« L'affaire de l'accent » est désormais « montée » jusqu'à l'Assemblée nationale. Si les propos sont déplacés, ils n'e...
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Lors des questions au gouvernement de ce mercredi 8 juin, et s'exprimant sur la discrimination dans la fonction publique, le député réunionnais PS Patrick Lebreton dénonçait un tract affiché à la gendarmerie de Bras Panon (La Réunion): un faux portrait robot stigmatisant des jeunes d'origine musulmane était collé sur un panneau réservé aux avis de recherche… Et, dénonçant un acte raciste, le député de rajouter « à Mayotte, un vice-recteur s'en est même rendu coupable, un vice-recteur ! »…
Si François-Marie Perrin est ainsi sous les feux de l'actualité à la suite de sa phrase, tirée d'une discussion avec le représentant du SNES sur les ondes de la radio locale Kwezi FM : « Il y aussi la problématique de l'accent (...), que nos enfants puissent s'exprimer couramment sans accent devant les gens qui vont leur donner un travail et devant l'ensemble de la société », c'est que les syndicats SNES FSU et SNUipp ont envoyé une lettre ouverte aux parlementaires ultramarins pour attirer leur attention, en plus d'une multitude de communiqués de presse envoyés aux médias locaux qui s'en sont finalement peu fait l'écho, en tout cas pour la presse écrite.
Sauf que cette dénonciation fait suite à une autre phrase que le vice-recteur aurait prononcé lors d'un Comité syndical en février, pour souligner les retards en matière de constructions scolaires : « un jour le rythme de ces construction pourra sans doute suivre celui des utérus des mahoraises ». Propos de salle de garde, ou de comptoir, mais peu dignes d'un vice-recteur.
Surtout qu'il justifie ses affirmations plus tard, en mettant en parallèle l'accent des mahorais à « l'accent » des jeunes défavorisés de quartiers populaires de la périphérie des grandes villes ...
« A chacun son handicap… »
Cette répétition de petites phrases déplacées a naturellement fait bondir les syndicats SNES et SNUipp qui auraient mangé du vice recteur pour moins que ça. Surtout que le site Médiapart s'engouffre dans la partie, trop heureux que l'homme ne déroge pas à ses convictions, puisqu'il se justifie hier, jeudi 9 juin : « Dans les lycées technologiques en métropole, on fait passer des oraux fictifs aux élèves où on travaille spécifiquement cette question de l'accent. C'est le rôle de l'école d'aider à surmonter cette forme de handicap social ». L'accent comme handicap social, voilà qui à de quoi ébranler un Gaudin, sénateur « avé l'acceng » des Bouches du Rhône en 1989 et à la tête de la mairie de Marseille depuis 16 ans.
Car cette histoire d'accent est surtout ridicule. A Mayotte, si handicap il y a, il est plutôt dans la maîtrise du français. Avant que l'accent ne pose problème, il faudra que des générations entières d'individus parlent à peu près correctement la langue de Molière. Les assises de la langue propulsées à grand bruit l'année dernière n'avaient d'autre but que de trouver une solution à cet écueil.
L'accent, d'autre part, pose moins de problème que la capacité d'élocution sur laquelle là, par contre, il faut travailler l'oral, et c'est à ça que le vice-recteur devrait utiliser son énergie. Il en convient d'ailleurs dans son communiqué, parlant de travailler l'oral « dans toutes ses dimensions », où, s'il reparle « d'accentuation », il évoque également « l'aisance et la fluidité d'expression ». Et si par les phrases prononcés sur les médias, il pense traduire une réelle discrimination due à l'accent, son devoir est de le dénoncer et non pas de le stigmatiser.
A.L.
(Source : Malango Actualité)