"Les oubliés de la République", un rapport qui met en lumière les économies d'échelle réalisées sur le dos des Mahorais auj...
"Les oubliés de la République", un rapport qui met en lumière les économies d'échelle réalisées sur le dos des Mahorais aujourd'hui sacrifiés
"Le corps transitoire des fonctionnaires Mahorais". Une drôle de formule unique en France sur laquelle s'est penché le Conseil Supérieur de la Fonction Publique Territoriale (CSFPT) et a produit un rapport incroyable intitulé : "Mayotte, les oubliés de la République". France Mayotteee Group est parvenu à se procurer ce fameux document de 78 pages et il est édifiant. Après les générations sacrifiées de l'Éducation Nationale, il sera permis de dire "sous Français à la misère codifiée", créés d'une manière qui ne peut qu'inspirer la honte.
Mercredi dernier, le Conseil Supérieur de la Fonction Publique Territoriale s'est réuni en séance plénière et a appelé à son ordre du jour, l'examen d'un rapport assez extraordinaire concernant le 101ème département. Et son titre donne la mesure de ce qu'il contient : "Mayotte, les oubliés de la République".
Pour faire simple et bien comprendre les choses, autrefois, la fonction publique française se déclinait en 4 catégories, A, B, C et D. La formule devait être revue et corrigée et il y a maintenant 27 ans, la catégorie D de la Fonction Publique a été supprimée pour ne conserver que les 3 premières.
Mais Mayotte était à cette époque bien à part et la Fonction Publique Locale dite "mahoraise" était normée par des arrêtés préfectoraux, qu'il s'agissait d'intégrer au mieux dans la Fonction Publique Territoriale.
Or, la loi 2001-616 du 11 juillet 2001, avait posé le principe de la départementalisation et dans ce cadre, le droit à intégration des agents publics de Mayotte dans les fonctions publiques de droit commun. Il était établi que ces intégrations devaient intervenir avant le 31 décembre 2010, mais uniquement pour la Fonction Publique d'État.
Au 1er avril 2004, au moment de l'activation de la décentralisation, il a fallu activer le processus mais un problème s'est posé. Compte-tenu du faible niveau de vie, de la modicité des rémunérations de la Fonction Publique Mahoraise, et du montant du Smic mahorais à cette époque (568 € contre 1286 € en métropole), deux cadres d'emplois, qui devaient être transitoires, ont été créés : le cadre d'emplois des agents territoriaux et celui des Agents Ouvriers Territoriaux de Mayotte (AOTM). Ces cadres d'emplois se caractérisaientpar un début de carrière à l'indice brut 100 jusqu'à l'IB maximum de 250, le déroulement de carrière pouvait alors prendre de 12 à 18 ans. Le provisoire était installé pour les agents de la fonction publique territoriale même si la Direction Générale des Collectivités Locales (DGCL) s'était engagée à proposer un texte afin de fermer un jour ce dispositif périssable qui devait donc s'éteindre aussi au 31 décembre 2010.
Or, les intégrations des agents de la fonction publique Mahoraise dans les cadres d'emplois des AOTM ne se sont pas produites à un rythme satisfaisant permettant de tenir les objectifs fixés par la loi, à savoir l'intégration avant le 31 décembre 2010 de l'ensemble des agents. En 2007, le rapport de l'inspection générale du CNFPT (Centre National de la Fonction Publique Territoriale) constatait que 20 % seulement des personnels avaient demandé leur intégration, en raison de la faible attractivité de ces cadres d'emplois.
Avec le temps, le climat social s'est durcit et le Préfet avait été amené à négocier avec les partenaires sociaux et institutionnels, trouvant ainsi un protocole d'accord dit "protocole Robin" relatif à l'intégration des agents publics de Mayotte dans les fonctions publiques de droit commun.
Ce protocole signé le 8 avril 2009 prévoyait un certain nombre d'avancées, notamment :
- l'amélioration de la grille indiciaire des cadres d'emplois dits «passerelles»
- la durée de carrière réduite à 6 échelons, chacun d'une durée d'un an, mais sans mini ni maxi,
- l'intégration automatique pour ces agents dans les corps ou cadres d'emplois de droit commun dès lors qu'ils ont atteint l'indice majoré de début de carrière de la catégorie C, c'est à dire au moment du basculement du 5ème au 6ème échelon (indice majoré 309).
