Discours en langue française du Président Ahmed Abdallah SAMBI prononcé le 18 Août 2013 à Anjouan

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Après le discours du Président Ahmed Abdallah SAMBI  tenu à son domicile de Missiri à Anjouan le 18 Août 2013, et compte tenu de l’eng...

Après le discours du Président Ahmed Abdallah SAMBI  tenu à son domicile de Missiri à Anjouan le 18 Août 2013, et compte tenu de l’engouement et de l’intérêt manifestés par les comoriens tant de l’intérieur que de l’extérieur et bon nombre de gens de différentes nationalités ;  et dans le souci de retranscrire avec fidélité sa parole et ses pensées, nous, ses amis avons jugé nécessaire et opportun de procéder à sa traduction. A noter que pour des raisons purement techniques, certaines répétitions ont été volontairement omises pour faciliter la lecture sans pour autant altérer l’essentiel de ce discours historique.              

À vous qui êtes présents ici, je vous transmets mes chaleureuses salutations, que Dieu vous bénisse. À ceux qui vont m’écouter à cet instant ici chez moi, comme ailleurs sur l’ensemble du territoire (Mayotte, Anjouan, Mohéli et Grande Comore) et ceux qui sont en dehors du territoire ainsi que ceux qui vont m’écouter plus tard, que Dieu vous protège et que vous soyez de ceux qui auront béni ce pays et parmi ceux qui, au jugement dernier, serez bénis de Dieu inch’Allah.

Comme convenu et de l’appel que j’avais lancé, j’avais pris l’engagement auprès de vous qu’à chaque fois que j’aurai un message important à vous transmettre, je le ferai conformément à cette promesse, car je ne suis pas de nature à céder à mes principes ni à céder aux intimidations.
Je sais que certains auraient souhaité me voir réduit au silence après que j’aie accepté la noble mission que vous aviez voulue me confier entre 2006 et 2011 ; mais de l’engagement que j’ai pris auprès de Dieu, je reste et resterai comme je l’ai été à votre service. Et cela conformément à l’honneur que vous m’aviez fait et que vous m’accordez jusqu’alors, il va de soi que je reste à mon tour entièrement à votre disposition. D’habitude c’est vous qui me conviez dans vos régions pour échanger et nous concerter, mais cette fois-ci c’est moi qui vous ai invité pour répondre à un certain nombre de vos questions. J’avais souhaité que cette rencontre se tienne à Bambao M’tsanga ce jour, mais j’ai été contraint de l’annuler car le Gouvernement du Président Ikililou Dhoinine me l’a interdit parce qu’elle ne se tenait pas dans un lieu fermé, et pour ce faire, j’ai préféré la tenir chez moi, dans ma maison et vous transmettre mon message à travers ce canal ; c’est pour cela que je vous ai demandé de me suivre à partir de chez vous.
Si vous vous demandez quel message j’ai à vous transmettre aujourd’hui, c’est tout à fait normal, ne soyez pas étonné car tout ce que j’ai à vous dire constitue un certain nombre de réponses aux multiples questions que vous ne cessez de me poser. Depuis un certain temps, j’ai remarqué, où que je sois, en France comme aux Comores, et même à travers le téléphone des gens de tous bords, les religieux, les politiques, les jeunes et le dernier en date, le Gouverneur de l’Ile d’Anjouan lors de la réception du Jour de l’Aid El Fitr ; et  au final tous les comoriens me posent ces questions et c’est entièrement leur droit et je me dois à mon tour de vous apporter avec toute la précision requise, avec la plus grande honnêteté et du plus profond de mon cœur les réponses appropriées.


Certains me posent les questions suivantes : Quel rapport avez vous avec le Président Ikililou ? Il semblerait que le contact est maintenu entre vous deux, voire même le fait que vous soyez régulièrement consulté pour de grandes décisions ? D’autres me demandent plutôt s’il est vrai que le dialogue est rompu et qu’aucun contact n’est actuellement maintenu ? Ou encore que je ne suis au courant de rien. Une autre catégorie me fait remarquer que c’est par mes recommandations que les comoriens ont choisi les autorités actuelles car elles vont assurer la continuité et qu’elle exige de moi un certain nombre de précisions, au vu de ce qui se passe aujourd’hui, tant sur le plan politique, économique et sur les projets initiés à notre temps. Beaucoup interprètent à leur façon l’état de nos relations entre le Président Ikililou et moi même. Je me suis posé la question pour savoir pourquoi tant de questions sur l’Etat de nos relations et je suis arrivé à la conclusion qu’en effet c’est grâce à moi et à mes collaborateurs que le Président actuel et ses vice-Présidents Mohamed Soilih, Nourdine Bourhane et Fouad Mohadj sont arrivés aux postes qu’ils occupent aujourd’hui et personne ne peut le contester. C’est donc normal que je sois ainsi interpellé car les comoriens ne comprennent pas pourquoi cette animosité, pourquoi ce revirement de leur part, si tel est le cas !


D’autres questions sont également posées notamment sur mon implication politique, au point d’être reproché qu’il n’est pas normal après que je fus investi par Dieu et par le peuple comorien pour avoir géré la destinée de celui-ci et de son pays, et au vu de l’amour et de la sympathie que me vouent jusqu’alors les comoriens ou encore au vu de la contribution que je pourrai apporter à certains pays de la région, qu’il serait inadmissible que je renonce à la politique. Et quelles seraient les raisons de cette renonciation, sinon si j’en fais pourquoi alors?
Par rapport à toutes ces questions et si j’en fais la synthèse je comprends que les comoriens préoccupés de cet état de fait voudraient savoir où en sommes nous et quelles seraient les perspectives. Exiger des réponses à ces questions est donc un droit pour vous et répondre est un devoir pour moi.
Avant de répondre à toutes ces questions, permettez moi de souligner un point auquel on omet souvent de me demander des précisions sur d’où l’on vient politiquement et apporter des éclaircissements permettra de mieux cerner mes réponses.


