La France occupe une partie de notre territoire national, Mayotte, malgré la proclamation de l’indépendance des Comores, le 6 juillet 1975,...
La France occupe une partie de notre territoire national, Mayotte, malgré la proclamation de l’indépendance des Comores, le 6 juillet 1975, et cela, en violation du Droit international public. Cette occupation illégale d’une partie de notre territoire national, que chaque dirigeant comorien revendique au sein des Nations Unies, de l’Union africaine et de la Ligue des États arabes, sans vouloir rompre toutes relations diplomatiques avec le pays occupant, est un sujet de grave préoccupation pour le peuple comorien. Quand une partie du territoire national est occupée c’est le devoir de la libérer, y compris par la force. Mais, on sait notre limite par rapport à la puissance militaire de la France.
Relations incestueuses entre les îles libres et le pays occupant.
Les comportements de nos dirigeants d’hier et d’aujourd’hui sont pleins de controverses pour ne pas dire de lâcheté. En dehors d’Ali Soilihi, qui n’avait pas divinisé la France, et qui avait pris la voie courageuse de l’inexistence de relations diplomatiques avec la France, les autres Présidents comoriens ont tous coopéré avec l’occupant. Il n’y a pas de mots par lesquels on peut désigner ceux qui collaborent avec l’ennemi, et le seul mot qu’on peut utiliser est «trahison». Tous les dirigeants comoriens, depuis la période de l’autonomie interne jusqu’à la présidence d’Ikililou Dhoinine, ont eu d’abord un appui direct ou indirect en France pour diriger notre pays. Cependant, le temps du silence complice ou de la complaisance est révolu. Quand on a un ennemi robuste comme la France, on ne le combat pas par la diversion, ni par la ruse. Il faut le combattre en face, d’une manière frontale. Comme chacun d’entre nous le sait, on n’a pas les moyens de le combattre par les armes. Il nous reste, alors, le combat diplomatique, celui de la négociation sous l’égide des Nations Unies.
Négocier avec les Comoriens de Mayotte, qu’on appelle le Mahorais:
«On n’a jamais demandé aux Corses, Bretons et Basques s’ils voulaient rester Français», a déclaré Hamada Madi Boléro, Directeur du Cabinet du Président de l’Union des Comores chargé de la Défense, lors d’une conférence de presse à l’Assemblée nationale française le jeudi 10 juillet 2014. Cette phrase prononcée de la bouche d’un haut responsable politique comorien, un premier ministre qui ne dit pas son nom, rassure les Comoriens. Car il laisse entendre qu’on ne va pas demander aux Comoriens de Mayotte si ils veulent ou non rester Comoriens. Comme la France n’a pas demandé aux Corses, Bretons ou Basques s’ils veulent rester Français, pourquoi les Comores sont-elles obligées de le faire pour les Comoriens de Mayotte?
Or, depuis l’arrivée au pouvoir du Colonel Azali Assoumani, en avril 1999, par un coup d’État militaire, qu’il tentera maladroitement de légitimer par «une élection libre, démocratique et transparente», et alors que Hamada Madi Boléro était l’un de ses plus proches collaborateurs, y compris celui qui avait assuré son intérim de janvier à mai 2002, une autre approche politique s’offre sur la question de Mayotte. Cette approche consiste à mener des négociations «directes» pour convaincre nos frères Comoriens de Mayotte, en mettant de côté la France ou les deux à la fois. Cette approche a permis à la France d’intégrer l’île de Mayotte occupée, comme entité à part, au sein de Jeux des Îles de l’océan Indien. Cette approche politique a été poursuivie par Ahmed Abdallah Sambi, qui avait privilégié une institution appelée GNTH, qui a accouché la départementalisation de notre île, pendant qu’Ahmed Abdallah Sambi prononçait des discours démagogiques et inutiles à l’ONU. Le dauphin banni d’Ahmed Abdallah Sambi, le Docteur Ikililou Dhoinine, suivra, tout au moins la même voie, en renforçant la coopération en matière de Défense et juridique avec le pays qui occupe une partie de notre territoire national. La France, avec la duplicité des autorités comoriennes en place, passe à l’étape finale en transformant notre île en une entité européenne. La France est arrivée à son objectif en faisant sienne une partie de notre territoire avec la complicité naïve et passive de nos dirigeants. Mais certaines de nos têtes bien-pensantes diront que c’est du «pragmatisme».