Cependant, l'intégration dans les cadres d'emplois des AOTM a été prévue délibérément sans reprise d'ancienneté et ce, avec le quitus donné par les syndicats.
Grâce à cette avancée bancale, tous les agents de la Fonction Publique Mahoraise ont été intégrés, à quelques rares exceptions, dans les cadres d'emplois de droit commun de la fonction publique territoriale sauf les hors catégorie, les AOTM.
Au 30 juin 2013, les AOTM étaient à Mayotte environ 3 600 soit 66% des catégories dites C sur le territoire.
Et les conséquences sont aujourd'hui dramatiques. C'est ce qu'indique le rapport du CSFPT : "il est vrai qu'une des raisons de cette situation particulière est qu'on a «oublié», dans leurs cadres d'emplois, de mentionner expressément une date d'extinction dudit cadre, alors que c'était le cas dans la Fonction Publique de l'Etat. Et puis, au moment de la revalorisation de la catégorie C, on a «oublié» qu'il existait une population d'agents dont l'indice majoré est inférieur à 309, les AOTM. Et ce dernier «oubli» exclut désormais les AOTM d'un passage automatique en catégorie C à la fin de leur carrière. Ils vont stagner dans un cadre d'emplois qui pourtant était dit provisoire".
Et le rapport d'ajouter une petite note qui revêt une importance capitale : "pourtant, l'attachement de Mayotte à la France et aux valeurs de la République n'est plus à démontrer. Mayotte envers et contre tout et tous a voulu rester française." (…) "Les agents témoignent aussi de leur amertume car ils se croyaient citoyens à part entière et demandent en conséquence l'égalité républicaine avec les autres agents publics, qui pour l'instant leur est refusée."
Dans cet esprit, le document présenté mercredi en séance plénière du CSFPT préconise de manière aussi forte qu'incontournable : "il est temps de prévoir un terme à l'existence des cadres d'emplois transitoires dès le 1er janvier 2015 ou à défaut le 1er du mois suivant la parution du décret. Il importe de fixer une date d'extinction du dispositif des cadres d'emplois «hors catégories» en interdisant de nouveaux recrutements dans ces cadres d'emplois après 2015."
Mais quels sont les véritables problèmes aujourd'hui de ces oubliés de la République ?
Le rapport est parfaitement clair sur le sujet et l'un des premiers nœuds vient de l'ancienneté.
Comme dit plus haut, lorsque les agents de la Fonction Publique locale ont été intégrés dans le cadre d'emplois transitoire des AOTM, aucune ancienneté n'a été reprise. De plus, il n'a pas été possible de différencier la situation des agents en fonction de leur ancienneté de leur expérience ou de leurs compétences.
Pour le CSFPT, "cette question de la non reprise de l'ancienneté est dérogatoire aux règles statutaires de droit commun…"
Pourquoi ? Tout simplement parce que les AOTM du corps transitoire espérant un jour devenir des catégories C intégrés, ne sont rien d'autre que des catégories D qui n'existent plus en France depuis 27 ans.
Avec un indice Brut maximal fixé à 250 lorsqu'il faut atteindre 309 pour basculer en C, cela revient à condamner ces travailleurs Mahorais qui exercent parfois depuis 25 ou 30 ans.
Le rapport du CSFPT relève encore que le conseil général a voulu palier cela en procédant à l'intégration de 400 agents se trouvant dans cette situation d'infortune. Mais la préfecture est passée derrière, annulant la procédure en faisant jouer le contrôle de légalité pour des raison un peu compliquées. Mais de manière étonnante, "si elle a certes appliqué les textes en vigueur, que penser d'un texte dans lequel a été oublié la date d'extinction du cadre d'emplois à l'inverse de celui régissant le corps similaire des agents de l'Etat et ce depuis 10 ans?" surligne le rapport marquant ainsi une nouvelle fois l'injustice.
C'est pourquoi le conseil préconise avec force, "de prévoir une date butoir aux intégrations des AOTM en catégorie C au 1er janvier 2018" mais aussi de "revoir les conditions d'intégration des AOTM dans les cadres d'emplois de la catégorie C en prenant en compte leur ancienneté en tant que fonctionnaires."
