Recours en annulation du décret sur le SGG déposé à la cour suprême ! Décret n°24-107/PR du 06/08/2024 portant refonte de l’organisation, du fonctionn
A MONSIEUR LE PRESIDENT DE LA SECTION ADMINISTRATIVE
COUR SUPREME DES COMORES
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Requête en annulation
Pour : Monsieur IDRISS MOAHMED CHANFI, né le17/10/1948 à Mistamiouli, de nationalité comorienne, et demeurant à Moroni, Grande-Comore opérateur économique dans le tourisme local
Contre :
Décret n°24-107/PR du 06/08/2024 portant refonte de l’organisation, du fonctionnement et des attributions du Secrétariat Général du Gouvernement de l’Union des Comores
PLAISE A LA COUR
I/ SUR LA RECEVABILITE DU POURVOI :
I-1 sur les délais
Le Décret discuté a été pris le 06/08/2024. La requête est introduite avant l’expiration du délai de 2 mois, elle sera donc déclarée recevable.
II- sur la qualité à agir
Monsieur IDRISS MOHAMED CHANFI est un opérateur économique (à jour de ses obligations fiscales),dont l’activité relève des compétences exclusives des îles, et donc des pouvoirs dévolus par la constitution à l’exécutif des îles.
II/ EXPOSE DES FAITS
Il est constant que les principes d’équilibre politique et d’autonomie des îles, sont le résultat du consensus national dégagé par la conférence nationale souveraine du 24 janvier au 8 avril 1992 réunissant les 24 partis politiques et toutes les forces vives de la Nation, réaffirmés par l’accord cadre de réconciliation nationale du 17 février 2001 aboutissant au Nouvel Ensemble Comorien consacré par la constitution du 23 décembre 2001.
La constitution a affirmé dans son préambule, la détermination du peuple comorien à assoir un Etat de droit fondé sur le principe de la souveraineté du peuple et de la démocratie et un système de gouvernement fondé sur la séparation des pouvoirs.
Les principes d’équilibre politique et d’autonomie des îles sont des principes constitutionnels qui commandent l’organisation et l’exercice du pouvoir politique.
Monsieur IDRISS MOHAMED CHANFI est opérateur économique dans le domaine du tourisme.
La promotion du tourisme, le plan de développement économique et social relèvent de la compétence exclusive des îles. (Article 102 de la constitution)
Les îles, dotées de la personnalité juridique, jouissent de la libre administration et de l’autonomie de gestion. (Article 99 de la constitution)
Par ailleurs, le Président de l’Union des Comores est le symbole de l’Unité nationale est l’arbitre et modérateur du fonctionnement régulier des institutions.
Curieusement, par Décret n°24-107/PR du 06/08/2024 portant refonte de l’organisation, du fonctionnement et des attributions du Secrétariat Général du Gouvernement de l’Union des Comores, le Président de l’Union, symbole de l’Unité nationale et responsable du bon fonctionnement des institutions, aliène la libre administration des îles par les Gouverneurs.
C’est ce Décret qui est soumis à votre censure par la présente requête.
III/EXPOSE DES MOYENS
- SUR LA VIOLATION DE L’ARTICLE 99 DE LA CONSTITUTION
Il est reproché au Décret attaqué, notamment en son article 36 de porter atteinte au principe de libre administration et d’autonomie de gestion des îles en ce qu’il prévoit que le Secrétaire Général du Gouvernement vise tous les arrêtés des exécutifs des îles sous peine de nullité desdits arrêtés.
Or, aux termes de l’article 99 de la constitution, « Les îles sont dotées de la personnalité juridique. Elles jouissent de la libre administration et de l’autonomie de gestion. Elles sont gérées chacune par un gouverneur et un conseil consultatif ».
Par ailleurs, l’article 102 de la Constitution fixe les matières qui relèvent exclusivement de la compétence des îles, sur lesquelles l’exécutif de l’Union n’exerce aucun pouvoir.
En outre, selon l’article 101 de la Constitution, « Dans l’exercice de ses compétences, le Gouverneur prend des arrêtés »
Ainsi, à travers ces articles 101 et 102 précités, la Constitution a matérialisé la libre administration des îles et leur autonomie de gestion en créant pour elles, un domaine réservé et en donnant aux Gouverneurs le pouvoir de prendre dans ce domaine, EN TOUTE INDEPENDANCE ET SANS AUCUNE INGERENCE DES ARRETES.
