Patricia, une migrante violée, jetée en prison puis expulsée. Patricia, jeune camerounaise de 28 ans, entrée clandestinement il y a cinq m...
Patricia, une migrante violée, jetée en prison puis expulsée.
Patricia, jeune camerounaise de 28 ans, entrée clandestinement il y a cinq mois en Algérie, n’aurait jamais cru que ce pays lui ferait vivre son pire cauchemar.
Violée par un Algérien dans une rue
sombre d’Oran, elle a été rabrouée par la Police et la Gendarmerie qui
auraient refusé de prendre sa plainte pour viol. Leur motif : son séjour
illégal qui lui a d’ailleurs valu plusieurs nuits en prison. Suite à
son insistance, son présumé violeur convoqué par la police suite aux
accusations de la jeune femme, a été acquitté par le Procureur de la
République au près du tribunal de Sidi Djamel d’Oran. Patricia n’a que
quelques jours pour quitter le territoire Algérien. La jeune femme a
toujours du mal à se remettre de ce drame.
« Je vais un peu mieux ».
Patricia parlait ce matin même d’une voix à peine audible. D’après sa soeur, elle ne parle pratiquement plus.
« Elle tente de s’en remettre, elle a du mal à parler, elle est suivie par un psychiatre mais je crois qu’elle est traumatisée » expliquait sa soeur.
L’Algérie, jadis terre d’asile,
accueillait les étrangers avec hospitalité. Aujourd’hui, elle traque les
migrants. 41 000 expulsions de migrants subsahariens ont eu lieu entre
2009 et 2011. Bafouant les conventions internationales signées au
lendemain de l’indépendance, l’Algérie n’hésite pas à jeter en prison
une migrante victime de viol pour séjour illégal avant de la libérer en
lui ordonnant de quitter le territoire national. L’événement est loin de
créer le scandale.
« Je suis libre en Algérie »
Dans un café de la capitale, Djamel, 69 ans, et Imad, 27 ans, font la conversation en parcourant les gros titres de la presse.
• Qu’est-elle venue faire en Algérie ? lance le jeune homme en écrasant sa cigarette.
• Le pire, c’est qu’elle a fini en
prison à la place de son agresseur, justement pour séjour illégal,
rétorque Djamel en portant les mains sur ses cheveux grisonnants.
• T’emporte pas Aamo (mon oncle, marque de respect envers les ainés, ndlr), si j’étais flic j’aurais pris sa plainte et j’aurais mis son agresseur en prison.
• Et dire qu’à une époque pas si lointaine, l’Algérie était une terre d’accueil…
• Tu parles de cette Algérie que je n’ai pas connue ? ironise le jeune homme avant de réclamer un second café au serveur.
• Oui, c’est vrai, tu n’étais pas encore né.
• Mais je me rappelle de septembre 2011, toute la famille El Gueddafi a été accueillie à Alger pour «des raisons humanitaires».
• Wach men (Quelle?) Humanité ? C’est du racisme !
• Je ne suis pas raciste, je dis simplement qu’on a assez de problèmes à gérer… lâche Imad en saisissant brusquement le sucrier sur la table.
• Et donc on les viole pour les punir ? répond Djamel, le visage convulsé par la colère.
• Mais non, mais leur séjour en Algérie est illégal donc…
• Miriam Makeba avait chanté une sublime
chanson lors du Panaf en 1969 : Ana Horra Fi El Djazaïr (Je suis libre
en Algérie)… s’exclame Djamel à présent calme.
• Les temps ont changé.
• Imagine un instant que Patricia tombe enceinte.
• Qui est Patricia ?
• La jeune migrante violée à Oran, elle s’appelle comme ça…
• Son enfant aurait le droit du sol ?
• Quelle horreur de penser comme ça…
• Hadi hya Edzaïr Aamo (c’est ça l’Algérie mon oncle).