C’est un délibéré révolutionnaire que vient de rendre le tribunal administratif : le vice-recteur pas plus que le préfet n’a compétence po...
C’est un délibéré révolutionnaire que vient de rendre le tribunal administratif : le vice-recteur pas plus que le préfet n’a compétence pour décider du non renouvellement d’un enseignant. Un article dénonciateur de Libération revient sur la bataille qui dure depuis deux mois maintenant.
Yann Durozad au mégaphone lors d'une manifestation contre la réforme des retraites Crédit photo : A.L./Malango |
L’actualité sur l’avenir aléatoire des enseignants militants à Mayotte est dense et tourne en faveur de ces derniers : un article de Libération et le délibéré favorable du jugement (voir Malango « L’épilogue Durozad contre Vice-rectorat se joue au tribunal » du 12 janvier) opposant le Vice-rectorat au co secrétaire du SNES FSU Yann Durozad, non reconduit, l’attestent.
Le Tribunal administratif, par son délibéré du vendredi 20 janvier, déboute Yann Durozad de sa requête de traiter « dans l’urgence le différent qui l’oppose au vice-recteur, mais vient de reconnaît que le Vice-recteur n’était pas l’autorité compétente pour signer les documents de non renouvellement d’un enseignant à Mayotte » commente Me Tchibozo, avocat du plaignant. Pas plus que le préfet. Seul le ministre de l’Education nationale a cette prérogative. Le vice-rectorat anticipant ce verdict, avait signalé que les documents produits n’étaient que préparatoires. « Le tribunal dénonce encore ce fait en soulignant que les documents produits étaient bien destinés à ne pas renouveler mon poste » raconte Yann Durozad. Ce qui va semer la révolution, car il fait office de jurisprudence pour tous les autres enseignants.
Si le tribunal déboute l’enseignant sur sa requête en urgence, Yann Durozad se dit « plutôt heureux que cet abus de pouvoir soit sanctionné » et assure qu’il va annuler la demande de mutation qu’il avait été obligé de formuler, pour la Guyane, « en attendant la décision ministérielle qui devrait intervenir en mars- avril ».
Cette affaire fait d’autant plus de bruit que le cas de Yann Durozad n’est pas isolé : Michel Rhin, président du Réseau éducation sans frontière Mayotte (Resfim) avait vu, quelques semaines après son collègue, sa demande de renouvellement déboutée alors que, comme Yann Durozad, sa responsable d’établissement avait émis un avis favorable. Ce « doublé » sème la suspicion sur la motivation réelle du vice-rectorat. Il vient d’intenter également une action en justice.
Déboires que Rémi Carayol, journaliste à Libération et ancien collaborateur de Malango actualité, vient de reprendre dans un article au titre provocateur de « Mayotte préfère les profs qui fayotent », expliquant que, « jugés trop militants, des fonctionnaires expatriés vont être renvoyés en France par le préfet ». Si le Tribunal administratif vient de dénoncer cette attribution, Yann Durozad précise que le décret de 93 stipule bien que la décision n’a pas besoin d’être motivée. L’enseignant apprenait donc son départ sans autre forme de procès… avant le cas Durozad ! Car, comme le précise Remi Carayol citant une enseignante qui vit depuis vingt ans à Mayotte « il faut en faire beaucoup pour ne pas être prolongé ! ». C’est à dire, et selon les syndicalistes, avoir un problème avec l’alcool ou autres comportements déplacés en langage prude.
Comme le rappelle Rémi Carayol, le Resfim, au sein duquel milite Michel Rhin, combat les manquements de l’Etat dans un désormais département où « plus de 26 000 personnes en situation irrégulière (dont 6 000 enfants) ont été reconduites à la frontière en 2010 ». Les deux enseignants avaient reçu, en décembre, le soutien d’un Collectif d’associations membres de migrants Mayotte, la Cimade, le Secours Catholique, le Resfim et le Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti), qui s’interrogeaient sur « les conséquences engendrées non seulement sur l’engagement de bénévoles issus de services étatiques au sein d’une association militante » mais aussi sur l’avenir de la défense des « droits des enfants à une scolarisation en respectant les règles de droit qui prévalent à Mayotte ».
Si elles sont bien liées aux activités syndicales des deux impétrants, outre la menace que ces décisions font peser sur la liberté d’expression, elles ne sont pas judicieuses, car les services de l’Etat savent ce qu’ils perdent sans savoir s’ils vont y gagner… en dehors d’une image donnée d’une Mayotte-terre de non droit.
A.L.
(Source : Malango Actualité)
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