Dès lors, soumettre ces arrêtés du Gouverneur, organe exécutif des îles, de surcroit élu au suffrage universel, à un visa, sous peine de nullité, d’un simple organe administratif VIOLE MANIFESTEMENT ET INDISCUTABLEMENT L’ARTICLE 99 DE LA CONSTITUTION.
En effet, l’article 36 du décret attaqué a pour effet de placer les îles sous une forme de contrôle hiérarchique du Secrétaire Général du Gouvernement.
Par conséquent, l’article 36 du décret attaqué est contraire à la constitution en ce qu’il viole l’article 99 de celle-ci et doit alors être annulé.
- SUR L’ATTEINTE AU CONSENSUS NATIONAL SUR LES PRINCIPES D’EQUILIBRE POLITIQUE ET D’AUTONOMIE DES ILES
Il est important de rappeler que les principes d’équilibre politique et d’autonomie des îles, sont le résultat du consensus national dégagé par la conférence nationale souveraine du 24 janvier au 8 avril 1992 réunissant les 24 partis politiques et toutes les forces vives de la Nation, réaffirmés par l’accord cadre de réconciliation nationale du 17 février 2001 aboutissant au Nouvel Ensemble Comorien consacré par la constitution du 23 décembre 2001.
Ainsi, aux termes du point 4 du préambule de l’accord-cadre du 17 février 2001 à la genèse des institutions actuelles, « NOUS ENGAGEONS à entreprendre l’œuvre urgente de sa construction et à répondre adéquatement à la nécessité d’un partage du pouvoir entre l’Ensemble et les Iles afin de permettre à ces entités de concrétiser leurs aspirations légitimes pour administrer et gérer librement leurs propres affaires »
C’est ainsi qu’au nom de ce consensus national sur ces principes, l’article 68 de la constitution a prescrit la représentation juste et équitable des îles dans la formation du Gouvernement, « Le Gouvernement est composé de manière a assurer une représentation juste et équitable des îles ».
Par ailleurs, au nom de ce consensus national sur les principes d’équilibre politique et d’autonomie des îles, une coutume constitutionnelle s’est développée faisant en sorte que le Président de l’Union et le Président de l’assemblée de l’Union ne proviennent de la même île mais soient chacun originaire d’une île différente.
Incontestablement, ce consensus national, toujours respecté par tous, a garanti la stabilité des institutions comoriennes.
Il est alors important rappeler également, et notamment pour les jeunes générations, que ce consensus national sur ces principes a été obtenu laborieusement au prix des souffrances, de la sueur et du sang, puisque des soldats sont morts, d’autres blessés et des citoyens ont perdu des biens et parfois atteints dans leur chair. On ne saurait toucher à ce consensus national.
Il est important de préciser aussi que ce consensus national sur ces principes d’équilibre politique et d’autonomie des îles a valeur constitutionnelle intangible et qui transcende toutes les générations et tous les politiques et qu’on ne saurait y porter atteinte d’aucune manière que ce soit.
Il ressort de tout ce qui précède qu’il ne serait certainement pas exagéré d’associer toute atteinte à ce consensus national arraché au prix fort à une forme de haute trahison de la Nation Comorienne.
Qu’ainsi, il plaira à la Cour de céans de déclarer que l’article 36 du Décret n°24-107/PR du 06/08/2024 portant refonte de l’organisation, du fonctionnement et des attributions du Secrétariat Général du Gouvernement de l’Union des Comores est contraire à la constitution
PAR CES MOTIFS
Plaise à la Cour Suprême :
Vu la constitution ;
Vu la loi organique n°23-012/AU abrogeant et remplaçant l’ordonnance N°19-003/PR du 19/10/2019 sur la Cour suprême ;
Vu l’accord-cadre de réconciliation nationale du 17 février 2001 ;
Il est respectueusement demandé à la Cour Suprême de :
- Déclarer la présente requête recevable ;
- Déclarer l’article 36 du Décret n°24-107/PR du 06/08/2024 portant refonte de l’organisation, du fonctionnement et des attributions du Secrétariat Général du Gouvernement de l’Union des Comores contraire à la Constitution
- Annuler ledit Décret
- Condamner le Trésor public aux dépens
Fait à Moroni, le 02 septembre 2024
BORDEREAU DES PIECES
Moroni, le 02 septembre 2024
Pièce 1 : Décret n°24-107/PR du 06/08/2024 portant refonte de l’organisation, du fonctionnement et des attributions du Secrétariat Général du Gouvernement de l’Union des Comores
Pièce 2 : Accord-cadre pour la réconciliation nationale du 17 février 2001
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