"Dormis comme ceux qui ne dorment pas – "halala dje utsu lala", les détenus guettent le bruit de bottes des agents de la S...
"Dormis comme ceux qui ne dorment pas – "halala dje utsu lala", les détenus guettent le bruit de bottes des agents de la Sécuricom qui viennent à 6h par là, ouvrir le portail de fer de la chambre". Le Moroni’’ de la Maison d’arrêt.
La lumière et l’air qui y entrent, apportent une bouffée de vie et de bonheur tel un enfant qui vient de naitre. Tout le monde remercie forcément Dieu en ce moment précis, pour avoir survécu la veille dans le noir et l’odeur moite de sueur, de pisse et de caca de la cellule. Le décompte des prisonniers par les pénitenciers se fera tout de suite avant tout mouvement vers la porte.
Le seau d’excréments doit au préalable être vidé. Il a été bien servi la veille, comme le codétenu Ribus avait une diarrhée aiguë et qu’ils étaient tous mobilisés à l’assister pour se soulager plus de 7 fois dans ce seau occasionnel avec le peu de dignité qui revient à un détenu.
La queue se formera aussitôt pour la douzaine de détenus de la cellule et ceux des autres départements en quête d’un pseudo intimité, afin de pouvoir utiliser le seul trou déjà plein à craquer servant de toilette. Les bouteilles d’eau remplies la veille, qui jonchaient la petite et étroite cour du "Moroni", aideront les détenus à faire les toilettes élémentaires et les ablutions. Des petits groupes se forment aussitôt pour la première prière du matin sur le petit carré laissé libre par le pliage des 2 nattes servant de literie posées à même la porte. Faute de ne pouvoir la faire le moment et le lieu indiqués, cette première prière est faite dès que possible et dans ces conditions. Tout le monde s’y met pour l’accomplir, même le plus mécréant des détenus, comme c’est une des occasions de se laver une partie du corps, faire un peu de sport et formuler le vœux de la liberté sans se presser.
D’un ton autoritaire vers 8h, le premier nom de détenu est appelé par les agents pénitenciers, tel des hauts parleurs: visite ! Avec pièce d’entité à l’appui pour identifier le visiteur. Les "soubic" - paniers commencent à affluer avec le thé, la soupe, les petits fours, les sambous et tant d’autres délices qu’ils consommeront sans modération comme il ya suffisamment le temps d’aller aux chiottes pendant la journée. Chaque famille est gagnée par une espèce de compétition d’apporter le maximum et le mieux comme, ne l’oublions pas que les détenus en question sont des autorités "Mdjidjengo" de la République.
Les détenus ont imposé à leurs familles une tournante dans la restauration et ont beau demander à ce que les apports en alimentations soient limités et non démesurés mais en vain ; chaque famille devrait selon elle, sauver son honneur en se montrant digne dans la qualité et la quantité de bouffe. Le grand souci sera que de peur d'avoir envie d'aller aux toilettes à partir de 18h, puisque les portes des cellules ferment, les délicieux repas devant servir de déjeuner et de diner ne sont quasiment pas consommés. C’est aux agents pénitenciers et aux autres détenus des chambres B, C et EPP d’en savourer ces bons plats. Ces derniers ne sont pas non plus favorisés, bien au contraire, seulement ils ne se gênent pas pour faire leur besoin la nuit dans des sachets en plastique et les jeter par-dessus le toit chaque matin.
Les odeurs, les mouches et le soleil se montrent très tôt et les détenus en font la chasse pour s’abreuver de rayons. Les gens se grattent, s’étirent et baillent sans ménagement. La literie est secouée et étalée, les ‘’salam aleykum’’ et les insultes se croisent, la vie du ‘’magobani’’ reprend.
M. Moilim qui joue quotidiennement le rôle du coq en insultant à tue-tête à l’aube, et le Procureur de la République, et le Commandant de la Gendarmerie, organise la journée à EPP tel un chef d’équipe. "Au Moroni" le ballet pour la recherche de l’eau commence. Les allers et venus dans le petit couloir se multiplient et la palabre s’installe au fur et à mesure.
Les jeux de dames, de cartes et de dominos commencent si tôt bien qu’avec une faible affluence.
L’équipe de Sécurité de nuit va être relevée par celle du jour. Tels des vrais pénitenciers, ils seront placés dans tous les axes, voire même sur le toit de la prison pour surveiller et canaliser tous les mouvements des détenus.
M. Ali Saïd
Article publié le 11/09/2010 par dafinemkomori
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