Vous devez savoir que le 26 mai 2006, j’ai prêté serment selon lequel je prends la lourde responsabilité de la destinée des Comores et de son peuple ; après que Dieu ait accepté de me hisser à ce rang et que les comoriens m’aient choisi, si vous vous souvenez bien, mon premier acte en ma qualité de Chef d’Etat a été de me prosterner pour exprimer ma reconnaissance au Dieu Tout Puissant mais aussi pour prier à ce que « je sois au service de l’Islam et des musulmans ».
Vous savez, mes chers frères et sœurs, assurer les fonctions de Président n’est pas chose aisée et je me souviens de ma première nuit en tant que Président, qu’elle a été une nuit blanche où je me disais que le peuple comorien m’a élu à cause de son amour et de sa confiance. Beaucoup de ces comoriens issus de milieux des plus modestes m’ont apporté leur soutien, tant matériel qu’humain et ma question était de savoir quelle réponse devrais-je apporter à leurs attentes.


Je vais vous livrer aujourd’hui une confidence que je n’ai jamais livré à qui que ce soit : lors de mes premiers jours de mandat et après avoir formé le premier Gouvernement, j’ai choisi quelques ministres et certains de mes proches collaborateurs pour discuter sur les actions immédiates, mais pertinentes et susceptibles de satisfaire les attentes du peuple comorien et plus particulièrement de ses électrices et électeurs démunis mais qui m’ont honoré par leur soutien. Beaucoup de suggestions ont été avancées sur plusieurs secteurs de développement mais après deux réunions, Docteur Bacar Ahmed Galela, cousin en même temps médecin privé et conseiller m’a suggéré de privilégier le secteur de l’emploi car seul capable d’aider les comoriens surtout les plus démunis. De tous les conseils qui m’ont été donnés celui là m’a paru des plus convaincants; je l’ai retenu tout en posant la question sur la démarche et la stratégie de création d’emplois. Pour ma part, considérant la beauté naturelle de notre pays et son emplacement stratégique, les secteurs du tourisme et de l’industrie m’avaient paru les mieux indiqués pour atteindre cet objectif. Certains des participants à la réunion m’avaient l’air sceptiques et ont répliqué que cela demande beaucoup d’argent. Et j’ai reposé, à mon tour, la question sur le nombre de comoriens milliardaires en francs comoriens. Il m’a été signifié qu’ils ne dépassent pas les doigts de la main, c’est à dire dix milliardaires, sachant bien qu’un milliard vaut deux millions d’euros. Pour ce faire, et sachant que « l’argent appelle l’argent » et que l’on n’a pas suffisamment de riches aux Comores, il en est ressorti qu’il faut aller les chercher ailleurs.


Sachant également et à titre d’exemple qu’un hôtel 4 ou 5 étoiles exige 10 millions de dollars et que si on n’en a pas aux Comores cela est grave, mes inquiétudes n’ont fait que redoubler. Convaincu de ce constat, c’est à dire d’aller chercher le financement à l’extérieur, et me rappelant que « l’argent n’aime pas le bruit », nous nous sommes posés la question sur la manière de persuader d’éventuels et potentiels investisseurs au profit de notre pays. Et la première réponse par rapport à cette démarche, fut la paix et la stabilité, mais au même moment d’autres conditions ont été avancées en plus de ces deux premières, à savoir l’eau, l’électricité, les banques, la justice, la communication, l’image du pays à l’extérieur, et les routes. Il s’agit là d’un vaste programme pour une durée de quatre ans selon la constitution. Compte tenu de l’ampleur de ce chantier, j’ai donc chargé mon frère et ami de longue date Bourhane Hamidou, actuel Président de l’Assemblée Nationale qui, à cette époque travaillait gracieusement pour l’Etat, pour me faire venir une quinzaine de religieux à la Présidence.  Après une prière d’une semaine tenue à Beit-Salam, les différents secteurs retenus étaient ancrés dans ma tête et j’ai décidé avec la bénédiction de Dieu à prendre à bras le corps ce grand chantier. Mais quelle fut ma surprise lorsque j’ai encore appris que nous étions pratiquement asphyxiés car non solvables auprès des Institutions financières internationales.

Nous avons ainsi engagé le programme que vous connaissez tous, c’est à dire le programme IPPTE. Telle est la situation qui se présentait lorsque nous avons accédé au pouvoir en 2006. En termes de stabilité politique en cette période, il n’est un secret pour personne qu’il y avait 4 présidents, 4 parlements, 4 constitutions, des conflits entre la tête de l’Etat et celle des Iles. Mais pire encore, l’existence de deux armées aux Comores : une pour Anjouan et une autre pour les deux autres Iles. Ce qui avait poussé Elback alors Président de la Grande Comore, d’exiger sa propre armée pour son Ile. Un drame pour un petit pays comme le nôtre qui ne compte pas un million d’habitants. En plus de cette multitude d’institutions, on avait pratiquement une élection par an jusqu’en 2019 excepté en 2011. Tout cela n’avait comme effet que de freiner le développement du pays et nous retarder à nous atteler sur les préoccupations de nos citoyens. Et comme vous le savez, aucun pays au monde, ne peut et ne doit disposer de deux armées. Et pourtant c’est la réalité à laquelle nous étions confronté en cette période et qui a poussé Mohamed Bacar à se rebeller et nous interdire de séjour à Anjouan, à commencer par moi-même. Et tous ceux qui prétendaient défendre l’unité et l’intégrité se trouvaient obligés de rentrer dans la clandestinité de peur de représailles qui leur étaient réservées.

Cette situation comme vous le savez nous a contraint, pour la stabilité du pays, à opter pour l’opération « Démocratie aux Comores » pour sauver l’intégrité et l’Unité du pays et par voie de conséquence la stabilité du pays. Et grâce à la bénédiction d’Allah, cette opération fut un succès extraordinaire, du jamais vu pour une opération militaire en Afrique. Le succès enregistré par cette opération était une interpellation divine au profit de l’unité et de l’intégrité du pays et un message fort contre tout séparatisme et toute dislocation du pays. Comment comprendre qu’Ahmed Abdallah Sambi ait pu convaincre les Chefs d’Etats de la Tanzanie et du Soudan à envoyer leurs propres enfants pour libérer l’Ile d’Anjouan et sauver les Comores ? Il ne faut pas croire que cela s’est fait sans efforts, mais plutôt grâce à une diplomatie de haut niveau. Et à l’occasion je remercie l’ancien ministre des affaires étrangères, Ahmed Jaffar, ici présent, et son homologue de la Défense pour tous les efforts déployés pour le succès de cette opération. Cette opération a été certes pour beaucoup dans la stabilité du pays, mais le plus déterminant fut le toilettage de la Constitution auquel vous avez voulu m’accorder encore une fois votre confiance. Ce fut comme je le disais un pas décisif car cela a permis d’alléger nos institutions et réduire la fréquence des élections. Un apport d’une importance capitale pour notre pays, qui a permis au président investi en mai 2011, de commencer son mandat dans la sérénité avec une majorité parlementaire, une armée unifiée, des conflits de compétences apaisés entre l’Union des Comores et les Iles contrairement au début de l’exercice de mon mandat.