Très bien, mais comment faire si les indices bruts des AOTM sont à 250 alors qu'ils leur faut 309 ? Pire, la réforme des carrières des fonctionnaires relevant de la catégorie C et B est entrée en vigueur à compter du 1er février 2014.
Elle fait passer l'indice des catégories C de 309 à 316 et pour l'heure, "aucun texte réglementaire n'est annoncé pour revoir la grille indiciaire des AOTM" (…) "Maintenant, ce basculement automatique n'est plus possible, puisque le premier indice majoré de la catégorie C est désormais 316. Une de fois de plus, si rien n'est fait, les AOTM vont rester bloqués à l'IM 309 et personne ne sait ou ne se préoccupe de ce qu'ils vont devenir. Il ne semble pas que le Gouvernement lorsqu'il a revalorisé les catégories C se soit souvenu des AOTM" tempête le CSFPT qui propose deux solutions : "prévoir un dispositif pour revaloriser également les carrières des AOTM lorsque les cadres d'emplois de catégorie C sont revalorisés et rédiger de façon efficace l'article 11 des décrets relatifs aux Atsem…"
Les ATSEM ? Qu'est-ce cette chose là ? Et oui, les choses se compliquent encore. Il existe dans la population des AOTM des agents titulaires du CAP petite enfance, titre nécessaire pour intégrer le cadre d'emplois des ATSEM (Agents Territoriaux Spécialisés des Écoles Maternelles).
Le CNFPT Mayotte avait accompagné il y a quelques années une démarche de qualification des ATSEM afin de les préparer à l'examen du CAP petite enfance en donnant une large place à la validation des acquis. Sur 350 candidats, 280 avaient réussi l'examen. Or, il n'y avait que 60 postes à distribuer et il n'a pas été possible d'intégrer les évincés par leur seul diplôme ce qui avait pourtant été autorisé autrefois par le Préfet à l'égard des policiers municipaux.
"Il est donc nécessaire de prévoir une intégration automatique des AOTM dotés du CAP petite enfance dans le cadre d'emploi des ATSEM" propose le CSFPT.
Viennent enfin les conclusions du CSFPT et elles sont sans appel.
"Etre citoyen, et Mayotte a montré son attachement à la République, c'est avoir les mêmes droits et devoirs que les autres. Si rien n'est dit, si rien n'est fait, les AOTM vont rester dans une situation peu avantageuse et inéquitable par rapport à leurs homologues des deux autres versants de la Fonction Publique. Ce qui est profondément injuste. Pourtant l'unicité de la Fonction Publique est un des principes majeurs et les pouvoirs publics entendent affirmer ce principe notamment à travers l'instauration du Conseil Commun de la Fonction Publique. Mayotte a besoin d'agents publics motivés, car reconnus. Reconnaître qu'il faut résoudre la question des cadres d'emplois des AOTM dans la Fonction Publique Territoriale serait un signe fort du Gouvernement. Pour que les agents et les ouvriers territoriaux de Mayotte ne soient pas les oubliés de la République, il est urgent d'agir."
3 600 hommes et femmes attendent donc aujourd'hui que leur sort soit réglé, ce qui ne sera sans doute jamais le cas si les choses restent en l'état. Non seulement les AOTM du corps transitoire ne bénéficieront pas des avantages de la fonction publique, mais en plus, ils n'auront jamais droit à leur ancienneté. Ceux qui auront travaillé 20 ans avant verront ainsi tout leur labeur effacé telle la craie sur un tableau noir.
Des générations d'écoliers Mahorais ont été sacrifiées faute d'intérêts de la France pour le territoire et aujourd'hui, des familles entières vont être propulsées dans la misère extrême pour avoir eu le tort un jour, d'avoir été oubliés par celle qu'ils ont tant aimé, la France.
Encore une fois, la départementalisation des terres a bien eu lieu, pas celle des hommes où les laissés pour compte se recensent par milliers, enterrés par une technocratie parisienne affrontant la crise et parvenant à de menues économies en piochant dans le social.
