Loi de Finance 2017. La prétendue opposition: Constructive ou hypocrite?
L’esprit constructif prétendument incarné par l’opposition des pro-Mamadou requiert la franchise, l’authenticité, et la cohérence. Aller chercher ces vertus dans l’attitude de cette prétendue opposition au sujet de la loi de Finance 2017… On connait l’enthousiasme des députés de l’opposition pour cette loi que j’ai déjà dénoncée dans un article intitulé : « Loi de finance 2017 : Une gageure qui consiste à saigner le mourant pour le sauver », conduisant le vice-président Dhulkamal Toiliha à la qualifier d’ « ambitieux et d’historique » dans une interview parue le 2 décembre 2016 dans Al Watwan Economique, et débouchant à un vote positif de leur part…
Pourtant ceux qui se gargarisent d’une opposition constructive, et trouvent dans le rejet de la Loi de finance une bizarrerie gouvernementale font preuve de la plus grande incohérence, de la plus grande duplicité qui soient, pour peu que l’on mette en perspective leur approche de la question, confirmant ainsi leur schizophrénie existentielle…
Que comprendre entre l’approbation de la loi de finance par les 15 élus de la dite opposition, et les appels à un vote positif en faveur de celui-ci hyper médiatisés et l’analyse sceptique sur le fond présentée par l’ex-ministre Houmed Msaidié dans cet extrait de son interview donnée dans la foulée de la récente conférence de presse tenue par les proches de Mamadou ?
[On parle d’un projet de loi unique dans l’histoire du pays eu égard aux perspectives de développement qu’il offrirait. Que vous inspire le fait que les députés dits de la majorité aient rejeté en bloc le projet de loi ?
C’est un rejet aussi bien dans la forme que dans le fond. Certes on parle d’un projet de loi ambitieux, mais concrètement, le ministre des Finances pouvait-il dire autrement ? Puisqu’on parle de plus de 80 milliards de recettes, on est obligé de concéder qu’il s’agit effectivement d’un projet ambitieux. Il faut tout de même marquer un étonnement dans la mesure où, l’année dernière, nous étions à 35 milliards. J’estime que le cadre macroéconomique qui permettrait d’arriver à collecter plus du double des recettes de l’année dernière n’est pas encore créé. Le levier pour cette hausse extraordinaire des recettes n’est autre que la fiscalité. Pourtant, la pression fiscale ne peut s’effectuer que sur un cadre soutenu de croissance. Ce qui est manifestement loin d’être le cas des six derniers mois et n’en parlons plus de l’année prochaine. Si des efforts sont réalisés, le taux de croissance peut atteindre 1 ou 1,5 % et non pas plus. Ceci étant, j’espère de tout cœur que cette ambition se matérialisera malgré mes doutes légitimes.]
Il y a bien donc un double langage, un manque de sincérité et d’authenticité indigne d’une opposition constructive censée être un acteur clé du débat parlementaire… L’alignement tactique à des fins purement politiques et politiciennes sur la loi de Finance 2017 est donc manifeste. Comment peut-elle en effet incarner une opposition constructive en occultant sciemment les nécessités d’analyse et débat parlementaires, en votant mécaniquement une loi de finance dont elle n’est pas convaincue au fond de la pertinence, au point de dénoncer ceux qui ne l’ont pas quelle qu’en soit la raison ?
Il faut que cette opposition de circonstance qui s’est récemment rappelée au souvenir d’Azaly II devienne une opposition constructive digne de ce nom en s’identifiant à un discours basé sur une analyse de fond clairement assumé lors du débat parlementaire en cours. On ne peut opportunément voter pour une loi à l’hémicycle de l’AN pour draguer le pouvoir et venir d’un autre côté exposer à juste titre les doutes sur la sa faisabilité dans les journaux.
Ahmed Bourhane