Pendant que Mohéli est transformée en dictature à ciel ouvert, la FCDH se tait. FCDH: Fondation comorienne des Droits de l’Homme ou Foye...
Pendant que Mohéli est transformée en dictature à ciel ouvert, la FCDH se tait.
FCDH: Fondation comorienne des Droits de l’Homme ou Foyer de la Complaisance, de la Démagogie et de l’Humour? La question se pose car il fut un temps, la Fondation comorienne des Droits de l’Homme (FCDH), sous la houlette de son Président, Mohamed-Nansuri Riziki Mohamed, dénonçait les violations des Droits de l’Homme aux Comores, en s’intéressant à des cas particuliers. Régulièrement, ses rapports étaient cités par la presse internationale, et en la matière, il y avait une certaine lisibilité. Il était fréquent de suivre l’activité de la FCDH sur Radio France Internationale (RFI), qui faisait état des violations des Droits de l’Homme sur le territoire de l’Union des Comores en se basant sur les communiqués de la FCDH. Pourtant, rétrospectivement, quand on analyse le contenu desdits Rapports, on constate que ceux-ci concernaient surtout la satrapie catastrophique du dictateur de village qu’était le sinistre Mohamed Bacar à Anjouan. La FCDH avait fait un travail remarquable pour dénoncer les violations des Droits humains sur l’île de Mohamed Bacar. Mais, depuis que celui-ci y a été délogé le 25 mars 2008, la FCDH est tout simplement à court de sujets et fait dans le silence et l’autocensure. Elle veut tellement plaire aux autorités qu’elle ne dit rien. Elle n’existe plus.
Or, le Président de la FCDH, Mohamed-Nansuri Riziki Mohamed, doyen des journalistes à Mohéli, est sans doute l’homme le mieux renseigné de l’île. Pourtant, en dehors de quelques «dénonciations» qu’il fait pour le principe, on ne l’entend plus souvent. Aujourd’hui, alors que le journaliste Mouayad Salim, correspondant de La Gazette des Comores à Mohéli, est persécuté par une «Justice» aux ordres du Gouverneur Mohamed Ali Saïd, une «Justice» portant le visage de Mme Zamzam Ismaïl, la Procureure de la République à Mohéli, on aurait voulu entendre la FCDH dénoncer une persécution indigne et injustifiée. Mais, une fois de plus, les Comoriens constatent que la FCDH est devenue taiseuse dès qu’elle est en présence du chef de l’exécutif mohélien. Elle a également peur des autorités de l’Union des Comores. Une telle attitude ne peut s’expliquer que d’une seule manière: il y a complicité, et celle-ci est indécente. La FCDH n’est pas créée pour plaire, mais pour dénoncer des abus inacceptables.
À Mohéli, il y a trop de violations de Droits de l’Homme par le Gouverneur Mohamed Ali Saïd, et le Président de la FCDH a choisi ce moment pour dire qu’il a une extinction de voix. Il a choisi ce moment pour dire que son stylo est à court d’encre. Il a choisi ce moment pour dire que son ordinateur ne s’allume plus. Il a choisi ce moment pour dire qu’il n’a pas le temps de s’occuper des abus commis à Mohéli par Mohamed Ali Saïd. Très drôle. On l’aura compris: son extinction de voix relève de la maladie diplomatique, une maladie imaginaire.
Or, si on doit appeler le chat par son nom, nous devons reconnaître que l’affaire Mouayad Salim est grave car un journaliste est en mis en danger par la dictature d’un homme qui n’a jamais entendu parler des notions de «Droits de l’Homme», de «Liberté de la Presse» et de «Liberté d’expression». Pour tour tout dire, Mohamed Ali Saïd s’en contrefiche. De fait, l’affaire Mouayad Salim attend de nous une mobilisation totale et permanente, jusqu’à ce que le Gouverneur et la Procureur lui fichent la paix. Au lieu de cela, la FCDH ne pipe mot. Elle se tait pour ne pas froisser le satrape de la satrapie de Bonovo. Or, si un seul journaliste est persécuté, d’autres suivront. Et quand on fait le bilan de la période actuelle, marquée par un manque de sang-froid de la part des dirigeants au pouvoir ou en vadrouille en France pour voler et manipuler des images, les journalistes font les frais des fantasmagories dictatoriales de faux hommes d’État. Le tout se passe dans un silence total de la FCDH. Pourtant, il ne s’agit pas de cas individuels, mais d’une atteinte générale à la liberté de la presse.