On peut ainsi se permettre de considérer que depuis 2011, la paix et la stabilité ont été retrouvées. Mais vous vous souvenez bien que ce sont deux facteurs parmi d’autres pour ramener des investisseurs au pays. Il y a les routes et l’état dans lesquels ils étaient. Vous avez bien en mémoire les nids de poule qui jonchaient les routes de nos capitales et les coûts pour leur réfection et leur réhabilitation. En ce qui concerne les routes vous avez tous vu ce qui a été fait, car cela était une préoccupation majeure pour moi et vous avez également vu tous les engins qui nous ont été offerts par les Emirats, le Qatar et Oman. J’ai privilégié les routes et plus particulièrement celles des capitales et surtout celle de Moroni. Certains me reprochaient d’aimer la ville de Moroni et je leur dis c’est vrai je l’ai aimée, je l’aime, et je continuerai à l’aimer. Et je recommanderai à ce que chaque Président aime cette ville, car elle reste la vitrine de notre pays. Le plus préoccupant pour moi en ce qui concerne les routes était le goudron car on a beau avoir des engins mais sans goudron rien ne pouvait être fait.


Mais en plus de ce goudron il fallait de l’argent aussi bien pour les routes que pour les infrastructures de base. Et pour ce faire, une proposition nous a été faite et qui concerne la citoyenneté économique. Pour celle-ci, je voudrai que vous m’accordiez votre attention pour vous apporter les précisions nécessaires à ce sujet.


D’abord si l’on a accepté d’accorder notre citoyenneté à des non comoriens , c’est parce que vous l’aviez accepté à travers vos élus ; je veux dire que c’est par une loi votée à l’Assemblée Nationale que cette démarche a été entérinée. Ensuite, j’ai évalué les bénéfices de cette initiative et qui ne sont pas seulement d’ordre financier. C’est à dire que bon nombre de pays du Golfe, tels que les Emirats, l’Arabie Saoudite, le Qatar, le Koweit, il existe des natifs mais sans-papiers qui commencent à revendiquer leurs droits. Ainsi les Emirats Arabes Unis, nous ont sollicité à travers leur ministre de l’Intérieur Sheikh Saïf bin Zayed, qui a fait le déplacement jusqu’aux Comores pour discuter de cette démarche. Et pour notre part, il était normal que l’on donne notre accord, dès lors où pour la première fois, on nous sollicitait pour un appui à un pays frère musulman. Ainsi, au-delà, encore une fois, de l’impact financier de cette initiative, c’est la dimension humaine et relationnelle qui a prévalu en moi. J’ai donc accepté de leur accorder notre citoyenneté à cause de la fraternité qui lie nos deux pays et sachant qu’il s’agit d’un pays si riche, les retombées financières se seraient bien évidemment ressenties. Mais pour moi c’est un aspect secondaire car convaincu, qu’une fois les relations humaines renforcées et consolidées, le reste se ferait de soi-même. Pour cela je dirai que c’est comme un donneur de sang qui sait que la quantité de sang donnée revient aussitôt. Ce n’est ni un organe ni un membre qui a été donné mais du sang qui de toute manière est donné à un frère mais qui, à coup sûr, reviendrait.


Et à aucun moment je n’ai cherché à cacher quoi que ce soit sur cette démarche et d’ailleurs quand on a donné notre accord je l’ai annoncé, allant jusqu’à avancer certains détails comme le nombre de familles bénéficiaires de nos passeports. Initialement, 4000 familles étaient prévues pour une aide financière de 200 millions de dollars dont 175 millions pour les infrastructures et 25 millions pour une aide budgétaire. Mais par la suite, cet accord a apparemment été révisé et ce n’est plus au nombre de familles mais plutôt au nombre de personnes. Et en ce qui concerne les infrastructures, il s’agit d’abord et avant tout de la réfection et la réhabilitation des routes. Ensuite on avait convenu avec les autorités actuelles, à commencer par le Président Ikililou lui-même et son vice-président Nourdine Bourhane, qui n’oseront jamais dire le contraire, qu’après ces dernières il fallait absolument implanter sur l’ensemble du territoire des brigades dont une étude de faisabilité a été réalisée par un consultant en la personne de Andjib Saidali Youssouf et qui a nécessité plusieurs mois de travail pour renforcer la paix et la stabilité. Parmi d’autres secteurs retenus par rapport à ce financement, il y avait aussi l’achat d’engins pour le projet habitat, la construction de nouveaux logements pour nos fonctionnaires et bien entendu pour un certain nombre de nos hôtes. C’est sur la base de ces orientations que j’ai accepté d’octroyer ces passeports avec l’aval du Parlement. Aujourd’hui, le plus étonnant c’est qu’on m’interpelle moi pour exiger des comptes et des précisions. Je réponds donc que je suis le premier à vouloir savoir. Et j’ai tenu à fournir aujourd’hui toutes ces précisions pour vous prendre à témoin et surtout vous dire de ce que l’on avait convenu pour l’argent de la citoyenneté. En effet, à chaque fois que l’on cherche à souiller mon image, à m’insulter, on m’interpelle sur ces fonds de la citoyenneté, mais comme je l’ai dit plus haut, j’exige à mon tour des explications et des précisions en ma qualité d’ancien président, de citoyen et de patriote. Surtout que ce n’est pas moi qui gérais directement ces fonds. Ces derniers ont été gérés effectivement par Mohame Ali Soilihi alias Mamadou, Ikililou Dhoinine et Mohamed Bacar Dossar, tous ministres des finances pendant mon mandat. Et Dieu merci, un d’eux est revenu aujourd’hui en tant que vice-président chargé des finances.

