Bonjour Madame Saïd Bacar, tout d’abord merci de nous accorder cet entretien. Pouvez-vous vous présenter en quelques mots et nous décrire v...
Bonjour Madame Saïd Bacar, tout d’abord merci de nous accorder cet entretien.
Pouvez-vous vous présenter en quelques mots et nous décrire votre parcours scolaire et professionnel ?
Mon nom est Faïzat Saïd Bacar. Après une maîtrise de Droit des affaires à l’Université de Cergy-Pontoise, je me suis spécialisée en droit pénal financier à l’Université d’Aix-en-Provence où j’ai obtenu un Master 2 « Lutte contre la Délinquance Financière et Organisée » et un Diplôme d’Etudes Supérieures Universitaire à double compétence en Finance et en Droit Pénal.
Depuis presque deux ans maintenant, mon emploi principal consiste à diriger l’Association Professionnelle des Banques et Établissements Financiers des Comores.
Je suis également membre de l’Association 2 Mains. Je me suis reconnue dans la vision de cette association qui permet de valoriser le partenariat entre les communautés locales et la diaspora pour un développement durable et socialement responsable. L’Association intervient sur les trois îles avec, par exemple, la mise en place d’un programme de potabilisation de l’eau dans 15 villages de Ngazidja (Grande-Comores) ou encore, le déploiement du projet « filière ylang-ylang durable » à Ndzuani (Anjouan) et Mwali (Mohéli).
Quels sont les 3 mots qui vous caractérisent le mieux ?
D’un point de vue professionnel, les trois mots qui me définissent le mieux sont, à mon avis, pragmatisme, persévérance et, puisqu’il en faut 3, créativité. Parce qu’il est rare que l’environnement s’adapte à nos objectifs. Pour être efficace, il faut sans cesse tenir compte de réalités sous-jacentes, s’adapter aux situations qu’on ne peut pas changer et réinventer en permanence les moyens d’arriver à ses fins, sans jamais baisser les bras.
Le fait que vous soyez une femme a-t-il eu une incidence sur votre carrière ?
Pas vraiment, non. Je n’ai jamais ressenti d’incidence directe sur ma carrière. Mais la société comorienne est faite de codes spécifiques pour la femme. C’est une réalité à gérer au quotidien avec, parfois, des implications assez pesantes. Pour moi, les considérations strictement culturelles doivent rester dans la sphère privée. Ma mère a élevé des filles et des garçons, toujours sur un pied d’égalité. Je n’attends pas des autres qu’ils adoptent cette vision mais je ne souhaite pas qu’on m’en impose une autre.
Certaines attitudes, qui pourraient peut-être se justifier dans un autre contexte, n’ont pas leur place dans des rapports professionnels et il m’est arrivé d’avoir besoin de le rappeler.
Quelle est votre perception de la parité hommes-femmes aux Comores ?
La faible représentation des femmes aux fonctions et dans les instances de décision est préoccupante. Il suffit de regarder les organigrammes de toutes les administrations pour le constater.
Aujourd’hui, de plus en plus de femmes sont qualifiées. Malgré le poids des coutumes, la femme comorienne a acquis le droit d’être présente et de se faire entendre sur « la place publique ». Les a priori liés aux fonctions que la femme est sensée assurer sont pratiquement vaincus. Les mentalités évoluent.
Malgré cela, la femme comorienne manque cruellement d’ambitions et de confiance en elle. Les jeunes femmes sont encore trop nombreuses à abandonner les études sans diplôme ni projet professionnel, elles sont peu nombreuses à s’impliquer en politique.
C’est donc aux femmes, et j’entends par là « à chaque femme », de se faire une place, de s’imposer. C’est un combat individuel, autant qu’une cause collective.
Vous venez de monter une association, pouvez-vous nous en dire plus ?
En réalité, l’Association Professionnelle des Banques et Établissements Financiers (APBEF) existait depuis 2008, mais de manière très peu formelle. Arrivée en avril 2012, j’ai simplement mis en place le secrétariat permanent et structuré le fonctionnement de l’Association et l’organisation des activités.