À un moment où la FCDH est en pleine démission et semble avoir oublié la définition des Droits de l’Homme, il est nécessaire de lui rappeler qu’il s’agit de l’ensemble de droits, libertés et prérogatives qui sont reconnus à l’Homme en sa qualité d’être humain. L’Homme a des droits uniquement parce qu’il est l’Homme. Ces Droits sont antérieurs et supérieurs à l’État, et n’admettent aucune restriction, ni abus. Pour comprendre les dangers véhiculés par le silence de la FCDH, il faut partir de l’idée selon laquelle les Droits de l’Homme peuvent être regroupés dans les 3 grandes générations auxquelles ils appartiennent, que le pouvoir mohélien – et comorien, en général – ne respecte guère et n’est guère soucieux de respecter:
- La première génération des Droits de l’Homme regroupe les droits civils et politiques ou «Droits-libertés». Les droits civils comprennent la liberté physique, la liberté familiale, la liberté contractuelle et le droit à la propriété privée… S’agissant des droits politiques, ils regroupent le droit de vote, le droit de résister à l’oppression, notamment à celle de Mohamed Ali Saïd, le droit de réunion pacifique – Mohamed Ali Saïd ne veut pas de réunions de l’opposition à Mohéli, même quand il s’agit de réunions pacifiques –, la liberté de culte, de conscience, d’enseignement, de communication, d’enseignement, etc.
- La deuxième génération concerne le travail, la Sécurité sociale, l’éducation, la grève, la liberté syndicale, etc. C’est un domaine dans lequel les Comores sont démissionnaires.
- La troisième génération des Droits de l’Homme regroupe le droit à un environnement salubre (Volo-Volo!), au développement, à la paix, à la différence et à la démocratie.
Ces droits ne sont pas cités pour donner un cours magistral mais pour démontrer qu’ils sont tous violés sur l’ensemble du territoire comorien, et en particulier à Mohéli. Pourtant, la FCDH se tait. Elle garde un silence complice. Or, tout le monde sait ce qui se passe: la liberté d’expression est supprimée, et à Djoiezi, on fait du Badri pour demander le châtiment de Dieu sur ceux qui osent parler du Président de la République. Cela traumatise les gens, pour des raisons culturelles, et du coup, au lieu de dénoncer des abus, on s’oblige au silence. À Mohéli, une grève des enseignants entraîne l’emprisonnement et le licenciement de ces derniers par Mohamed Ali Saïd, alors que c’est une affaire qui doit se régler dans les milieux de l’enseignement. À Moroni, on vit au-dessus et au-dessous des ordures ménagères, qui ont envahi toute la ville. Il n’y a ni eau, ni électricité, mais les factures tombent et plombent la comptabilité de ménages déjà frappés au porte-monnaie. On travaille sans aucune couverture sociale. Les autorités font d’indécents tripatouillages des élections, de la fixation polémique du calendrier des scrutins aux résultats truqués. L’École publique est morte. L’École privée est un pis-aller. Aucun Comorien n’a droit à la Sécurité sociale, dans un pays où il n’y en a pas puisque les autorités et les leurs se soignent à l’étranger. Malgré tout, la FCDH se tait.
La situation des droits de l’Homme est déplorable sur l’ensemble des Comores, mais à Mohéli, la situation est pire car le pouvoir civil est incarné par le Gouverneur Mohamed Ali Saïd, et le pouvoir militaire est personnalisé par le Colonel Mohamed Anrifi Moustoifa Bacar Madi dit «José», dit «Obama», et ces deux individus représentent un duo infernal, un duo militaro-civil qui brutalise en toute impunité le tout-Mohéli. Mais, la FCDH se tait.
Les Comores sont donc dans une situation très dangereuse car les Comoriens n’ont aucune protection juridique, l’appareil judiciaire étant englué dans la corruption et l’incompétence depuis des années, sans aucune possibilité de remède, étant donné la personnalité contestable des magistrats. Et quand on est confronté à des problèmes avec lui, on n’a aucune possibilité de se faire assister par la FCDH, le Foyer de la Complaisance, de la Démagogie et de l’Humour. Or, la FCDH devait être un rempart face aux abus d’un appareil judiciaire qui n’est pas capable de faire son travail puisque démissionnaire, incompétent et corrompu. Certains préconisent la mise en place d’un Observatoire des Droits de l’Homme. Mais, à quoi servirait ce dernier si pour se taire face aux violations massives des Droits de l’Homme aux Comores?
Les Comores ont besoin d’un changement de mentalités pour que les gens comprennent que l’autorité doit être critiquée car si on la laisse faire sans un droit de regard sur ce qu’elle fait au sein de l’appareil d’État, le pays s’enfonce dans la dictature et dans la pauvreté. Le dirigeant ne peut voir que par les yeux du citoyen, et ces yeux ne doivent pas être bandés.
Par ARM
© www.lemohelien.com – Samedi 15 février 2014.