Mayotte, où je me trouve depuis une semaine, et que je connais bien, le mot département est dans toutes les bouches. Les Mahorais s’étonnent...
Mayotte, où je me trouve depuis une semaine, et que je connais bien, le mot département est dans toutes les bouches. Les Mahorais s’étonnent que Mayotte ne soit pas devenue Réunion en un tour de passe-passe après que la loi les aient intégrés, définitivement pensent-ils, dans la République, faisant mine d’ignorer, ou ignorant vraiment que, même ce nouveau statut de département, pouvait ne l’être pas, définitif, quid de Saint Pierre et Miquelon ! Gros jean comme devant, le mahorais départementalisé semble sortir d’un rêve éveillé et revenir à la réalité cruelle - cruelle car inattendue - il ne vit toujours pas en Franche-Comté, il n’est toujours pas devenu métropolitain par l’opération du Saint-Esprit (auquel il ne croit pas), les aides sociales peinent encore à arriver, et son île risque longtemps de dériver au large des Comores pour finir, à la fin des fins, c’est-à-dire lorsque le sens de l’histoire, qui n’est pas le sens de la politique, rappelons-le, aura repris son droit chemin, par revenir dans le giron maternel et accueillant de l’archipel des îles de la Lune, son berceau, sa culture, sa religion, son histoire, que l’île hippocampe a quitté, comme le chien de la fable, pour un collier qui lui râpe le cou, un ventre bedonnant et une négation de sa nature même…
Ainsi, les mahorais (qui n’existent pas complètement, au fond, comme un groupe homogène, grâce à la belle force d ?un archipel constitué d ?échanges permanents depuis des siècles) continueront quelques temps leurs pas de deux, arborant à leur étroite frontière de superbes cartes d’identité françaises avant de prendre un avion en juillet pour rejoindre Mohéli, Anjouan ou Grande Comore où ils suivront les travaux de leur future maison, marieront leur deuxième fille, retrouveront frères et sœurs, parents et amis. Dire que l’atmosphère est devenue pesante est un euphémisme. Même les ylangs semblent tristes ! C’est le moment du ramadan, pourtant. Les émeutes ont laissé des traces visibles dans les esprits. Mayotte est devenue département. Et le ciel bleu des cœurs semble s’être envolé !
Un lecteur
Source : journal de la Réunion
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