D’ailleurs il me semble que même le Gouverneur Anissi Chamsidine a exigé des précisions sur la gestion de ces fonds. On m’a aussi souvent fait la réflexion que j’ai toujours annoncé avoir laissé une manne financière à mes successeurs sans donner des précisions. C’est tout simplement parce que j’estimais que ceux-ci allaient avoir la décence de le faire. Mais comme ce n’est pas le cas, et surtout après toute l’intoxication faite sur ce fonds ou encore sur le fait que je n’ai rien laissé dans les caisses de l’Etat, je me sens dans l’obligation de le dévoiler. Pour moi, cela relevait du secret d’état. Mais comme j’ai le sentiment que l’on cherchait à me faire porter le chapeau, je vous dirai que nous leur avons légué 11 milliards de francs comoriens. Mes chers frères et sœurs, tout ce qui est engagé ici aujourd’hui et que l’on voudrait vous faire croire que ce sont les efforts propres de l’actuel régime, je vous dirai de ne pas vous tromper. Car ou cela provient de la citoyenneté ou de la conférence de Doha. Souvenez-vous qu’au dernier conseil des ministres que j’ai tenu pour remettre officiellement au Président élu Ikililou Dhoinine, les soldes des différents comptes de l’Etat, j’avais estimé que ceux de la citoyenneté devraient relever du secret d’Etat.

Je voudrais que le Président Ikililou lui-même, ou ses vice-présidents Nourdine Bourhane ou Mohamed Ali Soilihi osent me contredire sur le montant des 11 milliards que je leur ai légué. Encore une fois, je n’ai jamais eu l’intention d’annoncer ce montant, et ce d’autant plus que les autorités émiraties prônaient la discrétion sur ce dossier. Mais quand j’ai appris que l’on cherchait à me faire porter la responsabilité de la gestion de ce fonds, au point de vouloir engager des poursuites judiciaires à mon encontre mais qui n’ont jamais abouti malgré mon entière disponibilité ; j’ai considéré qu’il était opportun d’apporter toutes ces précisions. J’estime en tous cas avoir été plus clair à ce sujet et à cette occasion je demanderai aux députés de porter une attention particulière pour apaiser les inquiétudes de leurs concitoyens sur ce dossier. Voilà donc les raisons qui justifiaient la décision que mes collaborateurs et moi-même avions prise pour celui-ci, et ceci toujours en conformité aux recommandations des participants aux deux premières réunions tenues au tout début de mon mandat.


Toujours dans la foulée de ces recommandations, on peut citer l’implantation de certaines banques et qui n’a été effective que depuis notre accession au pouvoir alors que notre pays n’a connu depuis son indépendance jusqu’en 2006, qu’une seule banque, en l’occurrence la BIC. Aujourd’hui nous avons Exim Bank, la BFC, la Banque postale qui a d’ailleurs des bureaux en France et d’autres institutions financières.
Mes chers frères et sœurs, comme vous le savez, la présence ou l’absence de banques dans un pays, reste un indicateur d’évaluation très important de l’activité économique de celui-ci tout comme l’électricité reste aussi un indicateur d’évaluation du développement. Et d’ailleurs et toujours pour les banques en 2011, d’autres demandes d’ouverture nous étaient parvenues, je me demande pourquoi elles n’ont pas été honorées. Vous aurez remarqué que ce qui a été réalisé dans le secteur bancaire en si peu de temps est une avancée importante. A ce propos, je voudrai préciser que mon mandat n’a été finalement que de deux ans voire deux ans et demi, si l’on tient compte de la période de mai 2006 à mars 2008 où Anjouan était complètement à part ou encore la période de mai 2010 à mai 2011 où mes prérogatives n’étaient que partielles. Faites vous-mêmes donc le compte. Et malgré la courte durée de mon mandat, Dieu merci, nous avons enregistré des avancées significatives. Quant à la communication à proprement parlée, n’oubliez pas qu’à Anjouan et Mohéli, même le nombre de cabines téléphoniques était très limité. Mais le plus important dans ce domaine à mes yeux et qui constitue une des clés du développement sont les TICs à travers la connexion à la fibre optique, aussi chère soit elle ! C’est vrai c’est très coûteux et pour ne pas rater l’opportunité qui se présentait à nous lors de la connexion de notre région à la fibre optique, j’ai décidé de raccorder notre pays à celle-ci, quitte à l’endetter davantage. Pour votre information, cela allait être le premier endettement que j’allais engager pour le pays sachant qu’au même moment nous continuons à payer la dette de nos prédécesseurs, comme par exemple les Moudiriyas d’Ali Soilih !


Il y a aussi la Justice, et vous savez qu’aucun investisseur ne peut s’hasarder dans un pays sans justice digne de ce nom. Et nous connaissons tous, l’état de notre justice et c’est pour cela que je m’étais résolu à donner l’indépendance à celle-ci. Ce qui fut fait et je défie quiconque qui prétendrait m’avoir vu ou entendu intervenir auprès de la justice. Je suis conscient que notre intention pour  une justice indépendante a été détournée de son esprit originel, mais j’ai respecté l’engagement que j’avais pris auprès de DIEU d’accorder l’entière indépendance à la justice malgré les dérapages éventuels et qui n’ont pas tardé à se concrétiser. En effet, pour ces dérives on a pu constater que certains l’ont utilisé  à leurs fins propres. Et c’est sur la base de ce constat que l’on avait décidé de faire appel à des magistrats étrangers pour plusieurs raisons, notamment par rapport au nombre insuffisant de nos magistrats ensuite pour appuyer notre justice dans le renforcement de ses capacités. Bien entendu ces magistrats ne venaient pas remplacer les nôtres, mais plutôt collaborer avec eux pour rendre plus efficace et plus équitable notre justice. J’ai toujours été convaincu de cet apport extérieur dans le domaine de la justice et je continue à y croire. Durant mon mandat, malheureusement,  la précédente législature n’a pas voulu voter la loi relative au recours de magistrats extérieurs, mais heureusement aujourd’hui avec l’actuelle assemblée composée majoritairement par nos députés Baobab, cette loi a finalement été votée. A titre d’illustration, le pays devrait compter au moins 150 magistrats et nous n’avons approximativement que 70. Il est vrai que nous observons qu’aujourd’hui, que certains jeunes ayant fait des études de droit financés par l’Etat durant mon mandat, rentrent servir le pays. Et selon les informations que l’on a, ces jeunes magistrats affichent de bonnes dispositions professionnelles. Et je saisis cette occasion pour les encourager de garder cette bonne conscience professionnelle. Malgré les efforts déployés pendant notre mandat, il reste bien entendu beaucoup à faire, et encore une fois la solution reste le recours à l’expertise extérieure pour renforcer notre justice.


