il le souhaite ?
4- M. Idriss Mohamed :Tout d’abord une mise au point. Nous ne soutenons aucun candidat que ce soit clair et net. Aucun candidat !
En
fait, la tournante dans la Constitution indique que l’île à laquelle
échoit la présidence, il doit y avoir une primaire sur cette île. Et
c’est ça l’obstacle car on ne peut pas organiser à Mayotte dans la
situation actuelle pour sélectionner les 3 candidats finaux. C’est celle
là la vraie question. Comment régler ce problème ? Certains vous
répondent, de toutes façons onne peut pas organiser les élections à
Mayotte donc on arrête et ça retourne à Ngazidja. Les Kiki et consorts,
qui sont bien évidemment des idées derrière la tête et qui soutiennent
de toutes les façons possibles les positions de laFrance avec leur
machin de France-Comores-Echanges.. Et il y’a nous qui disons qu’en fait
c’est une disposition qui a été prise et qui peut être modulée. On peut
penser une loi organique qui permet de sélectionner les candidats afin
de pouvoir organiser des élections nationales avec eux. Mais en réalité,
la vraie question est que ceux qui sont au pouvoir ne se prononcent
pas.
Nous avions intenté une action auprès de la Cour
constitutionnelle pour montrer que Maoré a droit à son Vice-président.
Nous avons obtenu gain de cause mais ça n’a jamais été suivi de fait.
Donc on peut déduire que la vraie question est politique. Est-ce que oui
ou non les Comores vont sauter le tour de la tournante maoraise sans
même poser la question, sans même discuter ? Ensuite, on peut aussi
pointer cette contradiction dans notre Constitution. On parle d’île mais
il n’y a pas de citoyens d’île !
Nous, nous voulons
que formellement l’Etat se prononce pour la tournante à Mayotte et qu’on
cherche les moyens pour le faire. Certains avaient avancé l’idée d’un
scrutin numérique que tout comorien de Mayotte disposant d’une carte
nationale d’identité puisse voter par internet. Les pistes existent à
condition de s’y mettre. Mais la question reste politique. Il faut
d’abord faire ce 1er pas. Ce sera un signal fort envoyé à la
France et au monde entier. Un signal pour dire que nous n’avons pas
renoncé et que nous ne renoncerons jamais..
Irchad Abdallah: Je vous remercie
M. Idriss Mohamed: C'est moi
Irchad Abdallah