Cour constitutionnelle des Comores
De même que les bateaux ne roulent pas sur les autoroutes, les membres du gouvernement ne fustigent pas les juridictions de la République en général et la cour constitutionnelle en particulier. Il y'a là une limite. On ne la dépasse pas sous peine de provoquer une nouvelle crise.
Déjà, l’usage interdit aux citoyens ordinaires de commenter les décisions de justice. C’est un réflexe de civisme qu’il faut inculquer à tous..
Foule devant l'Assemblée nationale des Comores à Moroni, le 24 février 2015. © AFP PHOTO//MARCO LONGARI |
Puis, ce n’est pas un hasard si le législateur a voulu que les arrêts de la cour constitutionnelle soient sans appel et qu’elle soit, de ce fait, ce dernier rempart, une sorte de plafond de verre indépassable qui met fin définitivement aux conflits et autres polémiques. .
Quant on sait que le locataire de Beit Salam du moment est le garant des institutions, on est surpris lorsque l’un ses ministres et l'un de ses proches collaborateurs attaquent de front et publiquement les Sages.
Ce qu’ils auraient dû faire c’était d’empêcher le chef de l’Etat , quand il était encore temps, de prendre ce décret de la discorde et non pas persister dans l’erreur au point de déjuger les hauts juges. Car si le président de la République dirige le pays c’est à eux de gérer le président. Ce décret et son annulation c’est d’abord et avant tout leur échec à eux.
Et puis, Il y a comme un paradoxe à tirer à boulets rouges sur cette même Cour constitutionnelle qui a investi le chef de l'Etat devant la nation et devant le reste du monde.
On parle beaucoup de paix sociale. Elle commande de surveiller la crédibilité des institutions. Or à l' évidence, une majorité de Comoriens ne croient pas à l’Etat et à ses structures. Beaucoup rêvent même « d’un printemps arabe » qui emporterait tous les briseurs de rêves.Et la Cour constitutionnelle, dernier rempart, n’échappe pas à ce courroux général et à ce sentiment de ras-le-bol. En se joignant à la troupe des crieurs, ces hauts responsables donnent, aux anarchistes de tout bord et à leurs adversaires, le couteau par la manche , comme on dit chez nous, en vue de dépecer l'institution.
Au cours d’une récente rencontre des organisations de gestion électorale , le vice président de la cour Soidri Salim a dressé un diagnostic inquiétant de la situation interne de la haute juridiction en termes de ressources et de mal être des personnalités censées incarner la sagesse. C 'est peu dire d'affirmer qu' elle est fragile.. A force de recevoir des coups et de plier, elle peut rompre.
Et quand il n’y aura plus du tout de mauvaise digue, il faudra pas s’étonner de recevoir les vagues dans nos maisons. ©Ali Moindjié