Le premier ministre du Hamas, Ismaël Haniyeh (à gauche), et le chef du parti en exil, Khaled Mechaal, samedi à Gaza lors d'une cérém...
Une énorme ovation salue l'entrée de Khaled Mechaal sur le podium planté au milieu de la place Katiba, à Gaza-ville. «Mechaal, notre aimé, ton armée a frappé Tel-Aviv!» scandent des dizaines de milliers d'hommes et femmes, séparés par un cordon de militants en gilets fluo jaunes. La plupart portent une casquette ou un foulard vert, couleur du Hamas. «Levez l'index!» s'écrie Mechaal, quinquagénaire poivre et sel en costume sombre et col ouvert, une écharpe de soie verte autour du cou. Une forêt de doigts pointe les cieux gris. C'est le symbole du Hamas, dont on répète les slogans: «Notre voie, le Djihad! Notre constitution, le Coran!»
Le décor installé par le parti, qui gouverne Gaza, est sans ambiguïté. Derrière la scène, une fusée géante de carton-pâte portant le numéro 75 symbolise les centaines de missiles envoyés sur Israël, dont certains ont touché Tel-Aviv et Jérusalem. Le Hamas s'est bien gardé de figurer un modèle iranien, pourtant largement employé lui aussi. Le fond de scène est occupé par une reproduction de quinze mètres de haut du mur de Saint-Jean d'Acre, au nord d'Israël, et du Dôme du Rocher, à Jérusalem. Signe que le Hamas revendique aussi bien Jérusalem, annexée par l'Etat hébreu, mais aussi la totalité d'Israël. Une énorme carte est dépliée au pied de la tribune, correspondant à la totalité de la Palestine du mandat britannique avant 1948.
Un décor de carton-pâte avec un reproduction du mur de Saint-Jean d'Acre et du Dôme du Rocher. Crédits photo : SAID KHATIB/AFP
Main tendue à Abbas
Et de préciser: «Jérusalem appartient aux chrétiens et aux musulmans, il n'y a pas de place pour les Israéliens». C'est sur ce programme que doit se faire l'unité palestinienne, lance Khaled Mechaal. Entamant le volet de politique intérieure de son discours, il tend la main à Mahmoud Abbas, président à Ramallah de la moitié cisjordanienne d'une Palestine quasiment coupée en deux. «Cette division est une catastrophe nationale .» Mais l'unité doit se faire aux termes du Hamas, qui se pose désormais en leader de la cause palestinienne. «Nous n'accepterons aucun programme commun qui comporterait la reconnaissance d'Israël» prévient Mechaal. Qui brocarde la récente admission de la Palestine comme Etat observateur à l'ONU. «L'État doit être crée avant la libération, pas avant.»Le chef du Hamas en profite pour relancer l'idée d'intégrer l'OLP et ses institutions, dont le mouvement islamiste ne fait pas partie. Mais là encore, il s'agirait d'une OLP «rebâtie sur des principes démocratiques.» Traduction: qui donnerait un nombre important de postes et de sièges au Hamas. Ce que Mahmoud Abbas n'a jamais envisagé.
La fête finie, Khaled Mechaal rentrera au Qatar, où il vit par sécurité. À Gaza, rappelant les bases de la charte du Hamas, il a surtout cherché à s'imposer comme véritable chef de file de tous les Palestiniens face à un Mahmoud Abbas requinqué par la création de son Etat virtuel. Dans le même temps, et dans le monde réel, le Hamas négocie au Caire avec ce même Israël dont il dit refuser l'existence. Certes par l'intermédiaire des services de renseignement égyptien, et sur des arrangements sécuritaires. Mais c'est tout de même une façon de prendre le pas sur Mahmoud Abbas, qui, lui, exige le gel de la colonisation avant toute reprise de contact avec les Israéliens.
Par Pierre Prier du figaro
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