Quant à l’image de notre pays, cela n’était pas aussi évident pour moi en tant que président et mes deux ministres des affaires étrangères peuvent témoigner de l’insistance de mes recommandations et de mes orientations dans ce domaine, essentiellement sur la promotion de l’image du pays et de ses vraies valeurs. Je leur demandais régulièrement qu’ils mettent à profit leurs connaissances, leurs compétences, au service de notre diplomatie et rompre avec l’image toujours négative qui était souvent collée à notre pays. Combien de fois ai-je intervenu auprès des médias internationaux et notamment arabes, au point qu’aux sommets auxquels je participais, on attendait avec beaucoup plus d’intérêt mon allocution ; voire même attendre la position des Comores sur certaines questions délicates. Combien de fois, à travers mes voyages je m’interpellais, en me disant Ô Ahmed Abdallah Sambi, les Comores sont en attente de la stabilité , de la paix, des routes, de l’électricité, de l’eau, des banques et de la promotion de leur image. Je réitère donc, et encore une fois mes remerciements aux anciens ministres des affaires étrangères, Ahmed Djaffar ici présent et Maitre Fahmi Said Ibrahim pour le travail extraordinaire qu’ils ont réalisé lors de leur passage à la tête de la diplomatie comorienne. Sachez dans tous les cas que c’est grâce à ces différentes interventions à l’extérieur, qu’un intérêt manifeste est jusqu’alors enregistré au profit des Comores.

 Et pour évaluer l’état de la diplomatie au cours de notre mandat, c’est le ballet d’hommes d’Etat d’envergure qui ont visité notre pays, du jamais vu depuis notre indépendance. Il est vrai qu’en termes de visite officielle seul le président français François Mitterrand en a effectué, le cas du feu Yasser  Arafat en est tout autre. Combien d’Emir et de Chefs d’Etat et de Gouvernement ont visité notre pays en une si courte période depuis la libération de l’Ile d’Anjouan ? Pensez-vous qu’il était aisé faire venir des personnalités d’envergure tels que l’Emir du Qatar, le Président iranien Ahmadinejad, le Président Tanzanien Kikwete ou encore les premiers ministres du Qatar, du Koweit, de la République Française Francois Fillon? Des indices qui montrent l’excellence de notre diplomatie, même si ces personnalités ne restaient que quelques heures. C’est tout de même une fierté et un honneur pour notre pays. Un autre indice et non des moindres est la tenue de la conférence de Doha qui était arrachée grâce à des lobbyings forts réalisés par notre diplomatie. Par ces lobbyings, une autre conférence internationale au profit des Comores était prévue en Amérique Latine soutenue par certains présidents de cette région notamment Hugo Chavez et Raùl Castro et qui était à un niveau de préparation suffisamment avancé ; puisque notre Ambassadeur de l’époque en France, Abdallah Mirghane  avait déjà commencé les préparatifs avec son homologue vénézuélien.


J’ai ainsi quitté mes fonctions de Chef d’Etat avec le sentiment du devoir accompli, étant donné que la plupart des objectifs que nous nous étions fixés avaient pour certains été atteints et d’autres en cours de l’être. On peut citer entre autres les routes sachant que certaines d’entre elles ont été entièrement refaites et d’autres qui allaient à coup sûr l’être sur l’ensemble du territoire, même si on s’emploie aujourd’hui à vouloir m’ôter la paternité de cette initiative. Mais les comoriens ne sont pas dupes.


En tout état de cause, de l’argent il y en avait pour ces infrastructures. Et pour preuve, deux semaines après mon départ soit le 11 juin 2011, la somme de 6 millions d’euros a été débloquée et transmise à la société Colas au titre de 50% d’avance pour les travaux qui devraient être engagés. En sachant que je n’étais ni de près ni de loin associé aux négociations engagées avec la société Colas. Le plus étonnant, c’est le coût relatif à la réfection de ces routes. Étonnant parce que lors de l’aménagement des routes de la capitale Moroni, le devis définitivement arrêté par les chinois variait entre 60 et 70 millions de francs (soit entre 120 et 140 000 euros) au kilomètre, ce qui paraissait à mes yeux déjà trop élevé ; alors qu’aujourd’hui on nous parle de chiffres variant entre 135 et 140 millions de francs (soit entre 270 000 et 280 000 euros) le kilomètre. Je voudrai d’ailleurs demander à ce que les autorités actuelles annoncent régulièrement le coût, tout comme nous le faisions pour des raisons de transparence et pour permettre à l’opinion d’évaluer le rapport qualité/prix, car c’est son droit de savoir.


Dans tous les cas je ne suis pas là pour faire le bilan de ce que nous avons fait durant mon mandat, car beaucoup a été fait et dans beaucoup de secteurs notamment l’éducation, la santé, le sport, l’armée, la pêche, l’agriculture, mais il s’agissait ici de faire le point par rapport aux recommandations qui m’ont été faites au tout début de mon mandat pour répondre aux exigences de création d’emploi, condition essentielle du développement économique du pays.

Mes chers frères et sœurs vous connaissez tous les efforts que l’on a déployés pour l’électricité car essentielle comme le sang chez l’être humain. Les ménages, les régions, le pays et le monde d’ailleurs en ont tous besoin. Sans électricité rien ne va, et pas seulement pour l’investissement mais également pour notre vie quotidienne. Une fois je me rendais en Chine, déterminé d’aller plaider pour l’électricité ; et à ma rencontre avec le Président de la République Populaire de Chine Monsieur Hu Jin tao, à travers laquelle il m’avait fait l’annonce d’une enveloppe conséquente, et après mes remerciements pour ce geste, je lui ai fait comprendre que celle-ci sera destinée exclusivement à l’électricité. C’est ainsi que ce pays frère nous a envoyé 60 conteneurs d’équipements à la fois pour l’eau et l’électricité et qui devraient être largement suffisants pour assurer une permanence en eau et en électricité pour toute la ville de Moroni.