Samuel Boscher / FRANCE MAYOTTE Matin de Vendredi 4 juillet 2014
HabarizaComores.com | أخبار من جزر القمر.
"Le corps transitoire des fonctionnaires Mahorais". Une drôle de formule unique en France sur laquelle s'est penché le Conseil Supérieur de la Fonction Publique Territoriale (CSFPT) et a produit un rapport incroyable intitulé : "Mayotte, les oubliés de la République". France Mayotteee Group est parvenu à se procurer ce fameux document de 78 pages et il est édifiant. Après les générations sacrifiées de l'Éducation Nationale, il sera permis de dire "sous Français à la misère codifiée", créés d'une manière qui ne peut qu'inspirer la honte.
Mercredi dernier, le Conseil Supérieur de la Fonction Publique Territoriale s'est réuni en séance plénière et a appelé à son ordre du jour, l'examen d'un rapport assez extraordinaire concernant le 101ème département. Et son titre donne la mesure de ce qu'il contient : "Mayotte, les oubliés de la République".
Pour faire simple et bien comprendre les choses, autrefois, la fonction publique française se déclinait en 4 catégories, A, B, C et D. La formule devait être revue et corrigée et il y a maintenant 27 ans, la catégorie D de la Fonction Publique a été supprimée pour ne conserver que les 3 premières.
Mais Mayotte était à cette époque bien à part et la Fonction Publique Locale dite "mahoraise" était normée par des arrêtés préfectoraux, qu'il s'agissait d'intégrer au mieux dans la Fonction Publique Territoriale.
Or, la loi 2001-616 du 11 juillet 2001, avait posé le principe de la départementalisation et dans ce cadre, le droit à intégration des agents publics de Mayotte dans les fonctions publiques de droit commun. Il était établi que ces intégrations devaient intervenir avant le 31 décembre 2010, mais uniquement pour la Fonction Publique d'État.
Au 1er avril 2004, au moment de l'activation de la décentralisation, il a fallu activer le processus mais un problème s'est posé. Compte-tenu du faible niveau de vie, de la modicité des rémunérations de la Fonction Publique Mahoraise, et du montant du Smic mahorais à cette époque (568 € contre 1286 € en métropole), deux cadres d'emplois, qui devaient être transitoires, ont été créés : le cadre d'emplois des agents territoriaux et celui des Agents Ouvriers Territoriaux de Mayotte (AOTM). Ces cadres d'emplois se caractérisaientpar un début de carrière à l'indice brut 100 jusqu'à l'IB maximum de 250, le déroulement de carrière pouvait alors prendre de 12 à 18 ans. Le provisoire était installé pour les agents de la fonction publique territoriale même si la Direction Générale des Collectivités Locales (DGCL) s'était engagée à proposer un texte afin de fermer un jour ce dispositif périssable qui devait donc s'éteindre aussi au 31 décembre 2010.
Or, les intégrations des agents de la fonction publique Mahoraise dans les cadres d'emplois des AOTM ne se sont pas produites à un rythme satisfaisant permettant de tenir les objectifs fixés par la loi, à savoir l'intégration avant le 31 décembre 2010 de l'ensemble des agents. En 2007, le rapport de l'inspection générale du CNFPT (Centre National de la Fonction Publique Territoriale) constatait que 20 % seulement des personnels avaient demandé leur intégration, en raison de la faible attractivité de ces cadres d'emplois.
Avec le temps, le climat social s'est durcit et le Préfet avait été amené à négocier avec les partenaires sociaux et institutionnels, trouvant ainsi un protocole d'accord dit "protocole Robin" relatif à l'intégration des agents publics de Mayotte dans les fonctions publiques de droit commun.
Ce protocole signé le 8 avril 2009 prévoyait un certain nombre d'avancées, notamment :
- l'amélioration de la grille indiciaire des cadres d'emplois dits «passerelles»
- la durée de carrière réduite à 6 échelons, chacun d'une durée d'un an, mais sans mini ni maxi,
- l'intégration automatique pour ces agents dans les corps ou cadres d'emplois de droit commun dès lors qu'ils ont atteint l'indice majoré de début de carrière de la catégorie C, c'est à dire au moment du basculement du 5ème au 6ème échelon (indice majoré 309).