L’APBEF regroupe les institutions financières agréées par la Banque Centrale des Comores. Il s’agit des banques commerciales, des institutions de microfinance que sont les Sanduk et les Mecks, et des intermédiaires financiers, à l’exemple de la Maison Comorienne de Transfert de Valeurs. A travers l’amélioration de l’environnement, le renforcement des capacités et le développement du secteur financier, nous œuvrons à la construction d’une infrastructure financière viable, capable de soutenir la lutte contre la pauvreté en couvrant les besoins en services financiers de toutes les couches de la population. Je suis convaincue qu’une infrastructure financière adéquate est indispensable au développement de l’entreprenariat productif local. Malgré l’importance des défis à relever, cette conviction suffit à nourrir mon engagement pour le développement du secteur financier et microfinancier comorien.
D’une façon générale, quel rôle, selon vous, les femmes doivent-elles aujourd’hui jouer pour le développement de leur pays ?
J’aimerais pouvoir dire que la femme n’a pas de rôle spécifique à jouer. Il faut que les femmes, au moins au même titre que les hommes, soient impliquées dans la vie sociale et économique. Il faut qu’elles prennent conscience qu’en tant que citoyennes (et non pas en tant que femmes) elles ont un rôle social et économique à jouer.
Ensuite, puisqu’il faut tenir compte des réalités culturelles, force est de constater que les femmes ont un très grand rôle à jouer dans l’éducation. Je parlais tout à l’heure de confiance en soi et d’ambitions. Ce sont des choses qui se développent au sein de l’environnement familial. C’est le rôle de tout parent de susciter de l’ambition, de responsabiliser le futur citoyen par rapport à son avenir. Aux Comores, ce rôle est porté essentiellement par les femmes.
Quels conseils donneriez-vous aujourd’hui aux jeunes Comoriens, hommes et femmes, qui souhaitent contribuer au développement de leur pays ?
Je pense qu’il est essentiel de se rappeler que nous sommes tous, autant que nous sommes, acteurs et responsables du développement de notre pays. Simplement, chacun doit tenir compte de ce qui est possible à son niveau et avoir conscience que les petites actions comptent autant que les grands projets. Je suis convaincue que l’on participe de manière plus efficace au développement en nous épanouissant dans un domaine qui nous correspond, qui nous stimule et qui nous pousse à donner le meilleur de nous-même.
C’est vrai qu’à l’échelle individuelle, il est difficile de mesurer le progrès. Mais il faut savoir se satisfaire de chaque petite victoire et ne surtout pas perdre espoir.
Merci beaucoup pour le temps que vous nous avez accordé, nous vous souhaitons une bonne continuation et une bonne réussite dans vos projets aussi bien personnels que professionnels.
Merci à vous pour l’intérêt que vous portez aux femmes comoriennes.
Mon nom est Faïzat Saïd Bacar. Après une maîtrise de Droit des affaires à l’Université de Cergy-Pontoise, je me suis spécialisée en droit pénal financier à l’Université d’Aix-en-Provence où j’ai obtenu un Master 2 « Lutte contre la Délinquance Financière et Organisée » et un Diplôme d’Etudes Supérieures Universitaire à double compétence en Finance et en Droit Pénal.
Depuis presque deux ans maintenant, mon emploi principal consiste à diriger l’Association Professionnelle des Banques et Établissements Financiers des Comores.
Je suis également membre de l’Association 2 Mains. Je me suis reconnue dans la vision de cette association qui permet de valoriser le partenariat entre les communautés locales et la diaspora pour un développement durable et socialement responsable. L’Association intervient sur les trois îles avec, par exemple, la mise en place d’un programme de potabilisation de l’eau dans 15 villages de Ngazidja (Grande-Comores) ou encore, le déploiement du projet « filière ylang-ylang durable » à Ndzuani (Anjouan) et Mwali (Mohéli).
Quels sont les 3 mots qui vous caractérisent le mieux ?
D’un point de vue professionnel, les trois mots qui me définissent le mieux sont, à mon avis, pragmatisme, persévérance et, puisqu’il en faut 3, créativité. Parce qu’il est rare que l’environnement s’adapte à nos objectifs. Pour être efficace, il faut sans cesse tenir compte de réalités sous-jacentes, s’adapter aux situations qu’on ne peut pas changer et réinventer en permanence les moyens d’arriver à ses fins, sans jamais baisser les bras.
Le fait que vous soyez une femme a-t-il eu une incidence sur votre carrière ?
Pas vraiment, non. Je n’ai jamais ressenti d’incidence directe sur ma carrière. Mais la société comorienne est faite de codes spécifiques pour la femme. C’est une réalité à gérer au quotidien avec, parfois, des implications assez pesantes. Pour moi, les considérations strictement culturelles doivent rester dans la sphère privée. Ma mère a élevé des filles et des garçons, toujours sur un pied d’égalité. Je n’attends pas des autres qu’ils adoptent cette vision mais je ne souhaite pas qu’on m’en impose une autre.