 D’ailleurs je tiens ici à remercier nos frères et amis chinois qui n’ont jamais cessé d’accompagner les autorités de ce pays. Et même l’Iran était disposé à intervenir dans ce secteur en nous fournissant des centrales à fuel lourd, le seul problème étant ce mode d’énergie dans notre pays. Et pour votre information, ce pays frère et ami nous a octroyé 22 pompes à eau qui devraient permettre à presque la moitié de la population de la Grande Comore d’être alimentée en eau potable. Vous pouvez donc vous rendre compte du travail colossal qui a été fait dans le domaine du secteur de l’eau et de l’électricité sur l’ensemble du territoire et plus particulièrement à la Grande Comore car en termes de superficie c’est la plus grande des Iles. Et d’ailleurs pour ceux qui ne le savent pas, Anjouan, Mayotte et Mohéli réunis ne font pas la superficie de Ngazidja. Mais en termes de population, l’ile d’Anjouan approche celle de la Grande Comore, je vous laisse donc imaginer le réseau électrique de la Grande Comore.


En terme d’électrification, les responsables de la Mamwe ont électrifié durant mon mandat 43 villages à la Grande Comore et une vingtaine de villages à Mohéli. Et j’ai en mémoire, la joie qui se lisait sur les visages de certains villageois mohéliens lorsqu’ils voyaient pour la première fois l’électricité dans leur village, sachant qu’à mon arrivée au pouvoir toute l’Ile de Mohéli était entièrement dans le noir. Et il a été décidé en conseil de confier directement au vice-président de l’époque Ikililou Dhoinine la mission d’électrifier l’Ile avec un financement conséquent pour éviter la lourdeur bureaucratique et être sûr que cela sera effectif dans les meilleurs délais. Mais à notre grand regret, jusqu’alors certains poteaux restent toujours non plantés. Et pour Anjouan, on peut s’enorgueillir aujourd’hui que sous le régime d’Ahmed Abdallah Sambi, nous avons pu électrifier plus de villages que ce qui était fait depuis 1963. Et d’ailleurs au jour d’aujourd’hui il ne reste que 3 villages à électrifier à Anjouan.


Tous ces efforts répondaient aux recommandations qui m’ont été faites au tout début de mon régime, ce qui nous a permis d’obtenir encore de la Chine 8 groupes dont 4 à la Grande Comore, 2 à Anjouan et 2 à Mohéli, ajoutés à cela les groupes d’occasion achetés à Mayotte par le groupe Semlex, pour essayer de répondre aux attentes des comoriens. Parallèlement à cette démarche, la réflexion sur les énergies renouvelables continuait. D’ailleurs des études ont même été financées par le Koweit pour la géothermie. Nous avons, en outre, fait l’expérience de l’éolienne dans la région de Nioumakélé.
Ayant toujours en mémoire les sacrifices faits par ceux qui m’ont élu, j’ai même contribué par mes propres fonds à fournir l’électricité à tous les comoriens.


Au stade de toutes ces explications, je peux me permettre de répondre à toutes vos questions, à savoir l’état de mes rapports avec les autorités actuelles ; plus précisément mes rapports avec le Président Ikililou, ses vice-présidents et son Gouvernement. En somme, où en est-on avec la continuité qui nous motivait à élire les autorités actuelles? Je vais vous répondre, aujourd’hui de vive voix et sans équivoque que c’est faux aucun rapport n’existe aujourd’hui entre ces autorités et moi-même. Autrement dit cette continuité politique qui nous était tous si chère, n’existe plus. Pour moi mes chers frères et sœurs, le choix de la continuité signifiait la pérennisation des différents programmes que nous avons conçus et initiés mes collaborateurs, vous et moi ; et qu’il me soit permis de préciser que le choix d’Ikililou Dhoinine, de Nourdine Bourhane, de Fouad Mohadj et de Mohamed Ali Soilihi que l’on avait recommandé à élire ne relevait ni de leurs origines, ni de leur intelligence ni pour leurs beaux yeux ! J’avais compris pour ma part, que dans la mesure où nous avions jeté les bases d’un développement effectif consenti par les comoriens,  et convaincu que cette continuité n’était pas seulement pour cinq ans mais pour plusieurs années, le choix que nous avions fait allait garantir et respecter cette continuité.  Et ce d’autant que ces personnes avaient toutes donné leur engagement à respecter la continuité politique. Habituellement en période d’élections, ou les électeurs sont saisis par l’opposition pour exiger un changement ; ou ces électeurs s’expriment par eux-mêmes pour assurer la continuité car convaincus que ce qui a été réalisé est à leur bénéfice. Et pour la première fois aux Comores, les comoriens ont opté pour la continuité, convaincus des bonnes intentions qui nous animaient et qui nous animent encore et leur traduction en actes en leur faveur.

C’est pour cela que j’ai déployé tous les efforts y compris personnels pour faire élire les autorités actuelles, en espérant que la continuité ainsi réclamée par les comoriens allait être pour au minimum une vingtaine d’années voire plus. Mais à mon grand regret, non seulement le relais n’est pas du tout assuré, mais pire encore, c’est de constater que ce sont ceux-là mêmes qui se sont foncièrement opposés à nous et à tout ce que nous faisions, que ce soit au niveau des projets de développement ou la préservation de l’unité et de l’intégrité territoriale par la libération de l’Ile d’Anjouan ou encore au niveau de la diversification de nos partenaires bilatéraux, et plus particulièrement de l’offensive diplomatique engagée vis-à-vis du monde arabo-musulman, qui sont aujourd’hui au devant de la scène et tiennent les rênes du pouvoir.

