A Madagascar, Andry Rajoelina face à un mécontentement grandissant. A neuf mois de l’élection présidentielle, la situation sociale continue de se dégr
A Madagascar, Andry Rajoelina face à un mécontentement grandissant
A neuf mois de l’élection présidentielle, la situation sociale continue de se dégrader, avec un taux de pauvreté record, tandis que la fronde sourd dans le camp du chef de l’Etat.
Le tournant social d’Andry Rajoelina n’aura duré que quelques jours. Vendredi 3 février, moins d’une semaine après avoir annoncé le gel des grands investissements et donné l’ordre à ses ministres de se rendre « dans les quatre coins du pays pour aider et soutenir la population sur tout ce qui est urgent », le chef de l’Etat malgache a annulé ses directives. Il a confirmé la poursuite des projets emblématiques du Plan Emergence promis en 2018, comme le téléphérique à Antananarivo, l’autoroute entre la capitale et Tamatave ou la ville nouvelle de Tanamasoandro…
Aucune explication n’a été donnée sur ce tête-à-queue, perçu comme un symptôme supplémentaire d’un régime tenté de gouverner à vue pour répondre à un mécontentement qui monte de toutes parts. Mais la liberté qu’entendait prendre Andry Rajoelina avec une loi de finances pour 2023 tout juste votée a fait bondir. « Le président de la République ne peut pas faire ce qu’il veut avec le budget de l’Etat. Cet argent ne lui appartient pas », tranche la députée Hanitra Razafimanantsoa, membre du parti Tim, de l’ancien président Marc Ravalomanana.
A neuf mois de l’élection présidentielle – la Commission électorale nationale indépendante (CENI) vient de proposer le 9 novembre comme date du premier tour –, la pauvreté atteint un niveau record, avec plus de 80 % de la population vivant sous le seuil de 2,15 dollars par jour, selon la Banque mondiale. L’inflation provoquée par la guerre en Ukraine et les difficultés d’acheminement des denrées à travers l’île en raison de la dégradation des routes font flamber les prix des produits de première nécessité comme le riz.
Le secteur de la vanille est en crise
Après les fonctionnaires, dont les salaires ont été versés avec retard fin 2022, les entreprises bénéficiaires de marchés publics ont exprimé leur colère en manifestant dans le centre de la capitale, le 2 février, pour réclamer d’être payées. Selon leurs représentants, elles sont « des milliers à travers l’île à souffrir de cette situation après avoir fourni à l’Etat des fournitures de bureau, des consommables informatiques, des intrants agricoles, des travaux d’infrastructures concernant les projets présidentiels ».
« Les entreprises sont à la merci d’une justice incompétente et corrompue », selon Thierry Rajaona, le patron des patrons
Le Groupement des entreprises de Madagascar (GEM), qui fédère les grandes sociétés du secteur privé, multiplie les alertes sur la détérioration du climat des affaires. « Les entreprises sont à la merci d’une justice incompétente et corrompue. Ce n’est pas nouveau, mais la situation empire. Sans respect du droit, aucune entreprise nationale ou étrangère ne peut investir », avertit son président, Thierry Rajaona.
Vitrine de l’économie de l’île et principal pourvoyeur de devises, le secteur de la vanille est aussi en crise suite à la décision du gouvernement, en 2021, d’imposer un prix plancher à l’exportation de 250 dollars/kg, bien supérieur aux cours internationaux, actuellement compris entre 150 et 180 dollars. Madagascar a beau être le premier producteur mondial de vanille, ses opérateurs accumulent des stocks invendus et réclament une libéralisation de la filière. Les revenus des petits planteurs de la région de la Sava (nord-est), principale zone de production, sont en chute libre.
Dans cette atmosphère de déliquescence, la fronde sourd dans le camp d’Andry Rajoelina. Cible, début décembre, d’un projet de motion de censure signé par 105 députés (sur 151), dont une majorité issue du parti présidentiel (IRD), le gouvernement du premier ministre Christian Ntsay ne doit sa...Lire la suite sur LeMonde
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