Or, on est arrivé là à cause de notre duplicité et surtout à force de croire pouvoir duper le loup. Comme le disait le Directeur du Cabinet du Président chargé de la Défense, Hamada Madi Boléro, lors d’une conférence au Palais Bourbon, le jeudi 10 Juillet 2014: «Nous revendiquons l’appartenance de Mayotte à l’État des Comores, mais nous devons faire en sorte de ne pas froisser la sensibilité des Mahorais qui ont fait un choix même discutable, au regard des sentiments des Comoriens et du Droit international public». Au début, on nous fait la référence des corses, Bretons et Basques, mais au final, on doit respecter le choix des Mahorais et ne pas les froisser. C’est grave quand des hauts responsables de notre pays font la propagande de l’«ennemi-ami». On veut propager, partout et surtout chez nous, que ce sont les Mahorais qui ont voulu rester Français. Mais ce n’est pas la France qui a décidé d’occuper notre île. Je dois rappeler au Directeur du Cabinet du Président chargé de la Défense, de surcroît excellent juriste du Droit international public, connaissant très bien le dossier de Mayotte, que c’est la France qui a décidé de garder Mayotte.
Peut-on faire défiler notre Armée le 14-Juillet avec l’Armée du pays qui occupe une partie de notre territoire?
La France a invité cette année 80 pays pour fêter la Fête nationale du 14-Juillet et reconnaître les efforts des peuples dont des ressortissants ont péri lors de la Première Guerre mondiale. Parmi les pays invités, il y a les Comores et l’Algérie. Comprenant l’acte symbolique de ce défilé, le peuple français récuse (via des blogs, des forums et une pétition nationale) l’Armée algérienne, qui l’a combattu. Le gouvernement français a ramené de 80 à 4 et d’une façon très discrète la présence de l’Armée algérienne. Contrairement à l’Algérie, qui a combattu la France, en ce qui nous concerne, elle occupe une partie de notre territoire et elle a instauré un visa pour circuler au sein de notre pays.
Je comprends qu’on ne peut pas combattre la France, mais on n’est pas obligé de s’humilier en public, en face du monde. En comorien, on dit que «quand on est dénudé, on doit s’asseoir» pour cacher sa nudité. Ce geste de nos dirigeants montre à la face du monde que nous sommes en paix avec la France comme les Allemands le 14 juillet 1994, 49 ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale. Notre jeune Armée nationale de Développement (AND) ne mérite pas cette humiliation, l’humiliation de la faire défiler avec des soldats qui occupent une partie de son pays. Cette faiblesse ou complicité active de nos dirigeants d’hier et d’aujourd’hui ne favorise que notre occupant, notre ancien colonisateur. Demain, pour la conférence de la COI, le président français, François Hollande, comme un héros, marchera sur le tapis rouge et tous les Comoriens seront invités pour l’acclamer, en oubliant l’occupation de Mayotte et plus de 20.000 morts du «visa Balladur».
En ce mois de Ramadan cher aux Musulmans du monde entier, nous suivrons le conseil de notre Prophète Mouhammad (S.A.W), pour qui, «celui qui voit des actes répréhensibles, qu’il les change par la main; s’il ne peut pas, par la parole et s’il ne peut pas, qu’il les ressent au fond de lui-même». Nous condamnons vivement toutes ces démarches qui avilissent notre pays.
Par Saïd-Abdillah Saïd-Ahmed
Président du Parti Comores Alternatives
Candidat à l’élection présidentielle de 2016