 Au bout du compte, ce sont ceux qui se sont déclarés non comme des adversaires, mais comme de véritables ennemis qui sont devenus les proches collaborateurs de ceux que nous avions recommandés à élire. En d’autres termes,  à la place de la continuité tant voulue et souhaitée par les comoriens ce sont des changements radicaux qui ont été opérés, et qui n’étonnent pas au vu des responsabilités confiées aux ennemis de la continuité. Ces derniers se font un malin plaisir aujourd’hui à nous malmener et à vouloir à tout prix nous humilier tout en sapant les différentes initiatives émanant de nous. Je persiste et signe que la continuité a été enterrée au vu des actes, de l’attitude et du comportement du régime actuel. Et nous pouvons dire aujourd’hui, qu’Ikililou Dhoinine et son équipe se sont servis de nous comme de tremplin pour accéder au pouvoir, puisqu’aujourd’hui il a de nouveaux amis,  de nouvelles orientations et un nouveau parti politique. Et de ce fait, les choses sont claires aujourd’hui. Et je voudrai de mon domicile, vous prendre à témoin vous les comoriens, qu’Ikililou Dhoinine a choisi son camp et nous avons le nôtre; et nous acceptons dorénavant cet état de fait. Les faits et les gestes des autorités actuelles parlent d’eux-mêmes, car ils nous ont fait comprendre que notre pouvoir est révolu malgré tout ce que nous avons fait pour rassurer les comoriens à travers cette continuité. C’est donc plus que jamais déterminé, que j’annonce aujourd’hui mon implication effective en politique.

A cette occasion je voudrai lancer un appel solennel aux religieux, aux notables, aux cadres, aux femmes et à la jeunesse de ce pays, mais également et plus particulièrement aux élus qui reconnaitraient que c’est grâce à nos efforts qu’ils sont là, je veux dire les gouverneurs, les députés et les conseillers, pour nous rejoindre à reprendre la continuité mise à mal aujourd’hui. Permettez moi de vous rappeler qu’en politique, il existe trois catégories de groupes: un premier groupe qui fait de la politique parce qu’il détient le pouvoir, un deuxième qui cherche à conquérir celui-ci parce que dans l’opposition, et enfin un troisième qui fait de la politique pour accompagner le pouvoir en place par ses conseils et ses orientations. J’avais donc voulu être de ce troisième groupe, mais malheureusement ca n’a pas été le cas.

Ce qui veut dire que l’on nous a fait savoir, comme je l’ai souligné un peu plus haut, que notre pouvoir s’est arrêté en mai 2011; à notre tour de considérer que le régime actuel est une parenthèse de ce que l’on a initié depuis 2006, et que par conséquent un nouveau combat pour reconquérir le pouvoir et assurer notre continuité est engagé aujourd’hui. Le Gouverneur Anissi Chamsidine ici présent, s’est dores et déjà déclaré disposé à s’y impliquer aussi, qu’il en soit remercié, tout comme certains députés, certains conseillers, certains responsables de l’administration, des jeunes et d’autres personnes qui ont manifesté leur disponibilité à nous rejoindre. Cela voudrait dire que nous allons créer aujourd’hui un parti politique, malgré les réticences que j’avais jadis. La raison d’être de ce parti est d’aller reconquérir le pouvoir. Je le dis haut et fort que c’est pour la reconquête du pouvoir, pour éviter que l’on nous accuse de démagogie ou de politique politicienne. Alors à ceux qui sont convaincus de la continuité, qui ont toujours soutenu le Baobab, je leur dis que c’est le moment ou jamais de nous rassembler et organiser cette reconquête, car je reste persuadé que seule la continuité est à même de répondre aux attentes du peuple comorien.

Cette reconquête démarre aujourd’hui et devra aboutir quelque soit le temps, bien entendu avec le soutien et la volonté du peuple comorien.
Je dirai même à mes frères et sœurs mohéliens que la continuité que nous avions voulue est encore plus bénéfique à eux et à leur Ile, et je peux même vous le jurer en prenant Dieu à témoin, au lieu de « s’approprier » un mandat présidentiel. Je dis cela en connaissance de cause, car j’aime cette Ile, et je peux même prétendre l’aimer davantage que certains de ses enfants. Vous savez, souvent des rêves que je fais pour cette île, et pas seulement pour elle mais pour la Grande Comore et Anjouan aussi, j’ai toujours vu que cette Ile pourrait être un paradis terrestre. Alors, j’appelle les cadres mohéliens et même les politiques de soutenir cette continuité, car encore une fois elle n’a que des avantages pour notre pays. Selon mes prévisions j’avais estimé qu’entre 2013 et 2014, toutes les conditions préalables au décollage du pays seraient réunies pour qu’ensuite nous prenions notre bâton de pèlerin et aller chercher ensemble les investisseurs étrangers dont le pays en a besoin. Malheureusement tel n’est pas le cas, pire encore, tous ceux qui de près ou de loin prétendent partager notre vision et nos orientations  sont traqués. Quel crime ai-je donc commis? Si mon crime est d’exiger la continuité, qu’il en soit ainsi.


Au risque de me répéter, je vous dirai que cette continuité reste la seule clé pour la prospérité de ce pays. Et pour la petite anecdote au sujet de mes rêves, j’espérai pouvoir remettre sur rails, si les conditions évoquées plus haut étaient réunies, la conférence des bailleurs qui devait se tenir en Amérique Latine, ou encore développer des routes aériennes par le système téléphérique, facteur de promotion du tourisme. Toujours dans l’élan de promotion du tourisme, lors d’un voyage à Abu Dhabi, j’ai eu l’occasion de discuter de façon informelle avec le Prince Sheikh Mansour et en présence de notre Ambassadeur Zoubeir Soufiane de la possibilité de construire après études,  des barrages hydrauliques pour favoriser l’énergie et l’agriculture. J’avais par ailleurs proposé aux autorités émiraties de venir construire un grand port à la Grande Comore, un grand aéroport à Anjouan et un port et un aéroport à Mohéli en guise de reconnaissance du geste fraternel que nous avons fait à leur endroit en ce qui concerne la citoyenneté économique ; un chantier qui aurait été apprécié par l’ensemble des comoriens. Bien entendu, lors de cette rencontre, aucune réponse ne m’a été signifiée, mais cela n’empêche  que le dossier aurait pu être relancé, si continuité il y avait.


