Entré dans l’histoire du mauvais côté, Azali veut-il en sortir par une grande porte ? La pire chose qui puisse arriver à un pays est d’avoir...
La pire chose qui puisse arriver à un pays est d’avoir à sa tête un homme étroit d’esprit, bourré de complexes et atteint de mégalomanie. Pour lui, ça passe ou ça casse. Il pense que rien ne peut et ne doit lui résister. Échanger ou débattre, ce n’est pas sa tasse de thé. Jouer des mauvais tours à des interlocuteurs épris de bonne foi est une obsession dont il n’arrive jamais à se libérer.
Ainsi, pour avoir réussi à abuser de la confiance de quelques esprits naïfs lors de la farce des assises nationales, Azali Assoumani n’hésite pas à reprendre son bâton de pèlerin pour tenter de prendre au piège toute force qui lui résiste. Se croyant sorti de la cuisse de Jupiter, il se fait des illusions en pensant qu’il réussira encore une fois à duper l’opposition avec le mirage d’un nouveau coup de poker. Car le dialogue clamé à cor et à cri par quelques jeunes novices, aux dents longues, assoiffés de pouvoir et d’argent est tout au plus une tentative désespérée d’un régime aux abois.
De deux choses l’une : soit le dictateur veut se donner un nouveau look et un brin de légitimité pour sortir de l’eau son bateau qui coule; soit il a fini par céder aux pressions internationales et veut s’aménager une porte de sortie honorable. Dans les deux cas, sa bouée de sauvetage ne peut, en toute logique, fonctionner s’il ne fait pas preuve d’apaisement. En relisant, entre les lignes, l’interview d’adieu de l’ambassadrice de France à Moroni, l’on peut présumer que le dernier entretien d’Emmanuel Macron et Azali à l’Élysée n’est pas pour rien dans le nouveau comportement adopté par le gouvernement en matière répressive.
Force est en effet de noter que depuis quelques semaines, nous assistons à un repli des arrestations. Faut-il, pour autant, en déduire qu’un tel reflux signifierait que le tyran a changé de cap et se serait assagi ? Répondre à cette question par l’affirmative, c’est faire preuve de méprise et oublier que les chefs de l’opposition sont toujours privés de leur liberté. Ce serait aussi ignorer la sagesse contenue dans ce proverbe : Chassez le naturel, il revient toujours au galop.
L’opposition doit avoir présent à l’esprit qu’autant l’ennemi opère un repli et manifeste des signes de faiblesse évidents, autant elle commettrait une erreur suicidaire en se laissant abuser par ses offres de négociation. Avant d’attaquer sa proie et la dévorer, le lion tente parfois de l’apprivoiser. C’est ce qui semble se passer avec des responsables du parti ULEZI. Compte tenu du passé d’Azali et de ses trahisons notoires, ces derniers lui font-ils sincèrement confiance et se laissent ainsi manipuler ou agissent-ils sciemment pour protéger le régime ?
Dans cette phase ultime de notre lutte contre la dictature, nous n’avons pas droit à l’erreur. Lâcher prise en jouant le jeu de la division ou en se laissant corrompre, ce serait une haute trahison. Certes, Azali semble affaibli mais il ne désespère pas pour autant de trouver une faille où s’engouffrer pour retarder son départ. Après avoir échoué avec Boléro et la multiplication des gouvernements en exil, il n’est pas impossible qu’il manipule, en dernier recours, certains Anjouanais aux fins d’exploiter le filon séparatiste.
Envisager ce scénario du pire n’est pas une simple spéculation ; c’est pour un tyran comme Azali une possibilité à ne pas exclure. Figurons-nous que nous avons affaire à un homme intellectuellement limité et qui veut donner l’impression de tout savoir. Un peu comme la grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf. L’une de ses premières déclarations prononcées devant le cabinet de l’ancien président Tadjidine Ben Massoud quelque temps après son premier coup d’État de 1999 est la suivante : « je suis finalement entré dans l’histoire. » Certes, vous y êtes entré M. le Président. Mais de quel côté de l’histoire et par quelle porte ? Du mauvais côté et par une petite porte dérobée.
Youssouf Boina, ancien SG du parti UPDC
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