Dans une étude publiée récemment, des chercheurs ont observé les conséquences du conflit israélo-palestinien sur les comportements des en...
Dans
une étude publiée récemment, des chercheurs ont observé les
conséquences du conflit israélo-palestinien sur les comportements des
enfants du sud d’Israël. Il a été observé que dans cette région, les
enfants avaient deux fois plus de chances de devenir violents que ceux
qui grandissaient dans une région en paix.
Voir la violence autour de soi rend-il violent ? Au premier abord, cette question peut sembler complètement absurde. Nous sommes tous quotidiennement témoins de violences, directes ou médiatisées, sans que celles-ci ne nous inspirent autre chose que l’impatience aiguë d’un monde plus pacifique. Cependant, et c’est là une idée centrale de la psychologie depuis les « lois de l’imitation » de Gabriel Tarde, la violence peut être contagieuse. Ce procureur de la République et sociologue de la seconde moitié du 19ème siècle s’est passionné pour l’hypnose sociale et a fondé un courant de pensée qui reste d’actualité pour comprendre les relations sociales entre deux personnes ou au sein de groupes.
L’imitation
est une tendance innée chez les primates et les humains, pour lesquels
le mimétisme subtil des expressions du visage est non conscient et
automatique. Lorsque des nouveaux-nés observent un modèle qui
tire la langue, cela déclenche un comportement mimétique, tandis que
chez les adultes, la projection de films où un acteur adopte une
expression triste ou gaie conduit l’auditoire à imiter involontairement
son expression faciale sans en avoir conscience. Ce mimétisme
irréfléchi, dont nous avons tous conscience lorsque nous rions ou
baillons en groupe tant il est alors manifeste, a été approfondi de
manière décisive par la découverte des neurones miroirs. Des chercheurs
de l’université de Parme ont ainsi montré que certains neurones sont activés de manière similaire quand une action est observée ou exécutée par l’individu.
Ces bases neurales de l’imitation permettent de comprendre pourquoi
nous imitons à notre insu les expressions faciales d’autrui. Ce
mimétisme peut contribuer au partage des émotions éprouvées par nos
interlocuteurs du fait de la mobilisation du même système musculo-facial
que celui qui est activé lorsque nous éprouvons nous-mêmes l’émotion
dont nous sommes témoins. Ainsi, voir des expressions faciales de colère
stimuleront des émotions similaires chez l’observateur, qui favorisent
une réaction agressive en cas de provocation.
Contagion sociale
La contagion ne se limite pas aux relations de face à face. Habiter dans un quartier ou un pays violent n’est pas sans influence, car les conduites jugées appropriées et acceptables par l’individu dépendent en bonne partie des modèles auxquels il est le plus souvent exposé. Dans une étude, des enfants de diverses villes d’Afrique du Sud étaient observés par des chercheurs à plus de 1 500 reprises lors de fenêtres d’observation de 30 secondes. La mise en relation d’informations environnementales avec les conduites des enfants a montré que ceux qui résidaient dans des communautés violentes avaient des interactions plus agressives que les autres. La guerre produit également des effets de légitimation de la violence sur un plan macroscopique. Des chercheurs ont montré au moyen de données statistiques provenant de 110 pays entre 1900 et 1970 que les Nations qui venaient de traverser une période de guerre voyaient leur criminalité augmenter, par acculturation à la violence.
Les écrans qui mettent en scène la violence, notamment si celle-ci est banalisée ou présentée de manière valorisée, constituent un autre vecteur de transmission. Dans une étude sur l’influence de la télévision, une trentaine d’enfants de 5 à 11 ans regardaient un feuilleton violent pendant 20 minutes. En enregistrant les actes de violence verbale et physique dans les minutes qui suivaient (durant un temps de jeu périscolaire), les auteurs ont observé que par rapport à ceux auxquels on avait montré un autre programme, ceux qui avaient vu les contenus violents commettaient un taux d’actes brutaux ou agressifs multiplié par 7. Ces résultats sont confirmés par plusieurs enquêtes. Par exemple, selon une publication de la revue Science, visionner régulièrement des films violents entre 14 et 21 ans influence les conduites agressives de l’adulte, indépendamment du QI, de la classe sociale, des pratiques éducatives parentales ou du niveau de tendances agressives des participants au début de l’étude.
Voir la violence autour de soi rend-il violent ? Au premier abord, cette question peut sembler complètement absurde. Nous sommes tous quotidiennement témoins de violences, directes ou médiatisées, sans que celles-ci ne nous inspirent autre chose que l’impatience aiguë d’un monde plus pacifique. Cependant, et c’est là une idée centrale de la psychologie depuis les « lois de l’imitation » de Gabriel Tarde, la violence peut être contagieuse. Ce procureur de la République et sociologue de la seconde moitié du 19ème siècle s’est passionné pour l’hypnose sociale et a fondé un courant de pensée qui reste d’actualité pour comprendre les relations sociales entre deux personnes ou au sein de groupes.
Câblés pour imiter les autres
Contagion sociale
La contagion ne se limite pas aux relations de face à face. Habiter dans un quartier ou un pays violent n’est pas sans influence, car les conduites jugées appropriées et acceptables par l’individu dépendent en bonne partie des modèles auxquels il est le plus souvent exposé. Dans une étude, des enfants de diverses villes d’Afrique du Sud étaient observés par des chercheurs à plus de 1 500 reprises lors de fenêtres d’observation de 30 secondes. La mise en relation d’informations environnementales avec les conduites des enfants a montré que ceux qui résidaient dans des communautés violentes avaient des interactions plus agressives que les autres. La guerre produit également des effets de légitimation de la violence sur un plan macroscopique. Des chercheurs ont montré au moyen de données statistiques provenant de 110 pays entre 1900 et 1970 que les Nations qui venaient de traverser une période de guerre voyaient leur criminalité augmenter, par acculturation à la violence.
Les écrans qui mettent en scène la violence, notamment si celle-ci est banalisée ou présentée de manière valorisée, constituent un autre vecteur de transmission. Dans une étude sur l’influence de la télévision, une trentaine d’enfants de 5 à 11 ans regardaient un feuilleton violent pendant 20 minutes. En enregistrant les actes de violence verbale et physique dans les minutes qui suivaient (durant un temps de jeu périscolaire), les auteurs ont observé que par rapport à ceux auxquels on avait montré un autre programme, ceux qui avaient vu les contenus violents commettaient un taux d’actes brutaux ou agressifs multiplié par 7. Ces résultats sont confirmés par plusieurs enquêtes. Par exemple, selon une publication de la revue Science, visionner régulièrement des films violents entre 14 et 21 ans influence les conduites agressives de l’adulte, indépendamment du QI, de la classe sociale, des pratiques éducatives parentales ou du niveau de tendances agressives des participants au début de l’étude.
Laurent Bègue
Laurent Bègue, est professeur de psychologie sociale à l'université Pierre Mendès-France de Grenoble, où il dirige le laboratoire Interuniversitaire de Psychologie, visiting scholar de l'université de Stanford et membre honoraire de l'Institut Universitaire de France (IUF).
Il est notamment l'auteur de Psychologie du bien et du mal (Odile jacob, 2011) et d'une cinquantaine d'articles scientifiques et chapitres d'ouvrages.
Il est notamment l'auteur de Psychologie du bien et du mal (Odile jacob, 2011) et d'une cinquantaine d'articles scientifiques et chapitres d'ouvrages.