Le non-respect de la continuité porte un grand préjudice au pays et à cette occasion je voudrai rappeler au Président Ikililou Dhoinine, à ses vice-présidents Nourdine Bourhane, Mohamed Ali Soilihi et dans une moindre mesure à Fouad Mohadj, que le pouvoir qu’on leur a offert n’était pas destiné à être partagé avec nos ennemis politiques, et cela est impardonnable. Je réitère mon appel à tous ceux qui ont cru et qui continuent à croire en nous à venir nous rejoindre pour jeter les bases d’un vrai parti, étant entendu qu’il faudra payer le prix fort. A ceux qui ont dores et déjà manifesté leur disponibilité à faire ce chemin ensemble, qu’ils sachent que cette fois-ci, les engagements devront être clairs. Un homme averti en vaut deux, et dans la mesure où Ahmed Abdallah Sambi reste un être humain, je peux vous garantir qu’il a tiré les leçons du passé entre les poignards sur le dos, les trahisons et les coups bas. Vous savez qu’Ahmed Abdallah Sambi est parmi les communs des mortels, on peut ne pas l’aimer, mais aimez plutôt le pays. Il fut un temps où je me posais des questions sur le sens du  sambisme, mais aujourd’hui je suis convaincu que des valeurs et des principes émanant de Sambi existent. A titre d’illustration de ces valeurs et principes, c’est la souveraineté de nos décisions. Si donc l’on décide d’adopter aujourd’hui la notion de sambisme, je dirai que celui-ci consiste à privilégier le pays et le pays seul au détriment de nos petits intérêts individuels.

 Voilà pour moi, le sens premier que je donne au sambisme. J’ai toujours été attristé par l’attitude manifeste de certains qui nous reprochaient de n’avoir pas pu leur accorder des petits privilèges personnels, mais qu’ils sachent que ce n’est pas évident de pouvoir satisfaire tout le monde dans ce sens, et j’en suis convaincu. Ce que je leur dirai aujourd’hui, et compte tenu des perspectives qui se dessinent, ces genres de sollicitudes pourront être satisfaites si le pays en sort gagnant. En effet, selon les recherches que nous avions effectuées durant mon mandat, il est quasiment sûr que des ressources naturelles existent dans notre pays. Et à cette occasion j’attire l’attention du peuple comorien sur le choix des dirigeants qui auront à gérer ces ressources.
Mes chers frères et sœurs, je voudrai insister sur la conjugaison de nos efforts pour bâtir un parti politique capable d’être soutenu par le peuple comorien pour accéder au pouvoir. Mais sachez qu’en démocratie, la force d’un parti se mesure par le nombre de ses partisans, soyez donc nombreux à nous rejoindre et le plus tôt sera le mieux pour instaurer un climat de confiance mutuelle.


Avant de finir mes propos, je voudrai réaffirmer que les relations entre Ikililou Dhoinine, son équipe et moi même ne sont plus ce qu’elles étaient; mais cela n’empêche pas de leur accorder le respect qui leur revient. Autrement dit, en ce qui me concerne je les respecterai mais je ne les honorerai plus, je les respecterai mais je ne les défendrai plus, je les respecterai mais je ne les aiderai plus. Et je vous recommanderai de leur vouer le respect qu’il leur revient en qualité de Chef d’Etat et de Vice-Président, mais en ce qui me concerne encore une fois je ne les soutiendrai plus tout comme je ne les saboterai pas. Vous savez, ce qui me fait le plus mal, c’est de savoir le niveau auquel se trouve aujourd’hui notre diplomatie malgré les efforts déployés durant mon mandat, et je me demande ce que pourra faire le nouveau ministre des relations extérieures pour la hisser à son niveau d’antan. Pire encore c’est de constater que les bourreaux d’hier qui nous traquaient et qui avaient réduit beaucoup de nos citoyens à la clandestinité et au maquis sont aujourd’hui réhabilités et sont carrément aux avant-postes des hautes fonctions de l’Etat, ce qui est marrant et triste en même temps. Il nous revient donc, si nous croyons fermement à la continuité, de nous unir et je suis tout à fait disposé à vous rassembler pourvu que vous soyez sincères et honnêtes dans votre engagement. J’avais dit plus haut, qu’un homme averti en vaut deux et je le suis aujourd’hui, car j’ai suffisamment tiré les leçons  d’avoir trop fait confiance à certains et je reconnais que cela a été une erreur de ma part. Bien évidemment, je ne suis pas de ceux qui pensent qu’à priori l’Homme est mauvais, bien au contraire, je suis de ceux qui pensent qu’il est plutôt bon jusqu’à preuve du contraire. Je ne suis pas un partisan de Machiavel mais je m’efforce à suivre les traces de Muhammad Ibn Abdillah (Paix sur Lui).


Autre chose avant de clore vraiment mon discours, je voudrai vous faire part d’une mise en garde que l’on me fait souvent ces derniers temps, depuis que j’étais à l’extérieur et jusqu’à mon retour au pays, sur ma sécurité ; et l’on me demande de redoubler de vigilance, car on chercherait à attenter à ma vie, et cela devient de plus en plus persistant. Sincèrement, en bon petit fils de l’imam Hussein cela ne m’inquiète outre mesure. Par contre, ce que je vous demanderai à vous, enfants de ce pays et à mes propres enfants, si cela venait d’arriver, ce que je ne souhaiterai pas de toute évidence, c’est de trouver et les commanditaires et les coupables d’un tel acte pour qu’ils me rejoignent au plus vite là où je serai, sinon je ne reposerai jamais en paix même si je suis mort en martyr.


Dans tous les cas, Monsieur le Gouverneur, Messieurs les députés, Messieurs les conseillers, Messieurs les maires, à toute l’assistance ici présente ainsi qu’ à tous ceux qui ont suivi ce discours et qui le suivront plus tard, je voudrai vous exprimer mes vifs remerciements et vous annoncer que je me rendrai bientôt à Moroni pour aller inaugurer notre parti politique. Encore une fois, je demande à toutes celles et à tous ceux qui partagent notre vision et nos valeurs de nous rejoindre pour remettre sur les rails la continuité politique mise à mal depuis le 26 mai 2011. Au Président et Hadj Ikililou, je vous souhaite de terminer tranquillement votre mandat tout en sachant que nous les défenseurs de la continuité sommes là et attendons l’aval des comoriens pour la reprendre aussitôt.

Encore une fois merci à vous et que Dieu vous bénisse.
L'Équipe Merci Sambi

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Discours en langue française du Président Ahmed Abdallah SAMBI prononcé le 18 Août 2013 à Anjouan
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