Certaines attitudes, qui pourraient peut-être se justifier dans un autre contexte, n’ont pas leur place dans des rapports professionnels et il m’est arrivé d’avoir besoin de le rappeler.
Quelle est votre perception de la parité hommes-femmes aux Comores ?
La faible représentation des femmes aux fonctions et dans les instances de décision est préoccupante. Il suffit de regarder les organigrammes de toutes les administrations pour le constater.
Aujourd’hui, de plus en plus de femmes sont qualifiées. Malgré le poids des coutumes, la femme comorienne a acquis le droit d’être présente et de se faire entendre sur « la place publique ». Les a priori liés aux fonctions que la femme est sensée assurer sont pratiquement vaincus. Les mentalités évoluent.
Malgré cela, la femme comorienne manque cruellement d’ambitions et de confiance en elle. Les jeunes femmes sont encore trop nombreuses à abandonner les études sans diplôme ni projet professionnel, elles sont peu nombreuses à s’impliquer en politique.
C’est donc aux femmes, et j’entends par là « à chaque femme », de se faire une place, de s’imposer. C’est un combat individuel, autant qu’une cause collective.
Vous venez de monter une association, pouvez-vous nous en dire plus ?
En réalité, l’Association Professionnelle des Banques et Établissements Financiers (APBEF) existait depuis 2008, mais de manière très peu formelle. Arrivée en avril 2012, j’ai simplement mis en place le secrétariat permanent et structuré le fonctionnement de l’Association et l’organisation des activités.
L’APBEF regroupe les institutions financières agréées par la Banque Centrale des Comores. Il s’agit des banques commerciales, des institutions de microfinance que sont les Sanduk et les Mecks, et des intermédiaires financiers, à l’exemple de la Maison Comorienne de Transfert de Valeurs. A travers l’amélioration de l’environnement, le renforcement des capacités et le développement du secteur financier, nous œuvrons à la construction d’une infrastructure financière viable, capable de soutenir la lutte contre la pauvreté en couvrant les besoins en services financiers de toutes les couches de la population. Je suis convaincue qu’une infrastructure financière adéquate est indispensable au développement de l’entreprenariat productif local. Malgré l’importance des défis à relever, cette conviction suffit à nourrir mon engagement pour le développement du secteur financier et microfinancier comorien.
D’une façon générale, quel rôle, selon vous, les femmes doivent-elles aujourd’hui jouer pour le développement de leur pays ?
J’aimerais pouvoir dire que la femme n’a pas de rôle spécifique à jouer. Il faut que les femmes, au moins au même titre que les hommes, soient impliquées dans la vie sociale et économique. Il faut qu’elles prennent conscience qu’en tant que citoyennes (et non pas en tant que femmes) elles ont un rôle social et économique à jouer.
Ensuite, puisqu’il faut tenir compte des réalités culturelles, force est de constater que les femmes ont un très grand rôle à jouer dans l’éducation. Je parlais tout à l’heure de confiance en soi et d’ambitions. Ce sont des choses qui se développent au sein de l’environnement familial. C’est le rôle de tout parent de susciter de l’ambition, de responsabiliser le futur citoyen par rapport à son avenir. Aux Comores, ce rôle est porté essentiellement par les femmes.
Quels conseils donneriez-vous aujourd’hui aux jeunes Comoriens, hommes et femmes, qui souhaitent contribuer au développement de leur pays ?
Je pense qu’il est essentiel de se rappeler que nous sommes tous, autant que nous sommes, acteurs et responsables du développement de notre pays. Simplement, chacun doit tenir compte de ce qui est possible à son niveau et avoir conscience que les petites actions comptent autant que les grands projets. Je suis convaincue que l’on participe de manière plus efficace au développement en nous épanouissant dans un domaine qui nous correspond, qui nous stimule et qui nous pousse à donner le meilleur de nous-même.
C’est vrai qu’à l’échelle individuelle, il est difficile de mesurer le progrès. Mais il faut savoir se satisfaire de chaque petite victoire et ne surtout pas perdre espoir.
Merci beaucoup pour le temps que vous nous avez accordé, nous vous souhaitons une bonne continuation et une bonne réussite dans vos projets aussi bien personnels que professionnels.
Merci à vous pour l’intérêt que vous portez aux femmes comoriennes.
Avec l'Ambassade de France