Cependant, l'intégration dans les cadres d'emplois des AOTM a été prévue délibérément sans reprise d'ancienneté et ce, avec le quitus donné par les syndicats.
Grâce à cette avancée bancale, tous les agents de la Fonction Publique Mahoraise ont été intégrés, à quelques rares exceptions, dans les cadres d'emplois de droit commun de la fonction publique territoriale sauf les hors catégorie, les AOTM.
Au 30 juin 2013, les AOTM étaient à Mayotte environ 3 600 soit 66% des catégories dites C sur le territoire.
Et les conséquences sont aujourd'hui dramatiques. C'est ce qu'indique le rapport du CSFPT : "il est vrai qu'une des raisons de cette situation particulière est qu'on a «oublié», dans leurs cadres d'emplois, de mentionner expressément une date d'extinction dudit cadre, alors que c'était le cas dans la Fonction Publique de l'Etat. Et puis, au moment de la revalorisation de la catégorie C, on a «oublié» qu'il existait une population d'agents dont l'indice majoré est inférieur à 309, les AOTM. Et ce dernier «oubli» exclut désormais les AOTM d'un passage automatique en catégorie C à la fin de leur carrière. Ils vont stagner dans un cadre d'emplois qui pourtant était dit provisoire".
Et le rapport d'ajouter une petite note qui revêt une importance capitale : "pourtant, l'attachement de Mayotte à la France et aux valeurs de la République n'est plus à démontrer. Mayotte envers et contre tout et tous a voulu rester française." (…) "Les agents témoignent aussi de leur amertume car ils se croyaient citoyens à part entière et demandent en conséquence l'égalité républicaine avec les autres agents publics, qui pour l'instant leur est refusée."
Dans cet esprit, le document présenté mercredi en séance plénière du CSFPT préconise de manière aussi forte qu'incontournable : "il est temps de prévoir un terme à l'existence des cadres d'emplois transitoires dès le 1er janvier 2015 ou à défaut le 1er du mois suivant la parution du décret. Il importe de fixer une date d'extinction du dispositif des cadres d'emplois «hors catégories» en interdisant de nouveaux recrutements dans ces cadres d'emplois après 2015."
Mais quels sont les véritables problèmes aujourd'hui de ces oubliés de la République ?
Le rapport est parfaitement clair sur le sujet et l'un des premiers nœuds vient de l'ancienneté.
Comme dit plus haut, lorsque les agents de la Fonction Publique locale ont été intégrés dans le cadre d'emplois transitoire des AOTM, aucune ancienneté n'a été reprise. De plus, il n'a pas été possible de différencier la situation des agents en fonction de leur ancienneté de leur expérience ou de leurs compétences.
Pour le CSFPT, "cette question de la non reprise de l'ancienneté est dérogatoire aux règles statutaires de droit commun…"
Pourquoi ? Tout simplement parce que les AOTM du corps transitoire espérant un jour devenir des catégories C intégrés, ne sont rien d'autre que des catégories D qui n'existent plus en France depuis 27 ans.
Avec un indice Brut maximal fixé à 250 lorsqu'il faut atteindre 309 pour basculer en C, cela revient à condamner ces travailleurs Mahorais qui exercent parfois depuis 25 ou 30 ans.
Le rapport du CSFPT relève encore que le conseil général a voulu palier cela en procédant à l'intégration de 400 agents se trouvant dans cette situation d'infortune. Mais la préfecture est passée derrière, annulant la procédure en faisant jouer le contrôle de légalité pour des raison un peu compliquées. Mais de manière étonnante, "si elle a certes appliqué les textes en vigueur, que penser d'un texte dans lequel a été oublié la date d'extinction du cadre d'emplois à l'inverse de celui régissant le corps similaire des agents de l'Etat et ce depuis 10 ans?" surligne le rapport marquant ainsi une nouvelle fois l'injustice.
C'est pourquoi le conseil préconise avec force, "de prévoir une date butoir aux intégrations des AOTM en catégorie C au 1er janvier 2018" mais aussi de "revoir les conditions d'intégration des AOTM dans les cadres d'emplois de la catégorie C en prenant en compte leur ancienneté en tant que fonctionnaires."
Très bien, mais comment faire si les indices bruts des AOTM sont à 250 alors qu'ils leur faut 309 ? Pire, la réforme des carrières des fonctionnaires relevant de la catégorie C et B est entrée en vigueur à compter du 1er février 2014.
Elle fait passer l'indice des catégories C de 309 à 316 et pour l'heure, "aucun texte réglementaire n'est annoncé pour revoir la grille indiciaire des AOTM" (…) "Maintenant, ce basculement automatique n'est plus possible, puisque le premier indice majoré de la catégorie C est désormais 316. Une de fois de plus, si rien n'est fait, les AOTM vont rester bloqués à l'IM 309 et personne ne sait ou ne se préoccupe de ce qu'ils vont devenir. Il ne semble pas que le Gouvernement lorsqu'il a revalorisé les catégories C se soit souvenu des AOTM" tempête le CSFPT qui propose deux solutions : "prévoir un dispositif pour revaloriser également les carrières des AOTM lorsque les cadres d'emplois de catégorie C sont revalorisés et rédiger de façon efficace l'article 11 des décrets relatifs aux Atsem…"
Les ATSEM ? Qu'est-ce cette chose là ? Et oui, les choses se compliquent encore. Il existe dans la population des AOTM des agents titulaires du CAP petite enfance, titre nécessaire pour intégrer le cadre d'emplois des ATSEM (Agents Territoriaux Spécialisés des Écoles Maternelles).
Le CNFPT Mayotte avait accompagné il y a quelques années une démarche de qualification des ATSEM afin de les préparer à l'examen du CAP petite enfance en donnant une large place à la validation des acquis. Sur 350 candidats, 280 avaient réussi l'examen. Or, il n'y avait que 60 postes à distribuer et il n'a pas été possible d'intégrer les évincés par leur seul diplôme ce qui avait pourtant été autorisé autrefois par le Préfet à l'égard des policiers municipaux.
"Il est donc nécessaire de prévoir une intégration automatique des AOTM dotés du CAP petite enfance dans le cadre d'emploi des ATSEM" propose le CSFPT.
Viennent enfin les conclusions du CSFPT et elles sont sans appel.
"Etre citoyen, et Mayotte a montré son attachement à la République, c'est avoir les mêmes droits et devoirs que les autres. Si rien n'est dit, si rien n'est fait, les AOTM vont rester dans une situation peu avantageuse et inéquitable par rapport à leurs homologues des deux autres versants de la Fonction Publique. Ce qui est profondément injuste. Pourtant l'unicité de la Fonction Publique est un des principes majeurs et les pouvoirs publics entendent affirmer ce principe notamment à travers l'instauration du Conseil Commun de la Fonction Publique. Mayotte a besoin d'agents publics motivés, car reconnus. Reconnaître qu'il faut résoudre la question des cadres d'emplois des AOTM dans la Fonction Publique Territoriale serait un signe fort du Gouvernement. Pour que les agents et les ouvriers territoriaux de Mayotte ne soient pas les oubliés de la République, il est urgent d'agir."
3 600 hommes et femmes attendent donc aujourd'hui que leur sort soit réglé, ce qui ne sera sans doute jamais le cas si les choses restent en l'état. Non seulement les AOTM du corps transitoire ne bénéficieront pas des avantages de la fonction publique, mais en plus, ils n'auront jamais droit à leur ancienneté. Ceux qui auront travaillé 20 ans avant verront ainsi tout leur labeur effacé telle la craie sur un tableau noir.
Des générations d'écoliers Mahorais ont été sacrifiées faute d'intérêts de la France pour le territoire et aujourd'hui, des familles entières vont être propulsées dans la misère extrême pour avoir eu le tort un jour, d'avoir été oubliés par celle qu'ils ont tant aimé, la France.
Encore une fois, la départementalisation des terres a bien eu lieu, pas celle des hommes où les laissés pour compte se recensent par milliers, enterrés par une technocratie parisienne affrontant la crise et parvenant à de menues économies en piochant dans le social.
Samuel Boscher / FRANCE MAYOTTE Matin de Vendredi 4 juillet 2014
HabarizaComores.com | أخبار من جزر القمر.